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maQiavel maQiavel 26 avril 2020 22:53

@micnet

« Est-ce que la sécurité doit primer sur les libertés fondamentales  ? »

------> Excellente question.

« Voilà typiquement un exemple de question dont le choix ne concerne pas une quelconque "expertise" mais fait au contraire appel à un choix d’ordre politique et même philosophique ». 

------> Exactement.

J’avais fait part de mon opinion à ce sujet sur un autre topic et mon opinion est la suivante : en soi, l’extension des pouvoirs de l’exécutif est justifiable face à une menace exceptionnelle. De l’autre côté, il existe chez tout gouvernement une tendance inexorable à la pente glissante vers une centralisation oligarchique et vers une restriction des droits individuels, et c’est pourquoi l’extension de ces pouvoirs peut impacter le fonctionnement de l’Etat de façon pérenne.

Il y’a là une tension évidente entre sécurité et liberté et la dialectique qui permet de résoudre cette contradiction, c’est le paradigme de l’exception qui est un grand classique du républicanisme : un gouvernement doit pouvoir être doté de pouvoirs exceptionnels mais seulement sous certaines conditions :

-La première est que l’extension de ces pouvoirs soit momentanée. Ce gouvernement d’exception doit être limité dans le temps et son mandat prolongé seulement sous certaines conditions à respecter de façon stricte.

-Une autre condition est que le gouvernement d’exception doit être soumis durant son mandat à un pouvoir qui le dépasse et sur lequel il n’a aucune prise ( pour moi, ce ne peut être que le pouvoir constituant tel qu’Etienne Chouard l’entend, pendant l’exercice de son mandat, le gouvernement d’exception doit être sous le contrôle du pouvoir constituant qui doit s’assurer qu’il n’enfreint pas la constitution, avec le droit de le démettre en cas de manquement).

- Il faut être certain que la collectivité fait face à une menace exceptionnelle et imminente qu’aucune mesure de droit commun ne peut résorber. Il ne faut pas que ces pouvoirs exceptionnels soient créés par le gouvernement lui-même ou par une oligarchie en roue libre (c’est ainsi que selon moi , pour s’assurer que le régime d’exception ne sera pas mis en œuvre arbitrairement, seul le pouvoir constituant peut déclarer l’état d’exception et lui seul doit s’assurer que les circonstances l’exigent).

-Après l’exercice de son mandat d’exception, le gouvernement doit rendre des comptes détaillés de son action et ses membres doivent être sanctionnés en cas d’abus avérés.

Sans cela, l’état d’exception est condamné à se maintenir de façon pérenne et à pourrir en tyrannie. J’ai un tempérament très libéral et suis extrêmement attaché aux droits individuels et il me semble que le paradigme de l’exception est un bon compromis entre leur maintien et la sécurité publique. Ainsi, l’enjeu n’est pas d’avoir un Etat fort, mais qu’il sache être fort au bon moment. Et c’est en temps d’exception que doit se manifester le plus visiblement la souveraineté de l’Etat.

Il n’est donc pas question dans ce paradigme de trancher de façon absolue et définitive entre sécurité et liberté : il faut que les libertés soient maintenues , mais on peut accepter leur restriction momentanément pour faire face à une menace exceptionnelle. Montesquieu, qui approuvait les institutions d’exception, expliquait que dans ce cadre les citoyens ne perdraient leur liberté pour un temps que pour la conserver pour toujours.




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