Pas encore
vu les vidéos mais lu l’article.
Finalement,
qu’est-ce une religion ? Et pour aller plus loin : qu’est ce qu’une
idéologie au sens large ? Est-ce une étiquette dont on se réclame, est- ce
un système d’idée et une représentation du monde précise ou est-ce autre
chose ? Si c’est une étiquette, des personnes avec des conceptions très différentes
voire opposées peuvent se réclamer de la même idéologie. Si c’est un système d’idée
spécifique alors n’existe-t-il pas autant d’idéologies que d’individus ? Ces
deux premières hypothèses excluent le monisme idéologique sur lequel va s’appuyer
l’essentialisme. Maintenant, si les idéologies sont autre chose qui justifierait
l’essentialisme, il faut nous expliquer ce qu’elles sont.
Jusqu’à cette
explication, pour ma part, les raisonnements essentialisant les idéologies ne
seront que pures incantations sans le plus léger argument solide et roulant tout
entier sur le désir que ce l’on pense est vrai. Et j’admets sans peine que ces
raisonnements sont excitants intellectuellement, ils s’appuient parfois sur des
systèmes métaphysiques qui ont une forte logique interne. Leur problème c’est qu’ils
ne résistent pas à la confrontation aux faits ( à moins de partir dans des
biais de confirmations d’hypothèses de ouf).
Je pense que
l’essentialisme découle pour une part du fait que le langage ordinaire peut
faire naître des croyances sur la réalité d’entités dont l’existence n’est que
purement langagière : l’expression humaine brouille les frontières entre les
mots et les choses et finit parfois par prêter aux choses des propriétés qui ne
sont que celles du discours. Et au bout de la route, on en arrive à la réification :
les individus ne comptent plus, ils ne sont plus que les marionnettes d’une
entité réifiée qui tire les ficelles pour accomplir un projet et qui agit comme
si elle était elle-même une personne doté d’une vision du monde et d’une
stratégie. Lorsque quelqu’un commence à véritablement croire que l’islam, le
christianisme, le communisme, le capitalisme etc. « souhaite que », « veut
faire en sorte que » etc. , les carottes sont cuites, on pénètre dans une
dimension surnaturelle dans laquelle l’argumentation rationnelle ne vaut plus rien.
Ce qui est
marrant avec ces conceptions essentialistes critiquant les religions, c’est qu’au
départ elles consistent à critiquer les croyances mais par la magie du langage,
elles se transforment progressivement elles-mêmes en croyances. La différence
étant que les croyants ont tout à fait conscience d’être des croyants, ils l’assument
totalement, les essentialistes, eux, sont en quelque sorte dupes de leur
propres croyances. Le plus drôle, c’est lorsque par exemple des anti-islams
essentialistes débattent à bâtons rompus avec des musulmans pour déterminer ce
qu’est l’islam véritable, c’est exactement le même genre de débats qu’on
retrouve très souvent entre croyants d’une même religion qui en ont une
conception différente.