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Commentaire de Éric Guéguen

sur Phronimos


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Éric Guéguen Éric Guéguen 8 novembre 2013 12:41

@ Machiavel1983 :
 
"Machiavel ne dissocie pas la morale du savoir politique, il dissocie la morale des moyens mais pas de la fin."
 
=> Donc rien à voir Aristote, j’insiste. Il ne s’agit pas de savoir si la fin est dissociée ou non de la morale chez lui, puisque la fin est nécessairement morale, c’est une priorité. À partir de là, pour parvenir à une certaine fin, le phronimos va puiser dans ses vertus intellectuelles les moyens successifs d’y parvenir, et à chaque moyen rencontré, le phronimos évalue celui-ci au regard de la morale grâce à sa vertu de prudence (ou phronesis). Si ce moyen en lui-même n’est pas en accord avec les préceptes moraux, il l’abandonne pour un autre. S’il n’en trouve pas d’autres, il a atteint ses limites intellectuelles. Libre à lui, dans ce cas, de justifier tous les moyens par la fin recherchée et ainsi de devenir Machiavel. smiley
J’essaie simplement de vous faire ressentir le scrupule qui différencie les deux approches et qui les rend rigoureusement différentes.
 

"J’ai une dernière question Eric Gueguen : est-il moral de tuer ceux qui veulent anéantir l’Etat et ses institutions ? Si vous me répondez oui, alors je vous dirai que Machiavel ne recommande pas d’être moins moral ! Si vous me répondez, non, alors dites moi ce qu’aurait préconisé Aristote dans pareil cas ?"
 
=> Sans parler de l’"État", la cité était pour Aristote la sainte matrice, ce sans quoi rien n’est possible, ni même la survie du phronimos. Partant de là, la conservation de ce bien commun prime le reste. Prenez Socrate. Est-il moral de s’être laissé accuser à tort par la démocratie athénienne et s’être laissé mourir quasiment ? Qu’aurait fait Machiavel dans un tel cas ? Ne se serait-il pas enfui sans demander son reste, comme le lui aurait conseillé Criton ? Socrate, lui, a gardé en vue le bien de la cité, le respect des lois communes et leur rôle émancipateur, peut-être savait-il que de sa mort seraient tirées quelques leçons quant aux dangers de l’opinion publique, leçons salutaires pour la cité. Qu’en pensez-vous ?
Je sais que je réponds à vos questions par d’autres questions, mais j’espère que vous verrez où je veux en venir. Socrate ou Aristote ont en vue un bien suprême constant, et délibèrent pour accorder le divers de la vie à ce bien constant ; pour Machiavel, le bien est inconstant, il dépend lui-même des circonstances (fortuna) comme des caractères (virtù) en jeu.

 


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