S’il ne s’agissait
que de faire une petite synthèse de l’étiologie et de la symptomatologie de la
croyance paranoïaques aux complots, cette vidéo est plutôt bonne. Très bonne même
je dirai, tout ce qui est exposé est rigoureusement juste.
Mais il y’a
plusieurs problèmes :
-L’ équipe PsyLab,
au début de la vidéo , définit la théorie du complot , précise ensuite que le
but de l’exposé est de modéliser la « pensée complotiste » et non pas
de debunker les théories du complot. Le problème, c’est qu’elle donne des exemples
de théories du complot et donner des exemples sans les debunker est
catastrophique. Non seulement ce mauvais choix focalisera l’attention et les critiques sur
ces exemples très polémiques (vaccinations, dérèglement climatique, grand remplacement,
assassinat de Kennedy, attentats du 11 septembre) mais en plus, l’équipe PsyLab
ne dit pas en quoi ces exemples correspondent à la définition qu’elle a donnée
à la théorie du complot.
-Et en plus,
on peut renverser la critique : pourquoi la théorie officielle du 11
septembre ne serait pas elle-même une théorie du complot ? Après tout elle
réunit presque tous les critères : elle tente d’expliquer un événement de
manière simple en impliquant l’action d’une minorité malfaisante (dans ce cas les
hommes d’Al-Qaïda) travaillant dans l’ombre. Le seul critère qui est
exclut est qu’elle ne constitue pas un récit alternatif à une version
officielle puisqu’elle est LA version officielle. Mais cela amène à plusieurs
questions : qu’est ce qu’une version officielle ? Celle défendue par
des autorités publiques ? Cela signifie donc que les autorités publiques
ne peuvent pas, par définition, défendre
des théories du complot ? Dans le cas ou des autorités publiques de pays
différents défendent des théories alternatives, quelle sera celle qu’on
qualifierait d’officielle ?
-Pour finir , quand je
mate la liste des liens et que je vois conspiracywatch et quand
je constate qu’ils évoquent Pascal Bronner
, des références qu’on pourrait classifier dans « l’anti-complotisme »
, une catégorie qui mériterait elle aussi d’être déconstruite du fait de ses
nombreux biais cognitifs , ça donne une coloration « anticomplotiste »
à l’ensemble qui porte à faire penser
( quand bien même ce ne serait pas vrai ) que les intervenants militent pour l’acceptation
naïve des théories officielles.
Bref, citer ces exemples était une erreur. L’autre erreur, c’est
qu’avant de parler de l’étiologie et de la symptomatologie des paranoïaques des
grands complots, il y’a une question épistémologique qui se pose : par
quelles méthodes peut –on se faire une opinion éclairée d’un événement ? C’est véritablement là le nerf de la guerre, c’est
le préalable à toutes les discussions qui vont suivre et c’est précisément ce
qui relève au grand jour tous les biais cognitifs.
Finalement, cette vidéo, même si elle dit vrai dans le sujet
spécifique qu’elle explore fait plus de mal que de bien car de par ses débordements,
elle prête le flanc aux critiques des paranos qui ne se priveront pas de
relever ses faiblesses et de les faire remarquer aux indécis qui in fine, risquent eux aussi de
basculer dans la paranoïa.