@yoananda2
Aaaah
ben voilà. Ton propos est mille fois plus pertinent que celui du Conführer qui
tourne autour du pot et dont le mot « race » constitue l’éléphant au
milieu de la pièce. En France, il n’y a pas deux, mais au moins trois
conceptions de la nation :
-
La "nation-race" (ou la "nation-ethnie" si on veut faire
dans le politiquement correct ) qui fait de la filiation biologique (le droit
du sang) le socle de la continuité nationale, qui établit une barrière simple
entre le national et l’étranger, entre eux et nous.
-La
"nation État" fait de l’État et de ceux qui l’incarnent les vecteurs
principaux de la continuité nationale. C’est la France éternelle, celle des
rois et des exécutifs ; pour elle, l’intérêt, la puissance et la raison
d’État importent plus que tout et, partant, l’ordre et l’autorité monarchiques
ou républicaine.
-La
"nation peuple", enfin, met l’esprit de la nation dans la mise en
commun politique de ceux qui la composent. Sa légitimité est moins dans son
histoire que dans la participation de chacun à la décision et dans le libre
déploiement des droits.
La
France a une histoire longue et plurielle, ces conceptions conflictuelles sont
les produits de cette histoire complexe.
On
pourrait considérer que ces conceptions sont des idéaux types. C’est-à-dire qu’on
les retrouve rarement comme des catégories pures, un individu ou des camps politiques
peuvent passer d’une conception à une autre en fonction des circonstances ou
intégrer plusieurs éléments de ces catégories pour tenter de constituer un
amalgame cohérent. Donc ce sont souvent les traits dominants qui rattachent à
ces idéaux-types. Des
courants politiques vont tenter de les matérialiser par leurs luttes politiques. Brandir la sienne comme étant une réalité
absolue et les celles des autres comme des manifestations de déni est d’une
absurdité abyssale, ou alors une tentative de manipulation, un peu comme le théocrate
qui pour se donner un verni de légitimité politique et délégitimer ses opposants fait des références à des
réalités supérieures.
Et
lorsque tu dis « J’ai une conception "allemande" de la nation »,
tu poses très bien les choses, tu n’as pas un discours qui consiste à croire ou
à faire croire que tes propres conceptions subjectives sont le Réel absolu de la réalité vraie et que ceux qui ne la partagent pas sont dans le déni. Et malgré le fait que ta conception soit différente de la mienne, il ne me viendrai pas à l’idée de dire que tu as tort et moi raison, comme si la mienne était moins subjective que la tienne, je constate simplement que nous avons des conceptions très différentes de la cité. Et
à la base, c’est ça la politique : tenter de faire commun avec des gens qui ont
des conceptions très différentes voir divergentes de la cité, ce qui va créer
des conflits, des rapports de force et dont découle la nécessité d’avoir des institutions
pour les réguler.