« L’ esclavage, c’ est la privation de libertés ET être la propriété d’ un autre par la contrainte. »
Nous n’avons probablement pas le même entourage. Je ne vais pas entrer dans le jeu du shoahnanas,
la compétition victimaire etc., évidemment que nous n’en sommes pas
(encore) aux horreurs de la traite négrière. Mais comme le précise
Wendigo qui, lui, a voulu comprendre ce que j’écrivais :
« l’esclavage ça commence par ce qui vit cette personne »
Merci
à lui aussi de préciser que contrairement à vous et à votre fuite vers
le pathos mémoriel, j’ai donné la définition du mot "esclavage" ; en
fait je me suis même abstenu de la commenter. Mais puisque cela semble
nécessaire à vous lire :
1) la privation de liberté est bel et
bien présente pour ceux dont la routine se limite à bosser pour survivre
en payant le loyer et la bouffe, plus charges incompressibles, et qui
ne sont "libres" d’apprécier aucun bonus en dehors de ça. Peut-être
serez-vous tenté de rétorquer que tous les loisirs ne sont pas payants
et c’est vrai, mais parfois en mode "survie", c’est le temps lui-même
qui fait défaut pour pouvoir ne serait-ce qu’apprécier les plaisirs
simples et "gratuits" ;
2) la condition sociale des travailleurs
pauvres les contraint bel et bien à s’acquitter des tâches les plus
pénibles et/ou humiliantes contre paiement d’un salaire qui suffit à
peine à payer leurs frais de logement et de nourriture. En fait, il
existe même (le saviez-vous ?) des gens qui bossent mais dont le salaire
ne leur permet pas de se loger convenablement : certains se retrouvent à
la rue, d’autres à 30... 40 ans chez papa et maman. D’autres encore
font les poubelles pour se nourrir, la qualité n’y étant peut-être pas,
je vous le concède, tellement inférieure à celle des assiettes de Spanghero ; mais c’est tout de même (à mon avis) préoccupant.
Sortez
donc la tête du sable et vous verrez qu’une partie croissante
(majoritaire ?) de la population travaille seulement pour vivre et ne
vit que pour travailler, ce qui correspond donc à la définition de
l’esclavage en tant que concept politique et économique. La définition
vient de Larousse, pas de moi. Écrivez-lui si cela vous pose un
problème.
Maintenant pour la partie plus encyclopédique,
référence à la traite négrière etc., sachez d’abord que je ne hais pas
davantage les Noirs qu’aucune autre catégorie. Ça c’était pour la touche
de sarcasme et comprenne qui peut.
Ensuite et attention, c’est plus dur à comprendre : le système en place
est bel et bien un condensé de ce qui s’est fait de pire dans
l’histoire de l’humanité... mais en plus "suptile", de sorte que ça ne
se voit pas. Des exemples à réfléchir avant de m’insulter :
1)
Nous avons donc un système dans lequel les gens passent leur temps soit à
bosser, soit à chercher du travail pour prouver qu’ils sont bien
"motivés", et ne reçoivent en contrepartie que le strict minimum pour se
loger et se nourrir càd pour survivre. C’est pas très différent du
bétail qu’on abrite et auquel on fait bouffer n’importe quelles saloperies, ceci afin de les maintenir en vie dans le seul but qu’ils puissent continuer à nous servir.
Attention toutefois : ceci ne s’applique qu’aux 99% et peut surprendre
si vous n’en faites pas partie (ou si vous en êtes mais sans vous en
rendre compte).
2) La "liberté chérie" n’existe que pour ceux
qui ont les moyens de s’offrir cette liberté. Bien sûr vous êtes libres
de vous offrir un séjour dans un hôtel à Dubaï, simplement faut payer et
si vous ne pouvez pas payer, vous ne restez pas. De même vous êtes
libres d’offrir à vos gosses des cours de piano ou d’équitation, mais
sous réserve que vous puissiez les financer. Les chômeurs sont fainéants
parce que c’est bien connu : ils sont "libres" de créer leur propre
entreprise et de se mettre en concurrence directe avec Tex (par exemple)
s’il leur prend l’envie de créer un atelier familial pour la confection
de produits textiles. Seems legit, et bien sûr : les grands pays riches
et/ou puissants sont libres de décider qui est ou non légitime pour
gouverner les petits pays pauvres et faibles. La liberté a un prix que
seuls certains peuvent payer.
3) Le beau système libertaire que
nous appelons "démocratie" est donc à la fois oligarchique et de nature
aristocratique comme l’explique bien Chouard (vous chercherez s’il vous
prend l’envie de me comprendre). Nous on est pas comme ces salauds de
communistes, on est libres. Libres dans un système qui nous permet juste
de boucler les fins de mois, sauf les trente derniers jours, et qui contrôle jusqu’à notre pensée par le biais de structures médiatiques appartenant aux gens les plus "libres" càd ceux qui ont du pognon.
Les puissants politiques, industriels et patrons de presse marchent
ensemble pour mieux écraser sous leurs pompes en croco les visages des
99% de gens qui galèrent. Or un système dans lequel un "faisceau" de
forces politiques s’unissent pour servir des intérêts communs, ça porte
un nom et ce nom c’est "fascisme".
Pouvez gesticuler en disant qu’il n’y a (pour l’instant) pas de
répression violente comparable à celle de l’Italie sous Mussolini, mais
la base étymologique du "faisceau" ("fascio") est bien là et c’est un
bon début. De même, la réduction de ce que nous sommes à "travailler
pour vivre et vivre pour travailler", c’est la base d’un esclavage qui
ne dit pas son nom.
On pourrait continuer en évoquant par
exemple la laïcité qui en principe protège la "liberté" de culte mais
qui, de plus en plus, tend plutôt à l’interdire. Ou encore les droits de l’homme
parmi lesquels égalité et fraternité (article premier), "droit à la vie
et à la sûreté des personnes" (très relatif pour qui se retrouve à la
rue), interdiction de l’esclavage (article 4) et corrélativement :
"droit au travail, au libre choix de son travail [...] et à la
protection contre le
chômage" ; interdiction de la torture sauf à Guantanamo ; "liberté
d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas
être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de
répandre, sans considérations de frontières, les informations et les
idées par quelque moyen d’expression que ce soit", monsieur Snowden et
(madame ?) Manning apprécieront ; liberté de réunion et d’association pacifique ;
"droit au repos et aux loisirs" (article 24) ; "droit à un niveau de
vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être
et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement,
le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux
nécessaires" (article 25) ; sans oublier l’article 30, le plus important
: "Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être
interprétée
comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu un droit
quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à
la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés". Comme par
exemple le fait de priver le plus grand nombre de travail et des moyens
de sa subsistance au prétexte de ne pas toucher au "droit de propriété"
mentionné à l’article 17 (et qu’il convient au nom de la "liberté" de
protéger quitte à bafouer les 29 autres droits de la Déclaration).
J’ai
le regret de vous informer, monsieur Gerfaut, que vous vivez dans un
monde qui n’existe pas. Cependant je ne vous juge pas, c’est votre
problème... je suis juste un peu triste de voir combien les stratégies
pour renverser le sens des mots et faire passer des vessies pour des
lanternes fonctionne. Les oligarques en place ont tiré les leçons du
passé mais ils poursuivent toujours les mêmes objectifs de pouvoir et de
domination sur les masses. Seulement puisqu’ils ont vu que frontalement
ça ne marchait pas, ils nous font maintenant du fascisme et de
l’esclavage "soft" et sous couvert d’une novlangue très efficace. "Nul
n’est plus esclave que celui qui se croit libre sans l’être", sad but
true !
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