@Gollum
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Françoise Bonardel n’est pas présente, l’animatrice qui lui ressemble peut-être
de loin s’appelle Isabelle Pacaud (prof de fle, qui habite en Inde...). C’est vrai
que pour quelqu’un qui connaît un minimum le sujet, les intervenants restent
dans les généralités. Ils ne sont pas sinophones, ils sont donc par principe
assez limités...
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Sur Raymond Abellio, je ne connais pas vraiment, donc je ne vais pas faire de commentaires,
mais merci pour la référence.
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Sur le parallèle entre la paire Platon/Aristote et Laozi/Confucius ça me semble
assez mal venu. C’est vrai que c’est logiquement ce qu’on peut déduire a priori
avec la thèse des "deux arbres de la Voie" de Jean Levi. En ce sens,
on peut effectivement voir, même si cela ressort de la légende, Confucius comme
un disciple raté de Laozi (on trouve dans le Zhuangzi quelques anecdotes
croustillantes à ce sujet). On pourrait en dire de même d’Aristote vis-à-vis du
maître Platon, mais ça s’arrête là. Déjà et c’est rédhibitoire, entre Platon et
Laozi, on ne parle pas vraiment de la même chose. L’un est un citoyen de la
cité qui propose des réformes, il s’inscrit dans la lignée de son maître qui a
introduit le subjectivisme comme principe moteur de la philosophie, alors que
l’autre est quelqu’un qui a fait scission avec la société de son temps (il ne
se présente pas même avec son nom social) et qui base la philosophie sur un
mimétisme de la nature. Sur le binôme Laozi/Confucius, il y a pléthore de
points communs, de reprises et de pastiches même, mais c’est là où J. Lévi
s’égare à mon sens, c’est un couple antithétique point barre, il n’y a pas de réel
rapprochement possible dès que l’on aborde le domaine de la praxis même si dans
la réalité, chez les lettrés, les deux ont toujours été étudiés de façon
combinés. Là est tout le paradoxe qui continue à être source de confusion en
Chine même. Et pour cause, le taoïsme "philosophique" s’est construit
contre le confucianisme, il l’intègre donc dans sa pensée (en le rejetant). Si on
veut chercher à établir un tel parallèle interculturel, il faudrait plus voir l’équivalent
Platon/Aristote du côté chinois avec le couple Confucius/Xunzi par exemple.
(Xunzi, voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Xun_Zi
) On retrouve comme chez Aristote précepteur d’Alexandre Le Grand, Xunzi maître
de Li Si notamment, qui va jouer un rôle central dans l’élaboration du premier
Empire.
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D’où une nuance importante qu’il convient
de faire entre la « logique non aristotélicienne où les opposés ne sont
pas si opposés que ça », autrement dit la vision de la dialectique ou
yin-yang dans la pensée confucéenne et celle développée dans le taoïsme. Si ces
deux courants de pensée ont bien quelques origines communes où la dialectique du
yin-yang est prépondérante et donc antérieure (Yi-jing etc.), ce n’est pas la même
qui est développée. Cette conception familière passée dans le langage courant
du « juste milieu » en français (et qui vient d’Aristote) est typiquement
confucéenne, concept appelé en mandarin zhongyong 中庸. Le yin-yang du confucianisme est
mou et dévoyé, simple outil au service de l’élaboration de sa vision éthico-politique
du monde. En ce sens, le « juste milieu » représente la justesse de l’action
ou de l’équilibre permanent à trouver entre deux extrêmes. Ainsi le parti En
marche, par exemple, constitue une illustration probante de la résultante d’une
telle conception. On ménage la chèvre et le chou pour au final viser un dépassement
dialectique, en l’occurence la macronie. Le yin-yang des taoïstes est tout
autre. Ce n’est pas un simple outil rhétorique, au demeurant présent dans tous
les courants de pensée de la Chine antique, la dialectique yin-yang est érigée
en principe structurant supérieur et dont la pénétration des arcanes est du
ressort des mystères. Dans cette conception les opposés ne sont pas « pas
si opposés que ça », ils sont par définition opposés et donc considérés
comme tels, le seul mariage possible envisageable est du ressort du domaine de
l’alchimie (qui a un principe de fonctionnement tout autre que celui du « juste
milieu »).