Les avancées sociétales en termes d’ingénierie sociale
« Si l’on parvenait à comprendre les mécanismes et les ressorts de la mentalité collective, ne pourrait-on pas contrôler les masses et les mobiliser à volonté sans qu’elles s’en rendent compte ? » (Edward Bernays, Propaganda. Comment manipuler l’opinion en démocratie)
Le pouvoir est actuellement dans l’impasse. Le chômage explose alors que le contexte macro-économique menace de se dégrader encore, l’insécurité augmente, la diplomatie française se ridiculise, et la crise de l’Union Européenne et de la zone euro approche manifestement d’un point de rupture. Dans ces conditions, il est logique que ce pouvoir dans l’impasse soit tenté de créer des diversions et des écrans de fumée. Ce serait la raison pour laquelle est lancée la polémique sur la théorie du genre qui n’existe pas, après le mariage pour tous, ce ne serait qu’ une énième diversion sociétale.
Mais c’est peut être plus grave que ça, cette théorie serait la préparation d’artillerie nécessaire à un bon en avant du capitalisme moderne, qui est un système social et qui, en tant que tel , pose la problématique de la gestion des masses.
Lucien Cerise, auteur de « Gouverner par le chaos », sur le thème de la manipulation des masses et des liens avec la théorie du genre.
L’Ingénierie sociale est une modification planifiée du comportement, une méthode de manipulation systématique afin d’obtenir progressivement le contrôle de toutes les sphères du vivant.
Cela n’est certes pas neuf, car de tous temps le pouvoir s’est appuyé sur les leviers psychologiques, donc irrationnels, de l’homme. Toutefois, là où l’on parlait d’art (oratoire, rhétorique, sophistique, etc.), le 20ème siècle permit de parler de science, d’une technicisation / complexification des moyens d’écraser toute dissidence. L’analyse sociologique laissait place à l’univers psychologique (cfr « histoire des relations publiques au cours du XX ème siècle : partie 1 , partie 2, partie 3 ).Le projet avoué de ces « scientifiques » est, selon leurs propres termes, « d’aider à mettre en place un « fascisme à visage démocratique ».
Les systèmes fédérateurs humains comme les machines forment un système global que l’on peut pirater en visant les points de vulnérabilité. Il s’agit donc pour l’ingénieur social de comprendre les ressorts qui constituent une société pour en prendre le contrôle.
Le système de transmission d’une génération à l’autre dans une société passe par la parentèle qui est donc point faible à saper pour déconstruire la société, phase préliminaire à une prise de contrôle totale.
Dans cette interview, Lucien Cerise évoque l’anthropologue Français Maurice Godelier.
Le terrain sur lequel il réalise ses recherches fondatrices en anthropologie est l’actuelle Papouasie-Nouvelle-Guinée. De Lévi-Strauss, il a retenu l’emploi de la méthode structurale, qu’il a tenté de combiner avec une approche marxiste, non sans un certain succès.
Maurice Godelier organise des réunions mobilisant l’ensemble des disciplines (l’histoire, l’anthropologie, la sociologie, la psychologie, la linguistique et l’économie, pour les principales) afin de réaliser un bilan. Cette réflexion aboutit à un volumineux rapport en deux volumes, "Les sciences de l’homme et de la société en France : analyses et propositions pour une politique nouvelle". Il y envisage la création au CNRS d’un département « Sciences de l’Homme et de la Société » et de deux nouvelles commissions (linguistique et sciences politiques), propositions acceptées et aussitôt mises en œuvre.
Rappelons que selon Lévi-Strauss, dans une société les formes de parenté sont organisées d’abord de manière à permettre autant qu’à suivre le principe de « l’échange », de « la réciprocité » et de la « règle » qui font la dimension sociale de l’humanité.
Les « structures élémentaires de la parenté » foncièrement exogamiques, en tant que vecteurs d’intégration sociétale et de cohésion entre les sous-groupes, participent alors aussi des structures générales du fonctionnement d’une société qui à chaque fois doit apparaître pleinement personnelle par rapport aux autres.
Pour Maurice Godelier, ce n’est pas le cas. Voici un passage d’une interview réalisée par ‘l humanité :
« C’est une idée fausse. L’idée que la famille est le fondement d’une société est le ciment idéologique de l’opposition au mariage pour tous, mais ce n’est pas une réalité. Ce sont les rapports politiques et religieux qui sont le fondement d’une société, pas la famille. Ce sont les rapports sociaux qui établissent la souveraineté d’un certain nombre de groupes humains sur un territoire, ses ressources et ses habitants qui fondent une société. Et ces rapports sont des rapports de nature politique et religieuse quand n’existe pas la séparation de la religion et de l’État ».
La famille n’est donc qu’un épiphénomène, voir pire, une structure contraignante dont l’individu doit être soustrait comme le soulignait Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale, dans un entretien au Journal du dimanche lors de la rentrée 2012 :
"Le but de la morale laïque est de permettre à chaque élève de s’émanciper, car le point de départ de la laïcité c’est le respect absolu de la liberté de conscience. Pour donner la liberté du choix, il faut être capable d’arracher l’élève à tous les déterminismes, familial, ethnique, social, intellectuel, pour après faire un choix ».
