Liberté d’expression : Sud Radio va-t-elle trop loin ?
Hier, je signalais le lancement de la nouvelle émission de libre antenne de Sud Radio, animée par Robert Ménard, une émission dont l’anti politiquement correct allait être la ligne directrice. Totale liberté d’expression pour les auditeurs, no limit ! Mais déjà la polémique éclate, suite à des propos très tendancieux tenus par certains auditeurs, et même un animateur de Sud Radio, au sujet de Dominique Strauss-Kahn.
Un auditeur décomplexé lance que DSK est "soutenu par les juifs", ce à quoi Robert Ménard réagit immédiatement, sentant venir la possible dérive antisémite... Mais c’est dans l’autre émission de libre antenne de la station, celle qu’animent Michel Cardoze et Eric Mazet, que le sujet rebondit. Mazet juge utile de revenir sur les propos tendancieux de l’auditeur et va même inciter à plusieurs reprises ses propres auditeurs à rebondir sur ce dérapage : “Si vous pensez que DSK est soutenu par les juifs, appelez au 36 28 ?, répète-t-il au moins quatre fois.
La suite est prévisible : malgré la réprobation de Michel Cardoze, qui juge que ça va trop loin, et qui n’est bizarrement pas du tout sur la même longueur d’ondes que son collègue, les auditeurs se lâchent sur les conseils de Mazet, qui veut que les gens disent sans tabou ce qu’ils pensent, et des propos très limites sont tenus à l’antenne...
Ce ton assez dérangeant constituera l’un des motifs de la démission de Jean Robin, qui n’était arrivé dans l’équipe de Robert Ménard que depuis... 4 jours. Ainsi écrit-il sur son site : "même si on est pour la liberté d’expression, comme je le suis, on est pour le moins mal à l’aise à l’écoute de ces extraits d’émission, et on se dit que les animateurs de la radio confondent liberté d’expression et légalité. Les lois antiracistes sont critiquables, mais qu’une radio nationale choisisse, dès son lancement, d’inciter des antisémites à appeler à l’antenne (“Si vous pensez que DSK est soutenu par les juifs, appelez au 36 28 ?), et avec une telle insistance (je crois qu’Eric Mazet l’a dit 4 fois de suite), ça laisse perplexe, et le mot est faible."
Alors au final, où placer la limite à la liberté d’expression dans les médias ? Faut-il filtrer à mort, comme sur France Inter (où récemment une auditrice a tout de même réussi à "pirater" l’antenne durant quelques secondes), ou laisser toutes les pensées s’exprimer, quitte à avoir parfois la nausée ? J’aurais tendance à penser qu’il ne faut pas brider la parole, mais qu’il faut aussi "éduquer" cette parole, dans le dialogue, la dialectique, entre les gens, mais aussi avec un modérateur réputé pour sa sagesse, sa capacité à pacifier les échanges, à rappeler la loi, et cet échange patient demande du temps... que la radio ne peut pas fournir en général (en tout cas, pas ce genre d’émission). Internet s’y prête un peu mieux, même si l’on constate que le débat quotidien, la confrontation avec les opinions d’autrui, ne suffit pas à éduquer (à civiliser) tout le monde... et que la "répression" peut être malheureusement nécessaire envers certains "fouteurs de merde" professionnels...
A la radio, je dis donc oui à la libre parole, mais avec des modérateurs de talent. Pas sûr que Mazet soit à la hauteur dans ce rôle...
Tags : Racisme Censure Médias Liberté d’expression DSK
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