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Commentaire de Joe Chip

sur Sociologie du Gamer - De la crise du capital au virtuel intégral – Conférence d'Adrien Sajous à Dijon


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Joe Chip Joe Chip 15 juillet 2017 16:52
Bon, je vais me faire l’avocat du Diable sur cette "problématique" mais je crois qu’en l’occurence le "Diable" vidéoludique mérite d’être défendu contre les hypocrites et les petits pères la morale qui, sous couvert de concepts qu’ils ne maîtrisent pas, s’en prennent en réalité à tout autre chose. Je me base sur ce que j’avais lu à l’époque sur ER car je n’ai pas trois heures à consacrer à ce gugusse (au fait je croyais que les diplômes de sciences humaines, en particulier une petite licence, c’était pour les nuls...)

S’il y a bien des gens qu’il faut écouter avec circonspection, ce sont les repentis et les abstinents. Evidemment un ancien alcoolique aura tendance à estimer qu’il ne faut pas boire une goutte d’alcool, que l’alcool est une saloperie détruisant des vies et des familles, sans toujours comprendre que son addiction est liée avant tout à une histoire et à des facteurs personnels (psychologiques, familiaux, génétiques...) 

La meilleure preuve, c’est que les thérapies qui permettent de se débarrasser d’une addiction sont presque systématiquement basées sur une approche personnelle et cognitivo-comportementale. L’interdiction, la moralisation et les grandes théories marxisto-machin-chouettes rendant la société responsable de toutes les dérives individuelles, n’ont tout simplement aucune valeur dans un cadre thérapeutique. Un alcoolique ne cessera pas de l’être si on se contente de lui retirer ses boutanches, de le culpabiliser en lui faisant la morale ou de lui expliquer qu’il est une victime de l’ordre bourgeois capitaliste et de la méchante société de consommation. Donc rien que sur le plan de la prophylactique, ça ne se tient pas cette théorie de l’aliénation. 

Toute forme d’addiction repose d’ailleurs sur un fonctionnement virtuel (d’où les "paradis artificiels" de Baudelaire), donc de ce point de vue, le jeu vidéo n’a aucun caractère spécifique par rapport à d’autres formes de divertissement : c’est une virtualité objective. L’addiction au porno est une sexualité de substitution. D’une certaine manière, le type enivré qui se créé spontanément des amis ou des ennemis dans la rue, ou l’usager de LSG en plein "trip", sont plongés eux aussi dans une forme de réalité virtuelle qui n’a rien à voir avec le mode de production de la "marchandise". Les hommes se distinguent de l’animal par leur capacité à créer et investir des univers fictifs et virtuels, à y croire (religion) et à en abuser (drogues récréatives). Avant le jeu vidéo, il y avait les films (et les mêmes pseudo-marxistes et autres religieux réacs expliquaient que le cinéma dévoyait la jeunesse) et les romans (Flaubert mis en procès à cause des "rêveries" subversives de Madame Bovary). 

Bref, le fond de ce discours, c’est du prohibitionnisme (rien à voir avec le sionisme, hein) enrobé dans un jargon pseudo-marxiste (salut Cousin !) pour faire passer la pillule. La ficelle devient quand même un peu grosse. Soral l’a appliqué avec un certaine habileté au monde de la séduction. Cardet nous a refait le coup avec le rap et les méchants rappeurs capitalistes du monde de la marchandise ignoble vendu au grand Mammon consumériste - c’était déjà moins convaincant - , maintenant c’est le jeu vidéo, quel sera le sujet du prochain livre ? Au moins, on a échappé à un titre bien racoleur comme "L’effroyable imposture du jeu vidéo". 

Certaines personnes n’arriveront jamais à accepter les concepts de liberté, de responsabilité individuelle et de modération. Il faudrait aseptiser la société pour les soustraire à la tentation et aux démons de la "virtualité", proscrire tous les débordements de l’imaginaire, protéger l’homme du mal - donc de lui-même - au nom de la rectitude morale. 

Pourtant, il y a des tas de gens qui jouent aux jeux vidéos sans devenir des geeks asociaux et paumés dans des univers virtuels. La majorité, même. C’est vraiment une réduction caricaturale, sans parler de l’immense créativité qui se concentre aujourd’hui dans le monde du jeu vidéo (que celui qui n’a jamais pris son pied en jouant à un GTA me jette la première pierre...)

Il y en a aussi qui choisissent de ne pas ou plus y jouer (c’est mon cas) parce qu’ils manquent de temps ou ont d’autres priorités, sans pour autant devenir des ayatollah prônant l’abstinence ou pire, l’interdiction, sous couverts de "réflexions" sur le grand capital.

Désolé mais la dialectique qui consiste à instaurer des tabous et des interdits sous prétexte qu’il y aurait des abus, c’est du puritanisme. L’habillage marxiste (simpliste) et l’alibi de la dénonciation de la société de consommation n’y changent rien. Lisez Baudrillard, c’est d’un tout autre niveau sur la virtualité et la critique du consumérisme...


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