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Joe Chip Joe Chip 12 avril 2016 19:48

A côté de la plaque le Rougeyron, c’est pas un problème de dévaluation compétitive - la panacée des souverainistes - mais de politique industrielle... .

Au début des années 70, la France et l’Allemagne de l’Ouest avait une base industrielle comparable.

Les Allemands ont fait le choix d’une économie exportatrice de produits industriels à forte valeur ajoutée, ce qui impliquait des investissements massifs dans l’automatisation et la formation des ouvriers qualifiés - et par conséquent bien payés.

Les décideurs français ont cédé à une double tentation :

- miser principalement sur la consommation intérieure, ce qui pouvait sembler cohérent à l’époque puisque l’on produisait tout en France avec une concurrence étrangère de faible intensité et une démographie dynamique.

- miser sur des produits de bas ou milieu de gamme qui n’imposaient pas de transformation drastique des chaînes de production et de gros investissement en capital (point faible du capitalisme français) en profitant de la compétitivité prix permise par l’afflux constant d’une main d’œuvre immigrée peu qualifiée, peu encline à la protestation syndicale et bien entendu peu chère. Et si des pays européens (Italie, Espagne) venaient nous concurrencer, paf, une petite dévaluation (une de plus) et la machine repartait... pour un temps.

Ca a correctement fonctionné jusqu’au début des années 80. Ce que les décideurs n’avaient pas anticipé, c’est l’ouverture graduelle à la concurrence internationale avec un nombre grandissant de pays (notamment asiatique) venant concurrencer les produits français sur le secteur du milieu de gamme, avec des coûts de production beaucoup plus concurrentiels. L’Allemagne, de son côté, pouvait continuer à exporter ses machines-outils et ses produits haut de gamme en profitant par ailleurs de la valorisation du mark fort, ce qui a entraîné une balance commerciale excédentaire.

L’autre problème, c’est le chômage de masse produit par ce système où les ouvriers français (et bientôt salariés) se retrouvaient déclassés et sans possibilité de retrouver un emploi ou une formation, les grosses entreprises continuant d’avoir recours massivement à la main d’œuvre immigrée. Par ailleurs, ce chômage structurel permettait d’entretenir une pression à la baisse sur le salaire moyen, qui n’est pas très élevé en France par rapport aux pays comparables. Cette stagnation des revenus a fini par gripper le dernier moteur de l’économie française, la consommation, qu’il a fallu encourager et entretenir grâce à de multiples niches fiscales, exonérations ou aides gouvernementales... Les revenus d’assistance généreusement distribués venaient enfin masquer le glissement dans la pauvreté ou la stagnation d’une part grandissante de la population, laissée sans perspectives et reléguée en périphérie des villes. 

Nos élites brillantes avaient sans aucun doute parié sur le fait que les fameux emplois tertiaires générés par la mondialisation (peu rémunérateurs en réalité par rapport aux emplois industriels qualifiés) permettraient de compenser cette casse sociale, mais les crises successives ont eu raison de ces espoirs et de cette politique insensée. 

Aujourd’hui l’économie française tient grâce à la consommation et quelques secteurs qui ont réussi leur modernisation (dont l’industrie de défense et, dans une certaine mesure, le numérique). Mais combien de temps encore ? 

Quant à la solution préconisée par les souverainistes, la dévaluation, elle ne ferait qu’aggraver la situation en appauvrissant un peu plus les travailleurs sans remédier aux problèmes structurels de l’économie : produits inadaptés (quand l’image de la France, comme le montrent toutes les études, est associée au luxe et à la qualité), coûts de production trop élévés, main d’œuvre peu qualifiée, etc... 




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