@fred La meilleure réponse à la présente situation politique en France , je crois que Mendes France l’a dite il y a de ça 50 ans ! Voyez vous-même :
Extraits
de l’analyse de Pierre Mendès
France sur l’Europe 19/01/1957
« Le projet de marché commun tel qu’il nous est présenté
est basé sur le libéralisme
classique du XIXe siècle,
selon lequel la concurrence
pure et simple règle tous les problèmes. Dix crises graves, tant de
souffrances endurées, les faillites et le chômage périodique nous ont montré le
caractère de cette théorie classique de résignation. […] Dans le
cas d’une crise économique, il se produira une baisse des salaires allemands,
un dumping de l’industrie allemande contre la nôtre.
[…] L’harmonisation doit se faire dans le sens du progrès social, dans le sens
du relèvement parallèle des avantages sociaux et non pas, comme les
gouvernements français le redoutent depuis si longtemps, au profit des pays les plus
conservateurs et au détriment des pays socialement les plus
avancés.
En fait, ne nous
ne le dissimulons pas, nos
partenaires veulent conserver l’avantage commercial qu’ils ont sur nous du fait
de leur retard en matière sociale. Notre politique doit continuer à
consister, coûte que coûte, à ne pas construire l’Europe dans la régression au
détriment de la classe ouvrière et, par contrecoup, au détriment des autres
classes sociales qui vivent du pouvoir d’achat ouvrier. Il faut faire l’Europe
dans l’expansion et dans le progrès social et non pas contre l’une et
l’autre.
Si nos charges
sont trop lourdes, comme il est certain, si notre balance des payements en est
altérée, on nous invitera à dévaluer le franc, une ou plusieurs fois, autant
qu’il le faudra, pour rétablir l’équilibre, en réduisant chez nous le niveau de vie
et les salaires réels. […] Alors, la dévaluation ne sera plus une
décision souveraine, nationale ; elle nous sera imposée du dehors,
commepour freiner nos initiatives sociales, jugées
trop généreuses.
Il est prévu que
le Marché commun comporte la libre circulation des capitaux. Il est évident que
le mouvement naturel des capitaux, surtout des capitaux privés, sera orienté
vers les pays à faibles charges, c’est-à-dire vers les pays où la politique
sociale est la moins coûteuse. Les capitaux ont tendance à quitter les pays
socialisants et leur départ
exerce une pression dans le sens de l’abandon d’une politique sociale
avancée.
Il m’est arrivé
souvent de recommander plus de rigueur dans notre gestion économique. Mais je ne suis pas résigné à en faire
juge un aréopage européen dans lequel règne un esprit qui est loin d’être le
nôtre. Nous ne pouvons pas nous laisser dépouiller de notre liberté de
décision dans des matières qui
touchent d’aussi près notre conception même du progrès et de la justice sociale
; les suites peuvent en être trop graves du point de vue social comme du point
de vue politique. Prenons-y bien garde aussi : le mécanisme une fois mis en marche,
nous ne pourrons plus l’arrêter […] car ensuite, les décisions seront prises
à la majorité.
L’abdication d’une démocratie peut prendre deux formes, soit le recours à
une dictature interne par la remise de tous les pouvoirs à un homme
providentiel, soit la
délégation de ces pouvoirs à une autorité extérieure, laquelle, au nom de la technique,
exercera en réalité la puissance politique, car au nom d’une saine économie, on
en vient aisément à dicter une
politique monétaire,
budgétaire, sociale, finalement « une politique », au sens le plus large du mot,
nationale et internationale. » [Pierre Mendès France, votant contre le Traité de
Rome]