L’effroyable imposture du Rap
La bande-annonce
Au vu du succès mondial de cette musique, à ce jour la plus écoutée à travers le monde, cet essai critique s’efforce de retracer ce long processus de domination à travers les quarante dernières années et d’exposer ses terribles conséquences sur le tissu populaire : appauvrissement du langage, donc de la pensée, glorification de la culture ghetto de type US (culte des armes, de la prison, de la consommation de stupéfiants, de la violence verbale), « automythification » d’une jeunesse immigrée conduisant à une victimisation perpétuelle, et à la division des quartiers populaires : les immigrés d’un côté, les « desouche » de l’autre. Une « déconscientisation » politique à travers l apologie de l’ultralibéralisme et du darwinisme sociétal amenant logiquement à l atomisation de l’individu et au « chacun pour sa gueule », soit la fin de la nation et son glissement vers une société d’hyperconsommation.
Loin de s’arrêter à une simple description, ce livre tente d’analyser et d’expliquer ce processus, tout en ne taisant pas le rôle sombre des principaux bénéficiaires du rap, qui s’avèrent en être aussi les principaux instigateurs : pour des raisons économiques, mais aussi, et c’est le plus inquiétant, pour des raisons idéologiques.
L’Effroyable Imposture du Rap tombe assez bien au moment où le tapage médiatique autour du Rap Game bat son plein.
Son auteur, Cardet, s’est appuyé intelligemment sur les travaux néo-marxistes de Michel Clouscard. En effet, celui-ci développe déjà en 1981 dans le Capitalisme de la séduction, la théorie selon laquelle la culture populaire américaine des années 50 et 60, a été récupérée par l’idéologie libérale libertaire pour promouvoir le capitalisme d’après guerre.
Alors que Michel Clouscard appuyait son ouvrage sur des bases anthropologiques d’où découlait le concept « d’animation machinale », Cardet s’est intéressé plus particulièrement au contexte idéologique des luttes d’émancipation afro-américaines et de leur récupération intellectuelle par la New Left.
La Nouvelle Gauche, sorte de NPA américain des années 60 et 70, s’appuie alors sur les théories du penseur hédoniste Herbert Marcuse pour populariser l’idée du marxisme libertaire au sein de la communauté noire. Au même moment, une autre subversion est déjà active par l’intermédiaire du projet Cointelpro développé par le FBI de J.Edgar Hoover.
Cet encadrement de la jeunesse afro-américaine se concrétisera par l’arrivée d’une nouvelle culture populaire incarnée au départ par Afrika Bambaataa de la Zulu Nation dont le slogan fut « Peace, unity and having fun ». Apparaît alors une ribambelle d’acteurs, de producteurs, d’usuriers et d’artistes tels que Russell Simmons, Rick Rubin, Lyor Cohen, Steve Rifkind, Jerry Heller, Morris Levy comptable du clan Genovese... qui vont constituer progressivement le nouveau noyau culturo-mondain derrière l’industrie du rap.
Une émulation va naître parmi cette toute nouvelle élite pour créer progressivement les fondamentaux capitalistes toujours d’actualités : le street wear, le rap indépendant, le gangsta rap, le street marketing, le rap game.
Quelques happy-few français de passage à New-York, dont le journaliste Bernard Zekri (ancien directeur en chef des Inrocks jusqu’à son éviction par Audrey Pulvar), vont exporter ce nouveau modèle économique en France quelques années plus tard.
Cardet a la légitimité de l’auditeur (du « pointé » comme il l’écrit dans sa préface). Il est par ailleurs issu d’une fratrie surnommée les blacks dragons, qui ont longtemps été les gardiens du temple de la culture hip hop en France, tout en étant chasseurs de skins.
L’ouvrage est une démonstration très convaincante de la puissance de récupération des cultures populaires par l’industrie du narcissisme.
Ci-dessous, Cardet parle superficiellement de son livre sur Webrealtv
Pour les motivés, un entretien plus dense avec Frank Abed.
Source : KontreKulture
Tags : Musique
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