Peste ! Que d’impatience, mon âme de midinette en est
moite d’émotion. Bon, j’ai réfléchi pas mal avant de te
répondre parce qu’un expéditif "les deux !" aurait
été une pirouette, une façon de botter en touche, j’ai bien
compris que tu ne me demandais pas de choisir mais de hiérarchiser.
De définir une priorité plus
exactement.
Exemple : Quellle est la priorité
entre bouffer et baiser ?
Au niveau la survie de l’espèce,
les deux sont indispensables, on ne définira par nécessairement une
priorité, si l’ensemble de l’espèce arrête de baiser ou de
bouffer, l’espèce finira par disparaître.
Par contre au niveau individuel, ne
pas baiser ne compromet pas la survie individuelle, tandis que
bouffer... Se gratter le ventre n’étant pas un bon coupe faim.
Cela étant, j’ai beau y
réfléchir, sérieusement donc, et je ne vois pas en quoi une telle
hiérarchisation s’imposerait et même en quoi, à moins d’être
cynique et de penser "Vive la censure !, comme ça je peux
faire mon beurre dessus !"
Je pense que là tu es sur la bonne
piste. Ton cynisme t’indique la bonne direction.
N’oublie pas que le cynisme a 2500
ans de postérité, Diogène à l’appui, contre 250 pour
l’anarchisme.
Dans un état de liberté absolue
d’expression (hypothétique, parce que je ne pense pas que cela
puisse exister un jour). Il serait bien difficile de faire la
distinction entre l’expression issue d’une quelconque pulsion et
l’expresion issue d’une conviction intellectuelle. (La première
n’étant pas ce que j’appelle de la liberté)
C’est par les petits interdits
sociaux que tu transgresses à radio libertaire, que tu te distingues
de ces dernier, donc plus en avance sur le point numéro soulevé
dans ma question.
ce qui est peut-être, je
n’en sais rien, je ne te fais pas de procès d’intention, en
filigrane dans ta question, elle aurait le moindre sens, les deux
propositions me semblant synergiques et pas du tout contradictoires.
Donc voilà, après réflexion, ma réponse est : "les
deux !".
Personnellement, la priorité est
numéro 1. La seconde n’a finalemenent que peu de valeur sans
première, sans compter qu’elle est peut-être impossible à mettre
en place.
Je vais te raconter quelque chose
qui te permettra je crois de mieux comprendre ladite réponse s’il
en était besoin. Je suis d’une génération (je suis un vieux si
tu préfères) qui a connu le service militaire. Avant de me
retrouver coincé aux "trois jours", pendant plusieurs
années même, j’ai milité (je devrais mettre des guillemets, je
n’ai jamais été très porté sur le militantisme ni l’action
collective mais l’idée y est) pour la suppression du service
militaire en question. Et puis, arrive le moment fatidique où on va
te déclarer apte ou pas (je te passe tous les détails
croustillants, ce n’est pas le propos), je fais ce que je dois
faire à cet instant pour être réformé P4 (à l’époque, j’étais
à Normale Sup’, c’était moyennement crédible de me faire
passer pour un type qui n’avait pas vraiment l’usage de ses
capacités mentales, mais bon, quand on est déterminé, et je
l’étais, extrêmement (c’est rien de le dire), on arrive très
souvent à ses fins) et bref, je sors de la caserne avec mon papier
certifiant que j’étais inapte pour raison psychiatrique au service
de la Nation, même dans un labo militaire. Eh bien ?, tu sais
quoi ? J’ai continué par la suite à "militer" tout
autant, ni plus ni moins pour l’abrogation du service militaire
jusqu’à ce que Chirac le supprime quelques années plus tard.
Alors oui, j’imagine qu’il y a
des gens qui se sont fait réformer à l’époque et qui derrière
ont juste pensé "C’est chacun sa merde !, si les autres
n’ont pas envie de se faire chier comme des cons dans une caserne,
ils n’ont qu’à faire comme moi et sortir un baratin à la cool
au médecin chef, nique leur race !" et à l’inverse
d’autres qui "militaient" pour la suppression du service
militaire mais qui, par timidité, incapacité ou respect de la loi,
n’ont pas fait ce qu’il fallait pour se faire réformer et ont
passé un an dans un joli uniforme kaki.
De mon côté j’ai été libéré
du service grâce au président Chirac. Je n’ai pas cherché à me
faire réformer. J’étais mûr pour les chasseurs alpins, donc apte.
Je suis soulagé de ne pas l’avoir, pour autant je suis contre cette
réforme. Je préfère une armée, à choisir, de conscrits, plutôt
qu’une armée de professionnels.
Pas moi. Je ne pense pas ni pour ça
ni pour le reste "c’est chacun sa merde !" mais
quand je juge une règle commune illégitime, je n’ai aucun
scrupule à ne pas la respecter et tant pis si ça rompt un principe
très cher aux Français qui est l’égalité.
Pourquoi Socrate s’est suicidé ?
Parce qu’il pensait qu’il était plus légitime de respecter la règle
commune, condamnation à mort voulue par l’assemblée athénienne,
que de se poser la question de savoir si cette condamnation était
légitime ou pas.
Je ne sais pas si ma réponse te convaincra mais je ne peux pas
te dire mieux. Oui !, je "milite" pour la liberté
d’expression collective absolue protégée en terme juridique pour
reprendre ta formulation très pertinemment précise et j’espère
de tout mon cœur (sans trop y croire si je dois être parfaitement
honnête, on n’aime pas beaucoup la liberté en France et
particulièrement depuis 20 ou 30 ans, et ce quels que soient les
partis ou la plupart des familles de pensées) qu’elle sera un jour
promulguée et que poursuivre devant un tribunal quelqu’un à cause
de ses idées ou de son imaginaire paraitra à la plupart aussi
aberrant qu’à moi-même, mais en attendant, ce droit que je juge
absolument légitime (m’exprimer sans autre limite que ma
conscience dans un cadre artistique), je me l’octroie sans le
moindre début de remords et ce, comme tu le dis de nouveau, quels
que soient les risques (juridiques ou les menaces physique de tel ou
tels activiste(s) d’un camp ou d’un autre ou…).
Je ne peux pas te dire mieux,
j’espère que ça répond à ta question.
Ça répond à ma question, mais je
ne crois pas que la réponse soit juste logiquement. Je pense que
cela vient de la divergence d’opinion sur l’anarchisme, que je ne
pense pas réalisable politiquement dans une société.
Je te laisserai plus de temps pour répondre. C’est vrai que j’étais bêtement pressé.