2000 ans d’histoire de la gauche en 10 minutes, par Georges Frêche
En 2007, Georges Frêche participait aux Rencontres de Pétrarque et faisait une courte mais riche intervention sur l’opposition historique entre conservatisme et progressisme. Une vidéo publiée par le site Enquête & Débat.
Après avoir montré que le conservatisme est naturellement associé au temps long et le progressisme au temps court, Frêche porte un regard sur l’état actuel de la gauche française. Suite à la capitulation des années Mitterrand, celle-ci doit choisir entre deux voies :
- rechercher la conquête du pouvoir en priorité et pour cela, se fondre dans le moule de l’histoire et continuer à la traverser comme un fantôme ; ce choix est manifestement opéré aujourd’hui par une Martine Aubry ou un François Hollande, dont le programme peut être caractérisé de centriste ;
- conserver sa fonction tribunicienne historique et porter l’ambition d’écrire l’histoire au lieu de la subir : un Arnaud Montebourg ou un Jean-Luc Mélenchon semblent être les plus proches aujourd’hui de ce chemin-là.
Pour prolonger cette réflexion, nous conclurons par une citation de Gilles Deleuze au sujet de l’événement historique et de sa fonction subversive. Elle est extraite de son entretien avec Antonio Negri en 1990.
« L’histoire n’est pas l’expérimentation, elle est seulement l’ensemble des conditions presque négatives qui rendent possibles l’expérimentation de quelque chose qui échappe à l’histoire. Sans l’histoire, l’expérimentation resterait indéterminée, inconditionnée, mais l’expérimentation n’est pas historique. Dans un grand livre de philosophie, Clio, Péguy expliquait qu’il y a deux manières de considérer l’événement, l’une qui consiste à passer le long de l’événement, à en recueillir l’effectuation dans l’histoire, le conditionnement et le pourrissement dans l’histoire, mais l’autre à remonter l’événement, à s’installer en lui comme dans un devenir, à rajeunir et à vieillir en lui tout à la fois, à passer par toutes ses composantes ou singularités. Le devenir n’est pas de l’histoire ; l’histoire désigne seulement l’ensemble des conditions si récentes soient-elles, dont on se détourne pour “devenir”, c’est-à-dire pour créer quelque chose de nouveau. C’est exactement ce que Nietzsche appelle l’Intempestif. Mai 68 a été la manifestation, l’irruption d’un devenir à l’état pur. Aujourd’hui, la mode est de dénoncer les horreurs de la révolution. Ce n’est même pas nouveau, tout le romantisme anglais est plein d’une réflexion sur Cromwell très analogue à celle sur Staline aujourd’hui. On dit que les révolutions ont un mauvais avenir. Mais on ne cesse de mélanger deux choses, l’avenir des révolutions et le devenir révolutionnaire des gens. Ce ne sont même pas les mêmes gens dans les deux cas. La seule chance des hommes est dans le devenir révolutionnaire, qui peut seul conjurer la honte, ou répondre à l’intolérable. »
Tags : Politique Histoire François Mitterrand PS
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