Palawan : l’enfer des prisonniers
Palawan est une île paradisiaque de l’archipel des Philippines. Mais les plages de sable dissimulent depuis plus d’un siècle une autre réalité : l’enfer vert de la colonie pénitentiaire d’Iwahig où la plupart des gardiens sont d’anciens détenus. Au fond d’une épaisse forêt vierge de l’île, 28 000 hectares où de grands criminels purgent leur peine de plusieurs dizaines d’années. Ici tous le savent : s’ils ne respectent pas le règlement, ils seront enfermés dans des cachots humides du quartier de haute-sécurité. Lawrence Ponciano est l’un de ces meurtriers, auteur d’un triple-assassinat – mais lui est « privilégié » : depuis 21 ans, il vit avec sa famille dans un « village ouvert » de l’île, une sorte de prison sans barreaux. « J’ai eu une enfance heureuse et tout à fait normale avec un père très aimant » déclare Cathryn, la fille du prisonnier, âgée de 16 ans. Elle a pourtant passé toute sa vie sur cette île, en détention. 360°-GEO a visité la colonie pénitentiaire de Palawan.
Condamné à perpétuité. Ce verdict a été prononcé il y a 19 ans à l’encontre de Rogelio Teves. Il a tué à coups de machette un membre de sa famille. Un cas de légitime défense, selon lui. Peu après le procès, sa femme l’a quitté pour un autre, emmenant leurs trois enfants. Rogelio purge sa peine à Iwahig, une prison unique en son genre où la plupart des gardiens sont aussi des détenus. La jungle, qui cerne la colonie de toute part, remplace efficacement les barbelés : personne ne pourrait y survivre.
L’île au décor de rêve fait fonction de prison depuis la fin du 19e siècle. Les colons espagnols y envoient les opposants au régime. Mais ce n’est qu’à partir de 1904, sous l’occupation américaine, que les militaires fondent une colonie pénitentaire à Iwahig où ils emprisonnent les indépendantistes philippins. Pour se nourrir, ceux-ci sont contraints de cultiver les terres. A l’époque, les prisonniers portaient encore des chaînes. Aujourd’hui, les détenus de niveau de sécurité minimale vivent quasiment en liberté.
Cependant, même à Iwahig, la vie est loin d’être idyllique. La violence dans ces prisons surpeuplées n’est pas rare et pour survivre, on ne peut compter que sur soi-même. L’État accorde à chaque détenu la modique somme de 45 pesos par mois : à peine assez pour acheter deux paquets de nouilles instantanées. Seuls ceux qui ont un peu d’argent ou un poste important, ont droit à un lit. Ceux qui comme Rogelio, sont tout en bas de l’échelle pénitentiaire, doivent se contenter d’un morceau de carton à même le sol. Mais il semble que pour Rogelio, la roue tourne : il se pourrait qu’il soit prochainement transféré vers le « village ouvert » d’Iwahig suite à sa bonne conduite. Là-bas, au sein d’une nature luxuriante, l’attendent non seulement un lit mais également un emploi, qui pourrait lui rendre ce dont la prison le prive depuis de si longues années : sa dignité.
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