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Hillary Clinton - USA : la guerre « pour le terrorisme »

Extrait du livre Anarchiste conservateur, d'Anthony Michel (essayiste et auteur de plusieurs ouvrages dont Résigné et révolté et L'Anarque)

 

 

Certes, un fondamentalisme islamique existe, il n’est pas à ignorer. Il existe donc des Occidentaux qui – sans chercher à stigmatiser les Musulmans puisque, pour une très grande majorité d’entre eux, ils vivent en paix et font partie des classes laborieuses – sont sincèrement inquiets de l’islamisation de leurs pays. Car ils relèvent des coutumes musulmanes toujours plus répandues dans la société occidentale, même si relevant de revendications d’une infime minorité d’individus : repli communautaire dans les banlieues, interdiction de manger du porc dans les cantines, généralisation de la commercialisation de la viande hallal, horaires aménagés à la piscine publique pour les femmes musulmanes afin qu’elles ne se retrouvent pas avec des hommes. Si l’islamisation est seulement l’augmentation du nombre de Musulmans en Occident, et sachant que, parmi eux, il existe une catégorie d’islamistes – même très minoritaires –, elle engendre toujours, naturellement, un peu plus d’islamisme.

 

En tout cas, la précédente inquiétude des Occidentaux non musulmans sert les élites atlantistes à diviser le monde en deux, à instrumentaliser la peur, pour mieux régner et justifier une surveillance plus importante de nos faits et gestes en nous faisant croire que nous sommes libres uniquement après avoir consommé des drogues télévisuelles ou purement chimiques. Les mesures libérales sécuritaires qui en découlent cherchent, en réalité, à protéger ces élites plutôt que les peuples appauvris et apeurés. Effectivement, les atlantistes qui, sur le plan économique, ont du mal à gérer l’épuisement des matières premières ainsi que la concurrence sauvage des entreprises chinoises, dénoncent une terreur islamique financée par des dirigeants politiques qatariens et saoudiens, en même temps heureux de bénéficier des pétrodollars ; quand ce ne sont pas les autorités étasuniennes qui s’y collent directement !
Car, d’après un article du journal Le Monde datant du 21 juillet 2014 (la source n’est donc pas conspirationniste), le Federal Bureau of Investigation (F.B.I.) – le principal service étasunien de police judiciaire ainsi qu’un service de renseignement intérieur – « pourrait avoir créé des terroristes » musulmans. En d’autres termes, le F.B.I. aurait « « encouragé, poussé et parfois même payé » des Musulmans américains pour les inciter à commettre des attentats, au cours d’opérations de filature montées de toutes pièces ». Ces personnes – « vulnérables, souffrant de troubles mentaux et intellectuels » – étaient, jusqu’ici, respectueuses de la loi. Dès lors, on leur aurait suggéré « l’idée de commettre un acte terroriste ». Plus exactement, « des informateurs ou policiers infiltrés auraient alors interagi avec elles en élaborant le plan d’attentat, en fournissant les ressources pour le mettre en œuvre, puis en persuadant, voire en faisant pression sur la personne pour qu’elle y participe ».
L’article du Monde, en vérité, relaie les conclusions d’un rapport datant de juillet 2014 et provenant de l’Organisation non gouvernementale Human Rights Watch, « aidée de l’Institut des droits de l’homme de l’école de droit de l’université de Columbia ». Le rapport repose sur « vingt-sept affaires, de l’enquête au procès, en passant par l’inculpation et les conditions de détention » avec entrevue de 215 individus dont les « inculpés ou condamnés eux-mêmes », leurs proches, ainsi que des avocats, des juges et des procureurs.
Dans ce texte, est stipulé que « la moitié des condamnations résultent de coups montés ou guet-apens ». De plus, « dans 30 % des cas, l’agent infiltré a joué un rôle actif dans la tentative d’attentat ».
Dans cette étude, nous retrouvons entre autres les cas suivants :
– les « quatre de Newburgh », « accusés d’avoir planifié des attentats contre des synagogues et une base militaire américaine, alors que le gouvernement avait, selon un juge, « fourni l’idée du crime, les moyens, et dégagé la voie », transformant en « terroristes » des hommes « dont la bouffonnerie était shakespearienne » » ;
– Rezwan Ferdaus, « condamné à dix-sept ans de prison à l’âge de 27 ans pour avoir voulu attaquer le Pentagone et le Congrès avec des mini-drones bourrés d’explosifs. Un agent du F.B.I. avait dit de cet homme « qu’il avait « de toute évidence » des problèmes mentaux ». Le plan avait alors été « entièrement conçu avec le policier infiltré, le F.B.I. ayant notamment financé son voyage et son armement ».

