L’orgueil
est le chef tyrannique des principaux vices, c’est-à-dire de ces vices
d’où en découlent une multitude d’autres. Parmi les péchés capitaux,
l’orgueil est le plus capital, ou si l’on veut, le plus fondamental. Les
Pères de l’Église voient dans l’orgueil l’origine de tout péché, la
racine de tout mal, "la mère nourricière et la reine de tous les vices"
(Saint Grégoire le Grand).
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Saint Thomas d’Aquin définit l’orgueil comme une estime exagérée de
soi-même, qui s’accompagne de mépris pour les autres. Dans la mesure où
l’on s’élève au-dessus d’un autre, on tend à l’abaisser, du moins dans
l’opinion qu’on en a. Le mouvement propre à l’orgueil a quelque chose
d’insensé, car il est insatiable dans sa recherche de grandeur : il ne
lui suffit pas de s’élever au-dessus des autres et de les mépriser, il
cherche à s’élever au-dessus de Dieu lui-même, à mépriser Dieu.
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L’orgueilleux,
bien qu’il soit capable de prendre des airs modestes, est convaincu de
sa supériorité dans un domaine ou dans l’autre, et il entend bien que
cette supériorité soit reconnue. Il est porté à se mettre en valeur, à
se vanter, à tirer gloire de son avoir, de son savoir et de son pouvoir.
Il recherche l’approbation, les félicitations, les honneurs. Il a
aussi, dans sa pensée, toujours ou presque toujours raison ; voilà
pourquoi il n’accepte pas facilement une remarque qu’il prendra comme un
manque d’égard ou une incompréhension. Il est habituellement si sûr de
lui-même qu’il ne lui vient pas à l’idée qu’il puisse en telle ou
telle circonstance se tromper gravement. Il s’obstine dans ses idées
et son vouloir, dût-il avoir comme adversaires de ses positions des
personnes beaucoup plus compétentes et beaucoup plus sages que lui. Il
lui est extrêmement difficile de s’incliner devant l’autorité et la
vertu des autres, de louer leurs bonnes actions. Il n’aime pas la bonne
réputation des autres, cherchant et trouvant toujours quelques motifs
pour les critiquer. Dans les relations avec les autres, il impose ses
idées, ses façons de faire comme étant les meilleures et devant être
adoptées ; il contrôle tout. Et ce contrôle est néfaste, parce qu’il
empêche les autres de prendre leurs responsabilités et de s’épanouir,
que ce soit à l’intérieur de la famille ou des milieux de travail. Les
enfants, certes, doivent apprendre à obéir, et donc à être humbles. Mais
les parents doivent former leurs enfants au sens des responsabilités et
ne pas les empêcher de se développer en faisant tout à leur place.
L’orgueil, qui ne sait pas faire confiance à un inférieur, éteint en lui
tout esprit d’initiative ; il agit en ennemi de la liberté et de
l’autonomie d’autrui.