Une dette commune, pour sauver la zone euro ?
« Les marchés disent n’importe quoi » et « les Agences de notation passent leur temps à se planter » : on ne pourra qu’être d’accord avec ce double constat mentionné par Thomas Piketty.
Pour le reste de ses propos, la prudence est de mise...
Il explique d’abord les principes et l’évolution des marchés. Avant l’euro existait le marché des changes qui permettait de spéculer sur les taux de change relatifs entre les monnaies européennes. Ensuite, un autre marché, celui de la dette publique, a vu le jour. Les marchés se sont mis à spéculer sur le taux d’intérêt relatif entre les dettes publiques. Et donc, ces marchés, « qui disent n’importe quoi », font évoluer le coût de la dette des Etats de façon incontrôlable.
« Spéculer sur le taux d’intérêt relatif de l’Italie, du Portugal,... ça ne fournit pas de signal utile pour l’économie réelle, c’est de la spéculation pure. »
Les décisions des gouvernements deviennent impossibles à prendre : comment organiser les finances publiques (combien d’impôts on a besoin, combien de dépenses on a besoin dans les années qui viennent), quand on ne sait pas le taux d’intérêt qu’on va payer ? Soumis à la spéculation, le coût de la dette pour les pays peut représenter des sommes énormes « qui vous mettent en l’air un budget public. »
Jusque-là l’analyse semble convaincante. Mais des questions se posent quant à ce Pouvoir fédéral européen, qui contracterait une dette commune pour contrer la crise de la dette souveraine :
Thomas Piketty ne nous dit pas qui seraient les prêteurs dans le cas d’une dette commune. Ou plutôt, il semble envisager que les marchés (les institutions financières), ceux qui prêtent aujourd’hui à la Grèce, au Portugal, à l’Italie, à des taux iniques, seront les mêmes qui continueront à prospérer sur la rente de l’argent-dette dans le cadre d’une dette commune.
Quid de cette dette commune aux mains de prêteurs privés ?
Que n’évoque-t-il pas une création monétaire avec un taux indolore, sans passer par des créanciers privés ?
En quoi cette dette commune empêcherait les marchés de spéculer sur les taux d’intérêts relatifs entre la zone euro ("fédéralisée") et d’autres pays extra-européens ?
Quel serait le taux d’intérêt de cette dette souveraine européenne ? Ne serait-il pas soumis au bon vouloir des Agences de notation et des marchés, comme c’est le cas actuellement ? Est-ce que cette dette souveraine ne serait pas amenée à grossir perpétuellement comme elle le fait aux Etats-Unis, pays fédéraliste s’il en est ?
Thomas si tu me lis, ton avis est requis. D’avance, merci.
Thomas Piketty, Professeur à l’école d’économie de Paris et Coauteur de Pour une révolution fiscale (Ed. Seuil), est l’invité de Patrick Cohen dans le 7/9 sur France Inter (8h20 - 8 décembre 2011)
Tags : Europe Economie Finances Euro Banques Dette
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