Un article de L’Obs du 21 juillet 2014 nous informe que le ministre étasunien de la Justice Eric Holder a encouragé, le 8 juillet de la même année, à Oslo en Norvège, à généraliser les opérations de filature menées depuis les attentats islamistes du 11 septembre 2001 « afin de mettre au jour d’éventuels complots d’attentats par des Européens radicalisés en Syrie » et ayant rejoint l’organisation armée islamiste appelée l’Etat islamique (E.I.). Holder ajoute que ces opérations, assurées par le F.B.I. pour combattre le crime organisé mais « étendues au terrorisme » après ces attentats, se font « avec une précision et une précaution extraordinaires, pour veiller [...] à ce que les suspects ne soient ni piégés ni privés de leurs droits juridiques ».
Or, selon Andrea Prasow, l’un des auteurs du précédent rapport, si le gouvernement fédéral des Etats-Unis cherche à rassurer son peuple avec ces méthodes qui consisteraient réellement à empêcher et punir le terrorisme sur son territoire, il faut y regarder de plus près pour constater que beaucoup desdits terroristes « n’auraient jamais commis de crime si les forces de l’ordre ne les avaient pas encouragés, poussés, et parfois même payés pour commettre des actes terroristes ».

Le témoignage de Mike German, qui a travaillé comme agent spécial du F.B.I. pendant vingt-cinq ans, appuie les conclusions de l’étude de Human Rights Watch. Cet homme a démissionné après avoir dénoncé, dans son pays, « les dérives de la lutte antiterroriste ». Dans un reportage de l’émission Envoyé spécial diffusé le 12 février 2015 sur la chaîne de télé France 2, il aborde ces informateurs ayant « pour mission d’identifier des cellules antiterroristes avant qu’elles ne passent à l’action ».Certains d’entre eux, « sous pression, [...] auraient été poussés à créer de toutes pièces » ces cellules dans lesquelles ils souffleraient « mot pour mot à leurs contacts les délits pour lesquels ils seront condamnés ».
L’ancien agent ajoute que le F.B.I. est « prêt à fournir des armes, de l’argent ainsi que le plan de l’attaque ». German parle de « fabrication d’affaires » au nom d’une « politique du chiffre ». Il précise que le budget du F.B.I. a beaucoup augmenté ces dernières années – plus précisément depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis –, il « est désormais de 3 milliards de dollars annuels ».
Il semble, selon cet homme, que le F.B.I. tente « d’entretenir la peur dans l’opinion publique et auprès du Congrès [branche législative du gouvernement fédéral étasunien], qui décide de lui donner de l’argent et du pouvoir. » J’ajouterais que la peur instrumentalisée par les élites politiques nord-américaines repose, en l’occurrence, sur une diabolisation du Musulman en général et de tout ce qui nous ramène à l’islam. D’ailleurs, German nous dit que la communauté musulmane, dans laquelle « le F.B.I. mène plusieurs intrusions » – « par le biais de la mosquée ou de l’école », nous précise l’article de L’Obs –, « est suspectée d’office » et non « pas seulement pour fabriquer de faux complots terroristes » mais aussi pour espionner les Musulmans. Par conséquent, nous pouvons facilement partager l’avis de cet ex-agent condamnant les pratiques excessives du F.B.I. qui « à la fois violent la vie privée et les libertés civiques et ne sont pas efficaces contre les vraies menaces ». D’où l’émergence d’un règne de la surenchère sécuritaire anti-libertés. 
Aussi, si nous suivons le novlangue moderne et anti-dialectique — autrement dit, si nous suivons le sens détourné et abrutissant des mots que nous donnent nos « élites » politico-médiatiques —, nous pouvons dire que parfois un djihadiste n’est qu’un tueur en série qui, pendant son délit, juste avant ou juste après, prend la précaution de crier « Allahou Akbar » pour nous faire croire que son acte est raccord avec l’islam même si, en plus :
– son plat préféré est le pied de cochon accompagné d’un bon bourgogne (américanisez la nourriture et la boisson si vous le souhaitez) ;
– il n’a jamais lu une ligne du Coran de sa vie.