Dans son livre « La Révolution française n’est pas terminée » Vincent Peillon selon wikiquote écrit à la page 17 : « D’où l’importance de l’école au cœur du régime républicain. L’école doit opérer ce miracle de l’engendrement par lequel l’enfant, dépouillé de toutes ses attaches pré-républicaines, va s’élever jusqu’à devenir le citoyen, sujet autonome. C’est bien une nouvelle naissance, une transsubstantiation qui opère dans l’école et par l’école, cette nouvelle Eglise, avec son nouveau clergé, sa nouvelle liturgie, ses nouvelles tables de la Loi ».Sans commentaire.
C’est sur cette lignée que s’inscrit la théorie du genre, il s’agit d’une méthode de déconstruction identitaire nécessaire à engendrer un homme nouveau libéré de tous stéréotypes, le Républicain.
L’autonomie ne s’envisage qu’en tant que soustraction à toute forme de cadre, de structure contraignante, les particularismes et structures traditionnelles sont des entraves à un stade supérieur d’organisation sociale.
Dans cette optique, le déracinement quant aux liens familiaux et aux traditions créerait les conditions d’un nouveau type de fraternité, seuls les déracinés peuvent accéder à la liberté intellectuelle et politique.
Mais à l’analyse des faits, l’émancipation tant prônée n’est qu’une mutation paradigmatique, publicité et propagande moderne ne faisant que supplanter les figures traditionnelles de la domination.
Le principal effet du déracinement, c’est le délitement du lien social, et ainsi une chaîne de déduction logique relie l’individu absolu à l’Etat absolu et au marché absolu, désormais libre de manœuvrer comme bon leur semble : mise en place de nouvelles structures contraignantes et restructuration des individus (cf. la grotesque théorie du genre) pour les adapter au néolibéralisme capitalisme mondialisé.
Maurice Godelier affirmait que l’union homosexuelle nous ouvre à un relativisme qui est un progrès. Si la famille est relative, elle pourrait aussi ne plus exister pour ne laisser place qu’à des individus isolé face à la toute puissance du marché et de l’Etat : c’est le totalitarisme de marché.
Que l’on ne se trompe pas : défendre la famille est un combat anticapitaliste.
Il ne s’agit pas de revenir en arrière et de s’inscrire dans une tradition figée et sclérosée. La tradition, la transmission d’un savoir et d’une représentation du monde est indispensable. Mais la vraie tradition est critique, il s’agit en permanence de l’analyser, elle doit permettre de tirer des leçons du passé. Le passé n’est bien sûr pas un âge d’or ni un Paradis perdu cependant il peut servir d’appui pour la construction du futur, tel le rétroviseur qui permet de regarder en arrière tandis que l’on conduit, c’est-à-dire que l’on avance (cf. l’éloge du rétroviseur dans Le complexe d’Orphée de J.C Michéa).
Le vrai progressisme, c’ est faire évoluer la tradition, et non la détruire en faisant table rase du passé car ce serait faire le jeu de l’Etat et du marché, les deux mamelles du totalitarisme.
Le pouvoir enfourche très clairement cheval de « l’homme de progrès » contre le « passéisme » des « conservateurs » qui n’ont pas saisi la dimension dynamique de l’identité humaine. Est passéiste, réactionnaire, ennemi du peuple quiconque ne sait pas comprendre les éléments de la nouveauté.
Pour le biologiste Henri Atlan, la dynamique contemporaine, en matière de reproduction, est caractérisée par la déconnexion progressive entre sexualité et natalité. Et il annonce une nouvelle étape dans ce processus : après la pilule, l’insémination, la fécondation in vitro, voici l’ectogenèse, c’est-à-dire l’utérus artificiel. Il en tire la conclusion que le « Meilleur des Mondes » d’Huxley est tout simplement sur le point de devenir technologiquement possible.
Et comme toutes les évolutions actuelles pointent vers le règne d’un totalitarisme mondial doux, ou se présentant comme tel, comme toutes ces évolutions renforcent constamment le règne du désir individualiste, l’anti-utopie d’Huxley est réellement à notre porte.
Espérons que le peuple de droite attaché aux traditions et conservateur comprenne qu’on ne peut pas vouloir le capital et récuser les ravages du capital. Tous ces gens qui défilent et qui voudraient un capitalisme propre se trompent et sont des alliés objectifs de phénomènes sociétaux qu’ils combattent.
Espérons que le peuple de gauche qui prétend lutter contre l’argent roi et le capitalisme pour une société meilleure comprenne que le progressisme radical hors sol est le cheval de Troie d’un néocapitalisme qui ne dit pas son nom.
Le populiste américain Chrisopher Lash (qui a inspiré Jean Claude Michéa) préconisait une refondation de l’axe d’analyse et de combat de la gauche, et l’alliance de cette gauche refondée avec toutes les résistances au déracinement et à la modernisation forcée.
Source : novopress
59 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON