Musiques ineffables d’Albanie et alentours (1)
Les musiques de cette série tourneront autour de l'Albanie et des pays limitrophes tels la Macédoïne, la Serbie voire des régions de Bulgarie/Turquie ou d'ailleurs.
En voici une première :
On y rencontre la clarinette si particulière d'Albanie, avec des glissandos et de nombreux mélismes (gauchissements) des notes également présents dans le chant. Une seconde voix toujours discrète ajoute de l'épaisseur.
La force de ces musiques, qui m'a fait ajouter au titre le qualificatif d'ineffable, ne sera peut-être pas perceptible par tous. Il y a question d'habitude — on n'apprécie pas non plus les détails du jazz du premier coup —, de goût et de couleurs, et aussi je le crois une question d'historique culturel dans le sens où les musiques que je vais présenter n'ont pas connu la corruption de l'industrialisation marchande qu'ont subi ou sur laquelle sont basées la plupart de nos musiques occidentales (et de nombreuses musiques du monde telles qu'elles nous sont rapportées). Il y a aussi une connexion au monde réel vécu par la population qui n'apparait pas forcément par exemple dans le jazz contemporain ou dans la musique savante dite classique.
Deuxième morceau :
Musique et danse forment une séduction gracile. A noter le rythme saccadé du chœur d'hommes.
Certes il y a une marchandisation logique de ces musiques d'Albanie mais celle-ci ne m'apparait pas corrompue pour des raisons assez évidentes (isolement de l'Albanie, approche évènementielle de la musique dans cette culture). Il y a une fraîcheur, une verve, un respect de l'auditeur/danseur (c'est une musique qui se danse et s'écoute) de par la virtuosité jamais forcée, toujours artistique, bref vous l'aurez compris j'adore cette musique (bien que je veuille préciser que je ne cautionne l'exceptionnalité que des musiques que je présente et pas des genres en soi).
Troisième morceau :
Morceau scandant la création d'un hôpital par une étasunienne il y a quelques dizaines d'années. Des jeunes dansent (comme jamais ils ne participeraient à des agapes adultes de nos sociétés décadentes). Chœurs encore une fois intéressants, on distingue au moins 3 voix différentes grâce aussi au mixage exceptionnel caractéristique de ces musiques (ne me demandez pas pourquoi).
Tout ce que je présente n'a probablement jamais été commercialisé ou diffusé en France (avant les serveurs de vidéo naturellement su lesquelles elles ont été puisées). S'il y avait des parallèles à faire je dirais la musique orientale, indienne, éthiopienne (dans la libéralité vis-à-vis du dogme contrapuntique), et balkanique bien sûr mais les tensions entre l'Albanie et d'autres pays pourront vous brouiller avec des connaissances des balkans si vous leur dites apprécier cette musique.
Mais n'oublions pas que l'Albanie avant d'être musulmane est chrétienne, elle est le résultat d'un syncrétisme, ayant subi un long joug ottoman et ayant survécu notamment grâce à leur unité et à leurs montagnes, et j'engage chacun à ne pas amalgamer cette culture musicale avec les actes des ultras au Kosovo par exemple (souvenons-nous que la souveraineté n'est pas le nationalisme quand nous verrons des drapeaux albanais dans leurs clips).
Quatrième morceau :
Dance gracieuse, clarinette gracieuse, chant superbe tout en retenue, on voit que le chanteur prend grand plaisir à exercer son art. Beaucoup de notes sont gauchies comme l'étaient assez probablement celles de nos musiques avant que l'on impose de lire les partitions avec leurs notes souvent plates et sans saveur, une fois que l'on a confondu le territoire et la carte.
Il y a une plénitude dans ces musiques exceptionnelles et j'espère qu'elles vous ouvriront l'esprit à d'autres hypothèses musicales, sachant que je subodorre que notre mentalité occidentale est corrélée aux styles musicaux que l'on écoute, et qu'écouter de telles musiques peut nous permettre de sortir de notre mentalité d'européen pseudo-supérieur quasi-colonialiste (enfin je ne parle pas de la plupart des lecteurs ici, bien plus informés que la plupart).
Cinquième morceau :
L'arrangement du morceau a quelque chose de spécial, à la fois la simple et complexe (la simpléxité est le contraire de la complexité, dans la même mesure que la simplicité vis-à-vis de la complexité). Toujours des notes vivantes, jamais plates, une plénitude remarquable du chant avec un soutien de chœur discret. Le chanteur appartient apparemment à la minorité Bektâchî (musulmane hétérodoxe, soufie en fait), voir ici et ici pour des infos sur le mouvement Bektashi. « Selon l'UNESCO, l'islam alevi bektachi, avec les apports de Haci Bektas Veli, fait preuve d'une modernité précoce : avec les mots du XIIIe siècle, Haci Bektas Veli véhicule des idées qui 8 siècles plus tard coïncident avec la Déclaration universelle des droits de l'homme (1948). »
Voilà. Si ça plait à quelques-uns je continuerai avec des morceaux de musique encore plus étonnants et beaux. Joyeux été à tout le monde malgré la folie dans laquelle sont plongés nombre de nos contemporains victimes d'ingéniérie sociale. Réécouter des musiques vraies pourrait nous reconnecter avec nos racines puisqu'il est évident que ces musiques de tradition ancienne et sans rupture brutale sont plus proches de la musique de nos ancêtres (occidentaux) que le brouet rassis que nous sert le chaud business à longueur d'années commerciales.
Tags : Musique Culture
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