Ils
font feu de tout bois
Jacques
Attali : sanctuariser le progrès
« Le référendum
britannique, écrit-il, quel qu’en soit le résultat, constitue un tournant
idéologique majeur dans l’histoire de l’Occident. Un tournant vers le pire, si
l’on n’en pèse pas toutes les conséquences. » Vers le pire ? Oui car, «
jusqu’ici, on considérait certaines évolutions institutionnelles, économiques,
sociales, scientifiques, comme des avancées telles que, une fois qu’elles
étaient installées, nul ne chercherait plus jamais à les remettre en cause,
même pas par un vote démocratique. Avec le vote sur le Brexit, c’est ce
principe, non-dit et pourtant essentiel, qui est remis en cause. »
« Un
tel référendum, enchérit-il, implique qu’un peuple peut remettre en cause toute
évolution considérée jusque-là comme irréversible, telle qu’une une réforme
institutionnelle, une conquête sociale, une réforme des mœurs. »
Celui
qui n’exclut pas de se présenter à la présidence de la République explique :
«
Certes, il a toujours été admis qu’en principe, en démocratie, le peuple peut
décider de tout. Il n’empêche : selon notre conception occidentale du droit, il
existe des progrès irréversibles (par exemple, la démocratie, la liberté du
culte, l’interdiction du travail des enfants, l’abolition de la peine de mort)
qu’un vote simple ne peut défaire. Admettre qu’on puisse remettre en cause des
acquis, revient à nier la notion même de progrès. »
Jacques Attali propose donc une réforme institutionnelle, afin de
déterminer quels sont les « sujets qu’un seul vote majoritaire du peuple ne
pourrait suffire à trancher », sujets « qui seraient sanctuarisés, en les
inscrivant dans la Constitution ». Puis « il faudrait ensuite modifier la
procédure de réforme constitutionnelle, pour s’assurer qu’un vote de
circonstances ne puisse avoir des conséquences de long terme non désirées.