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Lucy Lucy 29 septembre 2021 14:56

Partie 3

C’est donc en pleine médiatisation hystérique de l’affaire de Carpentras, dans un climat empreint de sérénité et propice à la réflexion que la loi Gayssot est votée, moins de deux mois après la profanation des sépultures juives encore présente dans tous les esprits. Quarante-quatre ans plus tard, la « vérité officielle » sur les événements relatifs aux seuls « crimes contre l’humanité » se réfère donc au compte-rendu de jugement d’un tribunal militaire anglo-saxon de 1946 par une loi, il faut bien le reconnaître, digne des pires régimes totalitaires. Un procès où les vainqueurs ont jugé le vaincu et une époque où l’histoire de la Seconde Guerre mondiale en tant qu’objet d’études et travaux universitaires en était au point zéro. La république française avait supprimé la justice militaire de la Cour de sûreté de l’État (loi du 4 août 1981), mais reconnaissait maintenant l’Histoire militaire. Georges Clemenceau n’avait-il pas dit : « Il suffit d’ajouter « militaire » à un mot pour lui faire perdre sa signification. Ainsi, la justice militaire n’est pas la justice, la musique militaire n’est pas la musique ». Une société évoluée, « démocrate » et libérale pouvait difficilement accepter qu’une telle disposition soumette le débat public aux décisions d’un tribunal militaire, mais la France devenait le premier pays au monde à avoir définitivement statué et fixé un événement historique par une loi spécifique. Une régression intellectuelle et un sérieux coup porté au cartésianisme français. Une « initiative » du député communiste d’autant plus paradoxale que les 60 millions de morts des régimes communistes dans les pays de l’Est, crimes principalement commis par les bolcheviques et les staliniens en URSS, entre les famines et les « goulags » opérationnels dès 1918, ne sont toujours pas reconnus comme crimes contre l’humanité. Les bolcheviques ont assassiné à eux seuls 20 millions de russes, selon Alexandre Soljenitsyne – et d’autres –, les bolcheviques ayant compté parmi leurs cadres plus de la moitié de camarades d’origine juive : Conseil des Commissaires du Peuple (« Sovnarkom »), Comité Central Exécutif, Commission Extraordinaire de Moscou (la Tchéka, police secrète soviétique ancêtre du GPU – Guépéou –, du NKVD et du KGB)…, à commencer par le chef de l’Armée rouge, Leiber Davidovich Bronstein, alias Léon Trotski, aussi connu sous le pseudonyme de « boucher de Kronstadt » (source : Alexandre Soljenitsyne dans « Deux siècles ensemble, 1795-1995, tome 2 : Juifs et Russes avant la révolution », 2002). Alexandre Soljenitsyne, le célèbre dissident soviétique anti-communiste (qualifié de fait d’« antisémite » les mêmes milieux) et prix Nobel de littérature (1970) mondialement connu pour son ouvrage « L’Archipel du Goulag », n’avait bénéficié d’aucune publicité en France pour la sortie des deux tomes de son livre « Deux siècles ensemble », victime de l’autre forme de propagande des médias français (presse écrite, radios, chaînes de télévision) : la conspiration du silence. Un ouvrage documentaire pratiquement passé inaperçu, basé sur les archives accessibles après la perestroïka, mais un sujet hérétique frappé d’interdit par la super structure idéologique aux affaires de la république française. Que dire du massacre de milliers d’officiers Polonais entassés dans les charniers de la forêt de Katyn, des chrétiens dont l’idéologie communiste n’était pas franchement la tasse de thé, attribué par une commission soviétique du Tribunal militaire de Nuremberg à l’Allemagne et cautionné d’office par les juges. Le massacre ne figure pas dans l’article 6c du jugement, mais l’article 6b : crimes de guerre. Mikhaïl Gorbatchev reconnut en avril 1990 la responsabilité exclusive des Soviétiques dans le massacre, perpétré par le NKVD (ancêtre du KGB). Que dire des 70 millions de morts du Parti communiste chinois… L’asymétrie des mémoires était frappante dans cette amnésie de la criminalité communiste. « Devoir de mémoire » dans un cas, devoir de l’oubli dans l’autre. Que dire encore des holocaustes nucléaires sur les populations civiles d’Hiroshima et de Nagasaki… Si les absents avaient toujours tort, les vainqueurs avaient toujours raison. Une loi qui symbolise en revanche la repentance imposée aux Français pour les crimes commis par le gouvernement de Vichy à l’égard des Juifs, répond à un clientélisme certain, illustre la déliquescence du modèle français et consacre le communautarisme. La « Gayssot attitude » se heurta à l’opposition de droite et au Sénat qui contestèrent vivement le projet de loi portant selon eux atteinte à la liberté d’expression (la recherche de la vérité historique faisant partie intégrante de la liberté d’expression). La proposition de loi fut rejetée trois fois par le Sénat, les 11, 29 et 30 juin 1990. Parmi les hommes politiques, les ministres Dominique Perben, Pascal Clément, François Fillon, Gilles de Robien ainsi que Jean-Louis Debré, Pierre Mazeaud et Jacques Chirac. Parmi les anciens ministres de la Justice, Jean Foyer, Jacques Toubon, Alain Peyrefitte et Simone Veil. Il ne s’agissait pas de permettre la tenue de propos racistes ou antisémites en toute impunité, mais de laisser aux chercheurs et historiens le soin d’établir la vérité historique. Avant d’être un délit, la contestation des faits est d’abord une opinion et, en principe, la liberté d’opinion et d’expression est protégée comme liberté fondamentale et garantie par la Déclaration universelle des droits de l’homme, même si cela pouvait paraître scandaleux. Simone Veil, rescapée des camps de la mort, avait très justement tenu ces propos : « On finira par se demander ce que nous avons voulu cacher ! ». Néanmoins, le Conseil constitutionnel ne fut saisi par aucun recours parlementaire après le vote, à la grande surprise de nombreux observateurs. Les représentants du peuple étaient figés de peur par l’affaire de Carpentras.




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