Un article de Courrier international datant du 4 décembre 2014 nous parle du célèbre journaliste du New York Times James Risen qui, compte tenu des contrats signés entre des entreprises étasuniennes et le département de la Défense de leur pays, estime que la guerre contre le terrorisme a donné lieu à « l’un des plus gros transferts d’argent public vers le privé » de toute l’histoire des Etats-Unis. Incluant les campagnes d’Afghanistan et d’Irak débutées respectivement en 2001 et 2003, cette guerre a coûté 4 000 milliards de dollars (3 200 milliards d’euros) » aux Etats-Unis ; milliards qui ont fait émerger ceux que Risen appelle « les oligarques du 11 septembre », une « bande de profiteurs » selon Tom Engelhardt. Ce dernier, auteur et codirecteur de la collection de livres anti-impérialistes The American Empire Project, nous rappelle que « les objectifs de la guerre contre le terrorisme lancée par George W. Bush [président des Etats-Unis de 2001 à 2009] étaient d’éradiquer le terrorisme de la planète ». Or, toutes ces années et « ces dollars plus tard », il y a, en réalité, extension de l’islamisme avec estimation de « 15 000 combattants étrangers » ayant rejoint la Syrie pour intégrer l’E.I. En conséquence, selon Engelhardt, il ne faut pas parler de guerre contre le terrorisme mais « pour le terrorisme ».

Pour clôturer cette partie, retournons au siècle dernier. Car le terrorisme islamique n’est pas subitement né en 2001, l’année des attentats historico-tragiques aux Etats-Unis. Des propos de la célèbre ex-secrétaire d’Etat étasunienne Hilary Clinton sont intéressants quant à comprendre que l’Empire nord-américain « nourrit » depuis longtemps le terrorisme islamique même si le contexte de l’époque – guerre d’Afghanistan de 1979-89 – était bien différent. En effet, il ne s’agissait pas, à ce moment-là, de favoriser consciemment et l’islamisme pour jouer hypocritement avec la peur des populations et justifier de nouvelles campagnes impérialistes mais de renforcer les rangs des fondamentalistes musulmans pour en finir avec l’Union soviétique.
Je n’ai malheureusement pas la date précise des propos de Clinton – filmés officiellement, issus d’un discours relayé sur la chaîne de télé C.N.N. ainsi que d’une entrevue pour la chaîne Fox news. Ils semblent être de 2012. 
Dans l’entrevue, la femme politique étasunienne affirme : « Nous avons créé le problème que nous sommes présentement en train de combattre. » Dans le discours, elle est plus explicite : « Souvenons-nous que les gens contre qui nous nous battons aujourd’hui, nous les avons financés vingt ans plus tôt. » Puis elle rappelle le contexte géopolitique de cette période : « Nous étions enfermé dans un conflit avec l’Union soviétique [U.R.S.S.] qui avait envahi l’Afghanistan et nous ne voulions pas qu’elle contrôle l’Asie centrale. » A la fois dans son discours et dans son entrevue, Clinton nous informe alors que – dans le but de vaincre l’U.R.S.S. – Ronald Reagan (président des Etats-Unis à l’époque) en partenariat avec le Congrès a traité avec l’I.S.I. (Inter-Services Intelligence : services secrets pakistanais) et l’armée pakistanaise pour recruter des moudjahidines venant d’Arabie-Saoudite et d’ailleurs, en les équipant de lance-missiles et en les laissant importer leur idéologie wahhabite. (*)
Pour Clinton, c’est une stratégie qui a porté ses fruits : elle a réellement contribué à l’effondrement de l’U.R.S.S. En effet, ce n’était pas un « mauvais investissement pour en terminer avec l’U.R.S.S. » qui a alors retiré ses troupes et a « perdu des milliards de dollars ». Seulement, la femme d’un autre ex-président des Etats-Unis Bill Clinton ajoute : « Soyons prudents avec ce que nous semons parce que nous allons récolter. »
L’ex-secrétaire d’Etat rappelle alors ce qui s’est produit ensuite à l’époque : « Nous avons quitté le Pakistan, nous leur avons dit : « Débrouillez-vous avec les Stingers [missiles sol-air], que nous avons laissé partout dans votre pays, ainsi qu’avec les mines tout au long de la frontière. » Dans le discours, elle ajoute : « Nous avons arrêté les transactions avec l’armée pakistanaise. » Dans l’entrevue, elle dit que les autorités étasuniennes ont laissé en Afghanistan des « fanatiques entraînés, bien équipés et armés », pour répéter que « les gens que nous combattons » aujourd’hui sont ceux qu’autrefois « nous avons supporté dans le combat contre les Soviétiques ».
N’oublions pas enfin que, comme il est écrit dans un article du Point (28 avril 2010), « la victoire en 1992 des moudjahidines contre le régime soutenu par Moscou – l’Armée rouge avait quitté le pays en 1989 après 10 ans d’occupation – a ouvert la voie à une guerre civile d’une grande violence qui a favorisé l’arrivée au pouvoir en 1996 des talibans » c’est-à-dire d’autres fondamentalistes musulmans…

NOTE (*) A cette époque, le Congrès est dirigé par les Démocrates. Ronald Reagan fait, quant à lui, partie des Républicains. D’où une alliance entre les deux principaux partis politiques étasuniens validant une même politique impériale. Bonjour les clivages…
« Moudjahidines » est le mot utilisé par Hilary Clinton. Nous pouvons le définir le plus simplement possible comme guerrier musulman.
Le wahhabisme, enfin, est un courant politico-religieux saoudien né au XVIIIe siècle défendant une orthodoxie islamique ritualiste et rejetant tous les autres courants de l’islam.

