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Joe Chip Joe Chip 13 novembre 2019 13:38

@maQiavel

Il faut distinguer trois choses :

le fait,d’être une victime, qui peut se définir de manière précise
le fait de se ressentir comme victime, qui est déjà plus problématique (on sait très bien que la plus facile des choses est de s’éprouver comme une victime des autres ou du jeu social)
— le fait d’appréhender d’être une victime

Autant le premier état est regrettable et doit être dans la mesure du possible corriger par la société, autant le second peut également se comprendre en tenant compte de certains éléments contextuels ou historiques, autant la crainte de devenir une victime ne peut pas être objectivé sur le plan politique car elle relève d’un mécanisme de projection à caractère paranoïaque. C’est une forme de crainte qui indexe l’avenir sur des éléments purement subjectifs et irrationnels qui peuvent par ailleurs être facilement repris et exploités par les extrémistes de tout bord.
On pourrait même parler de prophéthie auto-réalisatrice, un peu comme un chômeur qui justifierait le fait de ne ne pas chercher de travail parce qu’il craindrait de ne pas pouvoir en trouver, ou d’une personne qui renoncerait à trouver un partenaire par crainte d’être à nouveau rejeté. Même si ces craintes sont intimement fondées, elles ne sont pas objectives, car bien entendu l’avenir n’est pas écrit à l’avance.

A un moment la société ne peut pas accepter que certains discours politiques soient basés ou construits sur des "ressentis" solipsistes, non confrontés à la réalité, et c’est valable pour tout le monde. Un pays où chaque groupe social minoritaire plus ou moins identifié pourrait soupçonner le groupe majoritaire de vouloir se livrer à des pogroms ne peut pas connaître la paix. N’importe quel psy pourra t’expliquer qu’un paranoïaque qui se dit victime des autres finira toujours par voir ses craintes se réaliser dans la mesure où son attitude finira irrémédiablement par susciter l’hostilité des autres, validant ainsi à priori son "ressenti" et justifiant le fait de se défendre contre des attaques imaginaires ou des injures mineures.

On ne peut pas se montrer complaisant et accepter que des musulmans tombent dans la paranoïa en se vivant de manière plus ou moins sincère comme des victimes potentielles.

 
On vit tout de même une période de radicalisation du discours antimusulman qui assimile ces derniers à des envahisseurs, à des colons, à des troupes d’occupation nazies et j’en passe et le tout ponctué d’appel à la lutte et au combat.


On vit une période de tension liée à une situation sociale difficile, que l’on retrouve partiellement dans d’autres pays, à la gestion idéologique de la politique migratoire, à l’antiracisme institutionne et à une série d’attentats islamiques qui ont éprouvé l’opinion. Dans ce contexte, il y a des démagogues qui agitent les peurs collectives et se répondent de tous les côtés.
Je conteste au passage l’utilisation abusive du terme "radicalisation" qui est désormais appliqué à tout et n’importe quoi suite au dévoiement lexical opéré notamment par Oliver Roy, qui postule une "radicalité" pure et politiquement indéterminé qui trouverait de multiples exutoires en fonction du contexte : islamisation, contestation sociale, etc... Les médias accolent ce terme de "radicalisation" à des réalités sociales qui sont souvent en interaction dialectique mais qui ont des ressorts très différents (ex : la pauvreté peut expliquer en partie des parcours sans pour autant les justifier), donnant ainsi l’impression d’une montée généralisée et irrésistible aux extrêmes tout en relativisant les vrais cas de radicalisation (hypothèse par défaut du "déséquilibré").

Pour ma part, j’y vois clairement un discours normatif porté par la bourgeoisie centriste et macronienne. Toute contestation de l’ordre établi ou de la réalité équivaut à radicalisation : le djihadiste, le gilet jaune, le chômeur, l’écolo, l’étudiant précaire se voient ainsi tous renvoyés à des degrés divers de "radicalité". Je renvoie à l’hystérie de certains commentateurs manquant d’épithètes ridicules pour qualifier Greta Thunberg. Au milieu de tout ça, seule peut prévaloir l’interprétation des gens au pouvoir, réputée sage et rationnelle.




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