Confinement au Bates motel. Rapport de situation. Episode 5.

Ce matin un Bates a tué un pigeon...j’ai un refrain de Chantal Goya dans la tête, c’est dire le délabrement mental qui me guette...

Suspension de l’ennui avec la première bataille face à l’ennemi...un pigeon...un ennemi putatif, à vrai dire, dont j’ai remarqué la présence devant le motel...il faisait mine de picorer des miettes de pain là où il n’y a que des gravillons et de la poussière...mon érudition est somme toute sommaire, mais il en faut davantage pour me gruger et me prendre au dépourvu...

Autre indice grave et concordant : l’ennemi esquivait systématiquement mes gestes barrières...il se dandinait pour éviter les giclées de gel hydroalcoolique que je lui adressais en signe de paix et de cordialité...

Ajoutez-y ces regards sournois, limite hostiles, et ces insupportables ondulations du cou comme s’il était prosterné devant le mur des lamentations...

Jadis le pigeon était voyageur, soldat volant et porteur de correspondances secrètes...pourquoi ne serait-il pas devenu véhicule d’un ennemi invisible et infiniment petit.. ?

Ni une ni deux, j’ai saisi mon courage à une main et le fusil à pompe de l’autre...c’était lui ou moi...en guerrier courageux pétri de bravoure, la conscience guère endolorie par l’acte que j’allais commettre, j’ai visé la cible et pressé la détente...

Mamma ! c’était pas beau à voir...distrayant, mais pas beau...davantage un puzzle qu’un objet propice à la taxidermie, mais peu importe, la guerre ce n’est ni poétique ni utilitaire...je n’ai fait que mon devoir...je n’attends ni médaille ni reconnaissance...juste qu’on sache que je m’emmerde à un point inimaginable...

Je souffre, oh oui je souffre...