 

Tags : Politique Etats-Unis Islam International Terrorisme Islamisme Hillary Clinton




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7 réactions à cet article    


  • 1 vote
    michel-charles 13 juin 2015 10:38

    Article trop long..pour dire que tout est lié..que rien n’est fait au hasard..que tout est calculé et que les peuples sont les dindons de la farce.. !


    • 1 vote
      Anthony Michel Anthony Michel 13 juin 2015 11:39
      Une preuve n’est jamais à court d’arguments. Autrement dit, en ajouter pour appuyer le phénomène reste intéressant même si, bien sûr ensuite, il faut faire attention à la mise en forme.
      J’ai voulu faire ici un article particulièrement informatif, c’est-à-dire sans trop émettre de parti pris — bien que quand même je dise ce que je pense en début d’article — dans la mesure où le lecteur est « assez grand » pour tirer certaines conclusions. Alors, ce n’est pas toujours cette « option » que je choisis.
      Pourquoi avoir choisi celle-ci ici ? Car on peut émettre des doutes sur les intentions de l’Empire nord-américain dans les années 1980. Avait-il prévu le contre-coup terroriste du siècle futur ? Pas sûr. La bonne foi d’Hilary Clinton me laisse penser à deux options : soit les élites impérialistes avaient prévu et Clinton est l’une des seules à avoir été un peu naïve « dans l’affaire » soit c’est un pan particulièrement important de ces élites qui n’avait pas prévu et/ou se sont dits quelque chose du genre « on verra bien ». Au risque d’être vu comme un peu naïf — j’essaie juste d’être raisonnable —, j’avoue douter que certaines choses puissent être géopolitiquement préparées vingt ans en avance. Même si on parle parfois d’hégémonie pour le qualifier, l’Empire nord-américain ne contrôle manifestement pas certains pôles politiques et nationaux de la modernité (Russie, Chine) et ne peut/pouvait donc pas tout prévoir (ce qui n’empêche pas de juger que ce qu’il semble prévoir arrive en général).

      • 2 votes
        Fidol Castré Fidol Castré 13 juin 2015 13:08

        Dans le seconde vidéo (à 1’37) cette harpie ne prononce pas "Afghanistan" mais "Pakistan", attention à la traduction.

        Bref, les empires ont besoin d’ennemis, puis Frankestein s’émancipe se retourne contre le créateur et tente sa chance par lui-même.
         L’Empire dominant est forcément le plus à blâmer, même si certains conquérants comme Alexandre Le Grand, furent pleurer à leur mort par les peuples qu’ils avaient soumis. Sera-ce le cas avec les maîtres de Wall-Street et du Pentagone ? Sur que non...


        • 1 vote
          Scalpa Scalpa 13 juin 2015 16:37

          Bill a ri quand monica fumait le calumet.


          • 3 votes
            Lord Volde Lord Voldemort 14 juin 2015 03:27

            Hi Anthony Michel. Me remets-tu ? Je suis ton jeune et fringant camarade de FB sans l’ail. Un indice : Queimada


            • 1 vote
              Anthony Michel Anthony Michel 14 juin 2015 11:59

              @Lord Voldemort 

              Je pense, en effet, à quelqu’un. Et j’en profite pour dire que le film Queimada (avec Marlon Brando, et une super musique du maître Ennio Morricone) est exceptionnel. Même si le montage laisse un peu à désirer, ce film est une référence scénaristique — et cela colle, dans un sens, au sujet de l’article si l’on reconnaît une paternité de l’Empire britannique (abordé dans le film) vis-à-vis de l’Empire nord-américain — en matière de dénonciation de l’impérialisme, avec son ensemble de techniques de manipulation et d’arrangements économiques et militaires.


            • vote
              Anthony Michel Anthony Michel 21 novembre 2015 02:08

              En complément ; même si le propos du monsieur en question succède aux attentats parisiens de janvier (et non de novembre) 2015 ; mais le « management de la terreur » ne date plus d’hier : https://www.youtube.com/watch?v=jwPw8yEho4g



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