@ elfableo
Un bout de texte pour développer :
Tentative d’explication.
Petites étincelles éphémères dans l’immuabilité des choses,
les hommes ont toujours tenté de comprendre le mystère de la création.
Comprendre, étymologiquement voulant exprimer : « prendre
avec », on peut mesurer l’incroyable gageure d’une telle prétention. Le
mammifère primate omnivore au temps imparti n’a aucun pouvoir de création
primaire ; il ne sort rien de rien. Tout ce qu’il découvre est dans le
préétabli ; il a les outils pour une utilisation à son avantage de la
nature et la transformer dans le même sens. Tout ce qu’il découvre est don et
ce don, il se l’accapare ; il va jusqu’à breveter la génétique, la vie.
Cependant, tous les hommes ne sont pas ingrats car certains savent
s’émerveiller de ce qu’ils découvrent et dire merci. Tous ne sont pas comme ces
enfants mal élevés qui vous arrachent des mains un cadeau que vous leur offrez.
Le singe nu a en lui au plus profond de ses gènes, le plus tenace des
tropismes : la cupidité reliée au goût du pouvoir. Ce n’est pas un cochon
qui sommeille en l’homme, c’est bien plus inquiétant, c’est un
tyrannosaure ; les atrocités de l’histoire nous le prouvent mille fois. Le
tyrannosaure, bien enfoui quelque part dans le cerveau archaïque, du côté du
bulbe céphalorachidien, a des raisons impératives que notre raison ignore ou
préfère ignorer. Quand le tropisme d’asservir ses semblables le prend, l’homme
entre dans un processus paranoïaque qui conduit à la tyrannie accompagnée d’un
complexe de persécution. Le pouvoir pour le pouvoir n’est pas la responsabilité
mais se pare volontiers de cette vertu. De lui-même, le tyran séduit ; il
séduit les tyranneaux qui sommeillent en chacun de nous et beaucoup se
reconnaîtront en lui. La « mayonnaise » de la dictature ne peut
prendre que si un certain nombre de séides, tyrans secondaires, peuvent lui
apporter une garde rapprochée. Ces admirateurs inconditionnels sont soumis mais
pas exempts d’avoir la tentation de déboulonner le maître. Celui-ci s’efforcera
de canaliser la violence vers des cibles précises qui pourront être approuvées
par ses admirateurs. La paranoïa du pouvoir peut alors s’étendre à tout un
peuple par un phénomène « maître esclave » en lequel chacun peut
laisser libre cours aux pulsions de son tyrannosaure personnel. Comme le feu ou
comme une pandémie ; le phénomène s’étend. On peut prendre l’Allemagne des
années trente comme exemple de cette tendance mortifère. Les tyrans de tous
poils dont le pouvoir est basé sur la violence, se mesurent,
apportent une réflexivité et une exacerbation de celle-ci. Le peuple n’est rien
dans ces luttes ; il a capitulé d’une capitulation lente et sournoise
motivée par la peur. Pouvoir et peur sont de la même famille, deux facettes du
tyrannosaure, deux aspects de l’instinct de conservation strictement animal. Le
pouvoir absolu est le fantasme d’un être au temps imparti et éphémère, ceci est
un paradoxe. Le tyran passe de l’idolâtrie de sa personne au renversement de
son piédestal un jour ou l’autre dans l’histoire. Le tyran fait feu de tout
bois, fait un outil de toute croyance pour asseoir son pouvoir et en premier
lieu du mythe, de la légende fondatrice d’une civilisation. Si le concept de
dieu lui est associé son pouvoir prendra un caractère sacré, il sera censé être
représentant du mystère ; son pouvoir n’en sera que renforcé. Ainsi se
commettent les pires atrocités au nom d’un dieu subjectif dans tous les
esprits. La relation entre la peur et
l’inconnu n’est pas à démontrer, elle hante toutes les superstitions, toutes
les religions. Au niveau d’une croyance, deux peuples peuvent s’affronter et
basculer dans la guerre mais c’est surtout une conjonction de milliers de
tyrannosaures qui se réveillent, soit par le goût de la violence, soit par la
peur, la soumission au commandement. On voudrait donner une vertu à la guerre quand elle n’est que fatalité de
la nature humaine. On rappelle souvent l’absurdité de la guerre mais elle n’est
pas absurde puisqu’elle a une raison à partir des hommes et que ce sont
les comportements d’icelui qui sont absurdes du fait qu’ils sont méconnus des
intéressés eux-mêmes. A croire que le cortex n’est pas encore suffisamment
développé pour prendre le relais du cerveau reptilien et le conduire à des
actes positifs pour tous. Ce que l’on appelle l’égoïsme est le commencement de
la tyrannie des profondeurs.
A.C