Vente de Rafales à la Grèce : quelles conséquences dans le conflit larvé avec la Turquie
« Ils vont comprendre que la Turquie est assez forte politiquement, économiquement et militairement pour déchirer les cartes et les documents immoraux ». Voici ce qu'avait déclaré le président turc, Recep Tayyip Erdogan, début septembre 2020 dans un climat de tension gradissante (permanente depuis des décennies) avec la Grèce sur fond de litige inconciliable de fait sur la question de la zone économique exclusive (ZEE)*.
Ce n'est pas vraiment nouveau mais les Turcs convoitent les fonds marins richement dotés en gisements de gaz, notamment ceux de Chypre, île annexée au tiers (nord de l'île) en 1974 par l'état colon Turc. L'île est donc divisée entre la République de Chypre au sud, à majorité grecque et membre de l’UE, et la République turque de Chypre du Nord (RTCN), reconnue par la seule Turquie (voir cet excellent article pour mieux comprendre cette relation tumultueuse : https://www.agoravox.tv/tribune-libre/article/chypre-la-colonisation-oubliee-85000). Ankara fait valoir que la RTCN doit bénéficier de sa propre ZEE, qui ampute d’autant celle de la République de Chypre, en plus de revendiquer une partie de la ZEE chypriote.
Ainsi la Turquie n'a eu de cesse de déployer des navires d'exploration/forage dans les eaux de Chypre.
Sur cette question deux clans s'opposent donc :
1/ Erdogan et Faïez Sarraj (chef du gouvernement d’accord national libyen) qui ont conclu fin 2019 un accord délimitant leurs ZEE, octroyant à la Turquie des droits sur une vaste zone en grande partie revendiquée par la Grèce.
2/ La Grèce, Chypre, l'Italie, l'Egypte et Israël qui ont accéléré, début 2020, la signature d’un accord pour construire le gazoduc sous-marin EastMed permettant de transporter le gaz des réserves situées au large des trois pays, puis vers le reste de l’UE en passant par des zones revendiquées par Ankara. Ce projet pourrait conférer à la Grèce un rôle majeur d'acteur énergétique dans la région. En outre il concurrencerait les gazoducs transitant par la Turquie. La Grèce a aussi délimité sa ZEE avec l’Italie en juin 2020, puis avec l’Egypte en août 2020. Le déploiement du navire de forage Oruç Reis est intervenu en réponse à ce que la Turquie a considéré comme « une violation du plateau continental et des droits de la Turquie et de la Libye ».
Comme d'habitude les pays de l’UE ne sont pas parvenus à prendre des décisions communes significatives face à l'Etat colon (Chypre) et ouvertement hostile envers un autre membre de l'UE (Grèce), le tout dans un contexte par ailleurs plus large de chantage... pardon, « pacte migratoire » signé en 2016 et de menaces permanentes de la Turquie d'ouvrir ses frontières aux clandestins. L'Allemagne et son importante communauté turque est frileuse d'autant plus qu'elle est le premier partenaire économique de l'Etat-colon truc.
La France a tout de même anoncé le 13 août 2020, l’envoi de deux Rafale et deux bâtiments de la marine nationale pour soutenir la Grèce.
Le 24 novembre 2020, la Turquie a annoncé qu'elle se réservait le droit de mener des exercices militaires dans de larges pans de la mer Egée, accusant Athènes de violer le statut démilitarisé de certaines îles grecques.
A la demande de la Grèce, le 10 décembre 2020, les 27 pays de l'UE ont discuté des éventuelles sanctions à adopter contre la Turquie. Sans surprise l'Allemagne a pesé pour qu'aucune sanction économique ne soit prise. La seule sanction adoptée a été de mettre sur liste noire (gel des avoirs en UE et interdiction de visa) deux dirrigeants de la Turkish Petroleum Corporation. Dérisoire... ce qui n'a pas manqué de faire jubiler le sultan.
Cette faiblesse illustre une fois de plus l'impossibilité européenne mais tout ceci servait juste de mise en contexte pour lire la vidéo de l'actuel pilote de ligne d'Air Canada et ancien pilote sur Super Etandard et Rafale M dont il est évidemment recommandé de s'abonner à la chaîne. Até traite ici de la signature du contrat de vente de 12 Rafale par la France à la Grèce, de ce que cela pourrait changer en termes de rapports de force entre Grèce et Turquie mais également des conséquences pour notre pays en termes de dotation.
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Pour la Grèce : la limite de son territoire se situe sur les côtes de ses îles les plus à l’est et au sud de la mer Egée, soit à quelques kilomètres seulement des côtes turques, réduisant la ZEE d’Ankara à la portion congrue.
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Pour la Turquie : la ZEE correspondrait à son plateau continental (la prolongation de son territoire terrestre sur le fond marin) et engloberait une bonne partie des îles grecques.
Tags : Aeronautique Grèce Turquie Armes
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