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Melody Gardot : "Worrisome Heart"

Les meilleurs musiciens ne font pas toujours le plus de bruit. L’auteur compositeur Melody Gardot a 22 ans mais elle sait déjà à quel point la subtilité et la litote peuvent avoir de la valeur. Grâce à quoi son premier album ‘Worrisome Heart’ paraît à la fois familier et totalement surprenant.

Pour Melody, la musique représente quelque chose qui aide à se détendre, à méditer et à regarder vers l’intérieur. “Je suis plutôt attirée par la musique qui adoucit, souvent dans un genre doux et sans prétention. La musique peut accomplir des miracles au niveau de l’esprit, surtout quand le genre est apaisant.”

C’est une approche qui la distancie de la plupart de ses contemporains qui écouteraient plutôt du rock indé ou du hip-hop. Mais les résultats de ses préférences parlent d’eux-mêmes. Le titre éponyme de l’album est un blues lent et fluide chanté avec une lassitude qui n’est pas de son âge, et où elle est accompagnée d’une contrebasse et des cuivres qui évoquent le calme d’un voyage en descendant le Mississippi. Sur ‘Gone’, une simple guitare et un violon captent l’esprit obsédant de son texte languissant d’amour, tandis qu’un orgue entouré de fumée, des cuivres indolents et une batterie jazz légère prêtent à ‘Quiet Fire’ un érotisme couvert.

La présence lyrique et musicale de Melody Gardot n’est pas de son âge non plus, bien que son introduction à l’univers de la musique ne date que de quelques années : elle n’a que 16 ans quand elle commence à jouer dans des bars pour gagner un peu d’argent. “A l’époque je ne pensais pas finir par faire de la musique,” admet-elle. “Je jouais le samedi et le dimanche, à raison de quatre heures par nuit. Mais j’étais atypique : je ne jouais que les choses que j’aimais. Je mélangeais le nouveau et l’ancien... de tout, que ce soit Duke Ellington, The Mamas & The Papas ou Radiohead.”

Un chemin qui semble tout tracé entreprend un virage violent lorsque Gardot reçoit de multiples fractures - bassin, colonne, tête - quand son vélo est heurté par une voiture. Elle en garde encore des séquelles : elle marche à l’aide d’une canne et porte des lunettes teintées contre la lumière. Un jour, lors d’un contrôle médical, son médecin lui suggère d’essayer une thérapie musicale pour l’aider à guérir. Pour être plus spécifique, le médecin lui explique que la musique peut souvent réparer une névropathie du cerveau après un tel traumatisme. Il est loin d’imaginer les conséquences... Avant même de pouvoir marcher de nouveau, Melody commence à composer et enregistre ses chansons sur un magnétophone installé à son chevet.

“J’ai commencé à enregistrer mes chansons pour me souvenir de ce que j’avais fait ; j’avais de gros problèmes de mémoire immédiate,” explique-t-elle. “En fin de journée je ne me souvenais pas de la matinée.”

Les chansons qu’elle écrit pendant sa convalescence voient le jour sur un mini album de six titres intitulé ’Some Lessons : The Bedroom Sessions’. Après écoute, un critique fait cette remarque : “C’est un tour d’alchimie quand la douleur et l’incertitude font naître une musique aussi frappante et audacieuse.”

Une nouvelle version du titre éponyme de ’Some Lessons’ fait une apparition sur ‘Worrisome Heart’ à côté de nouvelles chansons qui témoignent de son évolution rapide en tant que compositrice. Gardot a peut-être ajouté davantage d’instruments et de couleurs par rapport aux textures de son premier EP, mais les arrangements optimisent l’intimité délicieuse de sa voix et de ses textes. Bien qu’elle se défende d’être une fanatique de la musique - pas de grande collection de musiques ésotériques pour elle -, Melody sait parfaitement obtenir de ses propres chansons les résultats qu’elle attend.

“J’avais quelques idées concernant la tournure que je voulais. Quand j’étais dans les studios pour l’enregistrement de ‘Worrisome Heart’, je me souviens d’avoir demandé aux souffleurs, ’Est-ce que vous pouvez faire plus sordide’ ? Ils ont dit, ’Ouais, sordide, ça c’est cool !’ Ce n’était peut-être pas la manière la plus musicale de m’exprimer, mais ils savaient exactement ce que je voulais dire !"

Ce qui lui donne raison, c’est que personne ne sait avec certitude comment définir sa musique. On la compare avec Norah Jones ou Diana Krall, et récemment Herbie Hancock l’a invité à une émission télévisée pour chanter ’Edith And The Kingpin’ de Joni Mitchell. Mais ses performances pourraient également évoquer Peggy Lee ou Tom Waits...

Est-ce du jazz, alors ? Ou est-ce du blues ?

“Je peux comprendre pourquoi certains entendent du blues dans mes chansons,” observe-t-elle. “Même les structures d’accords ont une nature simple ; elles sont pures même dans les endroits les plus sombres. Les gens parlent de jazz, mais si vous réduisez la musique à son essentiel, il ne s’agit que d’une chose : les chansons, et leurs origines. J’ai connu un immense chagrin (d’où le titre ’Worrisome Heart’), et quand on ressent quelque chose d’aussi intense, on ne peut qu’y aller quand la musique le commande. Quand on parle de chanter le blues, c’est ça que ça veut dire. Ce n’est pas un style ou un genre : c’est un feeling.”

Tags : Musique






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