Monsieur le Député,
Aujourd’hui, sur Europe 1 [26 juin 2011], interrogé sur la sortie de
l’euro, vous avez cru bon de déclarer qu’il s’agissait d’une solution
d’essence « maréchaliste ». Ce propos visait Marine Le Pen, avec
laquelle vous avez déjà quelques démêlés judiciaires pour d’autres noms
d’oiseau. Selon vous, refuser d’imposer à l’Allemagne une autre gestion
de la monnaie unique (abandon du principe de monnaie chère,
monétisation des dettes souveraines par la BCE) rappelle le défaitisme,
l’esprit capitulard du Maréchal Pétain.
Permettez-moi d’abord de vous rappeler que cette référence honteuse -
qui ne vous grandit pas - vise non seulement la Présidente du Front
National - qui, pourtant, s’inspire sur ce sujet d’économistes qui ne
sont pas connus pour une proximité idéologique avec elle - mais aussi
mon ami Nicolas Dupont-Aignan, lequel préconise comme vous
l’établissement d’un salaire maximum, et - plus grave, de votre point de
vue - le Mouvement Pour une Éducation Populaire (M’PEP) lequel, si je
ne m’abuse, fait partie du Front de Gauche. Maréchalistes aussi, Jacques
Nikonoff et Aurélien Bernier ? Il faudra bien vous en expliquer avec
eux et avec les électeurs de gauche qui, dans les milieux populaires, ne
croient plus depuis longtemps aux bienfaits de l’union monétaire. Mais
quittons ces arguments que vous pourriez trouver trop politiciens, bien
qu’ils expliquent pourquoi vous n’arrivez pas encore à attirer vers vous
un certain nombre d’électeurs hésitant entre la pêche et la Marine.
Il est totalement mensonger de dire que les partisans de la sortie de
l’euro seraient mués par une quelconque tentation capitularde.
Premièrement, certains d’entre eux - dont je suis - proposent de se
tourner vers l’Allemagne et de lui proposer de transformer la monnaie
unique en monnaie commune, solution qui permettrait aux États-Nations de
retrouver leur souveraineté monétaire tout en conservant l’euro comme
monnaie de réserve internationale. Si nous ne croyons plus à votre
solution, c’est que nous savons que l’Allemagne d’aujourd’hui ne
l’acceptera pas et qu’elle préférerait sortir elle-même de la zone euro
que de la voir appliquée. Peut-être, d’ailleurs, tablez-vous sur cette
issue [1] ?
Simplement, pour nous, le temps presse. Et nous n’allons pas attendre
encore quelques années que nos amis Allemands boutent Angela Merkel de
la chancellerie et la remplacent par une coalition dominée par Die
Linke. Notre économie ne peut faire ce pari risqué. Nous devons agir, et
vite, car les peuples souffrent.
Nous savons aussi, quant à nous, que l’euro n’est pas viable en tant
que monnaie unique car cette monnaie ne correspond pas à une zone
monétaire optimale, lui permettant de résister à des chocs asymétriques.
Trois conditions sont nécessaires pour qu’elle le devienne : un budget
fédéral beaucoup plus important, une convergence macro-économique et une
mobilité des travailleurs. Un Jean-Luc Mélenchon président pourrait
peut-être imposer la première condition, peinerait à permettre la
seconde mais ne pourrait absolument pas satisfaire la troisième. Les
Andalous n’iront jamais travailler dans le froid de Hambourg d’autant
que peu d’entre eux maîtrisent la langue de Goethe. Cette zone monétaire
optimale n’avait jamais existé en Tchécoslovaquie, comme l’explique mon
ami Laurent Pinsolle, nous ne croyons pas qu’il soit possible qu’elle
existe sur quinze pays ou plus. Ou alors dans le long-terme, dans
lequel, comme vous le savez, nous serons tous morts.
Enfin, notre débat n’aura peut-être bientôt plus lieu d’être. La zone
euro implosera peut-être avant que les tréteaux de la campagne
présidentielle ne soient installés. Que direz-vous alors ? Vous ne serez
plus audible. Les Français se tourneront vers ceux qui leur auront tenu
un langage de vérité. Au moins, faites comme Chevènement et
ménagez-vous un plan B. Cela vous évitera, afin de vous différencier à
tout prix de Madame Le Pen, d’insulter jusqu’à vos propres amis du
M’PEP. "