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maQiavel maQiavel 13 octobre 2019 10:41

« Les Kurdes auraient dû dès le départ composer avec Damas »

------> Ça c’est le point de vue d’un défenseur du régime Baasiste en place en Syrie. Changeons un moment de perspective et empruntons celle des Kurdes.

Pour commencer, le PYD n’est pas indépendantiste et ne se considère même pas comme Kurde ( même si dans les faits, les Kurdes en constituent la force dominante). Dans les zones sous son contrôle et qui dépasse largement les zones peuplées de Kurdes, ils ont recrutés diverses ethnies au sein de leurs forces armées ( FDS), dont de nombreux arabes ( toutes les communautés ont leurs propres unités militaires intégrées aux FDS) et ont fait le choix d’associer toutes les communautés au partage des ressources et du pouvoir (elles sont toutes représentées dans des proportions équitables au sein des instances politiques du Rojava). Le projet du PYD n’est pas de constituer un Etat nation Kurde mais de mettre en place un projet politique libertaire communaliste très imprégné d’idées autogestionnaires, localistes, féministes et démocratiques ( dans le sens authentique du terme ).

Ce système politique mit en place dans le Rojava est très loin d’être parfait, il contient de nombreuses difficultés que les acteurs locaux tentent de résoudre, il ne faut pas l’idéaliser, cependant il est fondamentalement opposé aux structures oligarchiques, centralisatrices et autoritaristes du régime en place à Damas. On ne va quand même pas faire le reproche à des gens qui sont épris d’idéaux émancipateurs, authentiquement progressistes et démocratiques de ne pas s’être soumis dès le départ à un régime héréditaire mit en place par un dictateur militaire et dont la politique, depuis l’arrivée de Bachar, est favorable quasi exclusivement à la grande bourgeoisie syrienne. Il est logique que le PYD n’ait aucune sympathie pour ce régime, c’est comme l’eau et l’huile, ces deux systèmes sont incompatibles.

L’objectif stratégique du PYD était la mise en place en Syrie d’une architecture institutionnelle fédérale et décentralisatrice qui puisse permettre la survie du système qu’ils ont mis en place, et cela passe bien évidemment par une constitution qui octroierait une certaine autonomie aux zones qu’il contrôle. Au contraire, l’objectif de Damas est de ramener l’ensemble du territoire syrien dans le giron du régime. Le gouvernement syrien s’oppose donc naturellement à cette demande d’autonomie qu’il perçoit comme un danger et considère que le fédéralisme, dans un pays si divisé sur le plan communautaire et tribal, mènerait à une partition à court terme. Pour atteindre son objectif, le PYD était donc dans l’obligation d’engager un rapport de force avec les dirigeants syriens pour les contraindre à accepter cette autonomie. Pour que le rapport de force lui soit favorable, il fallait des gages territoriaux pour mieux négocier, pour gagner ces territoires il fallait une force militaire et pour avoir des armes il avait besoin des américains. Le PYD est très pragmatique, il savait très bien que les américains allaient l’ abandonner, il s’est servit des américains tout comme les américains se sont servi de lui ( les américains ont utilisé les FDS pour couper l’arc chiite), c’est une alliance tactique. La seule chose que les stratèges du PYD n’avaient pas prévu, c’est que les américains les abandonneraient si tôt, ils pensaient qu’ils ne les lâcheraient pas tant que les iraniens et les miliciens du Hezbollah seraient présents en Syrie, ça c’était une erreur de calcul mais elle était difficilement prévisible.

Voilà la raison pour laquelle les Kurdes ne pouvaient pas composer dès le départ avec Damas.




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