@Yacine Chibane
Avant Internet, les paranoïaques restaient
invisibles ; ils étaient une poignée (comme aujourd’hui) et n’osaient
pas s’exprimer dans leur environnement immédiat, conscients qu’ils
passeraient pour des dingues et qu’ils seraient rejetés par la
communauté. Internet leur permet de se retrouver et de prendre de
l’assurance : sur ce fil, on a dix spécimens à tout casser (sur 65
millions d’habitants), qui, en occupant le terrain, ont l’impression de
représenter quelque chose. On a vu aux élections ce qu’ils pesaient (0,9% pour Asselineau).
Leur sectarisme leur fait rejeter le dialogue avec
des gens "normaux", qui pensent plus sainement qu’eux (de manière moins
paniquée) et qui représentent plus de 99 % de la population. C’est
dommage pour eux. Au lieu de se conforter dans leurs délires, avec les
100 personnes qui délirent comme eux en France (et qui trouvent dans tel
ou tel site le moyen de se compter), ils pourraient rentrer en dialogue
avec le peuple qui les entoure, et qui, chose incroyable pour eux, ne
pas pense que la Terre est plate, que le réchauffement climatique est un
mythe mondialiste, qui pense que le terrorisme actuel est bel et
bien islamique, que Neil Armstrong a marché sur la Lune, ou encore que l’Union européenne mérite d’être
préservée, même si elle doit se réformer.
Malheureusement, Internet les
enferme, plus qu’il ne les libère. Ils se croient "éveillés", alors
qu’ils sont intoxiqués. Ils croient connaître des informations sensibles
que les autres ignorent, alors qu’ils n’en connaissent que très peu en
réalité, souvent de manière biaisée (épistémologie invalide), ressassant les mêmes choses depuis des années. Ils parlent de
l’Empire, comme d’autres parlent du Système... sans pouvoir le définir.
Ils pourraient parler aussi du Diable de la même manière (ce que certains font d’ailleurs : Soral, Hillard, Civitas...). Même logique
simplificatrice et superstitieuse.
Est-ce que cela les rassure de se
dire que le MI6 pilote les attentats, plutôt que des islamistes ? Il est vrai que l’on
peut théoriquement reprendre le contrôle sur nos services de renseignement, pas sur des islamistes dispersés dans le monde entier.
Il serait intéressant qu’ils nous décrivent avec précision le cheminement
intellectuel qui les a amené à adopter ce genre de conception. Est-ce que
tout part du 11-Septembre pour eux ? Est-ce que leur vision de
l’Histoire est une déduction "logique" de la manipulation qui aurait eu
lieu lors de ces attentats ? Ou est-ce plus compliqué que ça ?
Ils notent la coïncidence des attentats avec des élections... mais quel est censé être l’impact des attentats sur les élections ? quel candidat est censé en profiter ? Ils ne notent pas la coïncidence des attentats de Londres avec le Ramadan, car, pour eux, les islamistes ne peuvent avoir aucune initiative, aucun agenda... Ils n’existent qu’en tant qu’ils sont manipulés par des gens de notre camp.
Ce pourrait être une vision profondément raciste : les Arabes sont si nuls qu’ils ne sont pas capables de telle ou telle opération compliquée... pas plus que d’une opération simple d’ailleurs, comme à Londres. Gageons qu’il s’agit plutôt de méconnaissance. Les conspis nous parlent CIA et MI6, sans en savoir rien, mais n’ont rien à dire sur le monde arabe, les divers courants islamistes... car ils les ont exclus de leur représentation du monde hyper simplifiée, où seul le Diable (l’Empire américano-israélien) agit véritablement (dans l’ombre).
Le conspi est heureux d’être un "initié" qui, au milieu des cons, des moutons, des mougeons (tous les "crétins" avec lesquels il ne peut pas échanger), a compris les mécanismes secrets du monde. C’est sans doute un moyen pour lui de compenser diverses frustrations dans sa vie sociale et personnelle. Un vrai sujet d’étude psychologique et sociale...