• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV Mobile


En réponse à :


vote
Joe Chip Joe Chip 14 avril 2016 00:22

@Bainville

Je dirais plutôt qu’il y a une relation complexe entre ces deux phénomènes, mais c’est là notre divergence sur le rôle de l’État qui, selon moi, ne peut pas créer de prospérité ou de richesse. Comme je le disais sur un autre article, si c’était le cas l’empire soviétique serait aujourd’hui le plus riche au monde.

Je n’ai jamais dit qu’il s’agissait d’une règle mathématique (et je n’ai pas dit que le rôle de l’Etat était de créer directement la richesse). L’Empire soviétique n’est pas comparable à un Etat-Nation comme la France. Les Russes ont voulu transformer une société agricole et traditionnaliste, où subsistait le servage, en un empire moderne et industriel capable de rivaliser avec la première puissance mondiale.

Ce que l’on appelle aujourd’hui la mondialisation n’est que l’extension de l’empire commercial britannique, qui a été mis en place par l’état anglais. Avant les navigation acts, les voies de navigation appartenaient à tout le monde et à personne, selon le droit antique de la mer. Jusqu’au jour où les Anglais décidèrent de se les approprier en votant des lois protectionnistes interdisant aux navires étrangers d’accéder aux ports contrôlés par les anglais. Ces lois sont à l’origine de la construction de la Royal Navy, flotte de guerre dont le but a toujours été, par la suite, de garantir l’hégémonie économique de l’Angleterre contre ses grands rivaux. Les premiers qui se rebellèrent furent les Hollandais, qui étaient alors la première puissance commerciale du monde. Il y eut en tout quatre conflits successifs entre l’Angleterre et la Hollande pour la maîtrise des routes maritimes.

Puis se fut le tour des Espagnols, avec pour enjeu la domination de l’Atlantique et la mainmise sur les richesses (or) qui se déversaient à partir des colonies prospères du nouveau monde. Les Anglais s’appuyèrent alors largement sur la piraterie pour s’emparer de l’or espagnol tout en menant une intense propagande politique visant à présenter l’Espagne comme un pays de catholiques fanatiques et intolérants, "légende noire" qui fut ensuite utilisée par les Américains durant le XIXème siècle pour décrédibiliser la puissance coloniale déclinante. Enfin le choc inéluctable avec la France quand celle-ci se décida (enfin) à concurrencer l’Angleterre de plus en plus vorace sur les mers. La France perdit le premier round (1763), remporta le second (1781) avant de perdre la finale face à l’Europe coalisée - par l’Angleterre - contre elle. 

Une fois que l’Angleterre eut réglé le contentieux avec les Etats-Unis et demeura sans concurrent en mesure de remettre en cause sa domination sur les voies maritimes, celle-ci déclara alors la paix universelle du commerce en mettant fin aux navigation acts (1849) et en décrétant unilatéralement le libre-échange ! Et quand un pays comme la Chine refusa d’ouvrir ses ports au commerce anglais, la navy répondit en bombardant les ports chinois et en légalisant ensuite le commerce de l’opium ! Le tout, évidemment, au nom du "libre-échangisme".

C’est merveilleux, voilà un pays qui a été en guerre avec le monde entier, qui a planifié le premier génocide de l’histoire moderne (déportation des Acadiens), qui a mis en place les premiers camps de concentration en Afrique du Sud, mais qui, ayant écrit l’histoire, a réussi à se faire passer pour la puissance soucieuse d’équilibre qui a répandu le droit et le commerce à travers le monde. Et c’est ce système-là - repris par les USA à partir de la seconde guerre-mondiale - que nous continuons à appeler de façon erronée le libre-échangisme ou désormais, la "mondialisation".

Vous voyez donc bien que l’économie est toujours un produit de la politique, et qu’il y a toujours un maître du jeu derrière les déclarations de principe (concurrence libre et non faussée, etc.). C’est la raison pour laquelle la Chine commence d’ailleurs à affirmer sa souveraineté sur la mer de Chine et à contester la domination navale des Américains en zone asie-pacifique. 

Je dis simplement pour ma part que l’Etat doit encadrer et réguler le marché, conception libérale on ne peut plus classique, voire ordo-libérale. Le libre-échange n’est pas un état naturel de l’homme (et donc par extension de l’économie) qui tend plutôt instinctivement à ériger des murs (et donc par extension des frontières et des barrières commerciales) pour mettre à l’abri ses biens, sa famille... L’économie entendue comme un "processus naturel" et positif (la petite main invisible du marché) qu’il ne faudrait surtout pas altérer correspond à une vision irénique qui n’est pas celle des libéraux classiques pour lesquels la "liberté naturelle" doit être instituée politiquement, encadrée par le droit et régulée par un gouvernement démocratique, afin d’éviter les excès auxquels pourraient conduire l’appât du gain, l’égoïsme, et la vanité. 

Effectivement, c’est une différence importante entre les classiques et les "néolibéraux" qui ont en quelque sorte une vision "chimiquement pure" du libéralisme. 

Par contre le pays le plus riche du monde (les Etats-Unis) a une très forte tradition étatiste même si elle est différente de l’étatisme européen.




Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON