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Commentaire de JL

sur « Baise ton prochain » : quand les pires salauds sont les premiers de cordée du divin marché (Mandeville par Dany-Robert Dufour)


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JL 30 décembre 2019 10:37

Greed is good : « Quand Mandeville dit : « Les vices privés font la vertu publique », que dit-il d’autre que ceci : ce que vous prenez pour du vice c’est en fait de la vertu. Ou encore : si vous le prenez au premier degré, c’est du vice mais si vous le prenez au second, c’est de la vertu. Ce discours brouille tout repère et annule toute pensée démonstrative : il revendique de pouvoir dire tout et son contraire puisqu’il affirme qu’en fin de compte, le blanc est noir et que le faux est vrai – exactement comme le discours pervers ». (Dany-Robert Dufour, « La cité perverse »,334)

 
« La civilisation du ‘tout à l’ego’ : dans le domaine des arts, chacun affirmera son ego ; le domaine scientifique sera caractérisé par le relativisme et par le subjectivisme en sciences humaines, par la réduction systématique des phénomènes symboliques à des données de nature en sciences sociales (cognitivisme et sciences neuronales), et par le pragmatisme en philosophie. Le domaine politique, celui du gouvernement des hommes, ne sera plus défini comme étant le lieu au dessus des intérêts privés, mais comme le lieu investi et même surinvesti par les intérêts privés. Le gouvernement ne sera donc plus une instance qui décide en fonction de l’intérêt général, mais un lieu qui communique en racontant des histoires destinées à faire plaisir à ceux qui les écoutent – ce gouvernement doit avoir comme méthode le storytelling management, cependant que la tête de l’Etat pourra s’employer à donner des leçons de perversion, comme telles décomplexées, destinée à convaincre les derniers névrosés de s’autoriser enfin d’eux-mêmes. (Dany-Robert Dufour, « La cité perverse », 312)

 
Trilatérale : « Lorsque la question de la gouvernabilité des 80% d’humanité surnuméraire par rapport aux besoins prévus de l’économie libérale a été posée, la recommandation retenue fut celle avancée par Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller du président Carter et fondateur de la Trilatérale : le « tittytainment, qui consiste à fournir un « cocktail de divertissement abrutissant et d’alimentation suffisante permettant de maintenir de bonne humeur la population frustrée de la planète. Tittytainment est un mot valise qui renvoie à entertainment et tits, nichons ». (Dany-Robert Dufour, « La cité perverse »)

 
Sade, le premier démocrate libéral : « Ô vous, qui vous mêlez de gouverner les hommes, gardez-vous de lier aucune créature ! Laissez-la faire ses arrangements toute seule, laissez-la se chercher elle-même ce qui lui convient, et vous vous apercevrez bientôt que tout n’en ira que mieux. (Sade, « Juliette », cité par Dany-Robert Dufour, La cité perverse ») « On reconnaît là le fameux « laisser-faire » cher à la philosophie politique libérale » qui sera présenté comme principe essentiel de démocratie libérale. » (DRD) Mais Sade poursuit : « … Non seulement il n’est pas nécessaire d’aimer pour jouir, mais il suffit même de jouir pour ne pas aimer » et DRD ajoute : « C’est ainsi que Sade met fin à l’angélisme de la belle œuvre divine en train de se construire toute seule, comme le laisse croire la fable philosophique qui s’édifie progressivement de Blaise Pascal à Adam Smith. L’œuvre admirable qui est en train de se construire est en fait une entreprise terrifiante. Laisser faire, laisser exulter l’amour-propre, laisser se réaliser le plan secret des la divine Nature, c’est laisser se construire une entreprise démoniaque, aussi pornographique que perverse. C’est-à-dire une société composée de tyrans qui cherchent à imposer leur jouissance et de despotes qui ne cessent de s’affronter et de se mettre en esclavage dès qu’ils le peuvent. Voilà la vérité que Sade assène sur les finalités du plan secret de la nature. » (DRD)

 
Théorie du ruissellement : «  Le pauvre ne doit jamais ni voler, ni tromper le riche (…). La conscience du pauvre lui rappelle dans cette circonstance qu’il ne vaut pas mieux qu’un autre et que, par l’injuste préférence qu’il se donne, il se rend l’objet du mépris et du ressentiment de ses semblables comme aussi des châtiments puisqu’il a violé ces lois sacrées d’où dépendent la tranquillité et la paix de la société. » (Adam Smith, cité par DRD) « Celui qui doit modérer ses appétits et renoncer à l’injuste préférence qu’il se donne, c’est donc le pauvre. Le riche, lui, travaille (hem !), non pas pour s’enrichir lui-même, mais pour enrichir la société  » (DRD) De fait, le libéralisme est fondé sur le sophisme suivant : « ce qui est bon pour le riche est bon pour la société dans son ensemble » d’où découle le non moins choquant « greed is good » (la main invisible faisant ce qu’il faut). Ainsi, on amalgame enrichissement individuel et enrichissement collectif, profit et richesse, investissement et spéculation, et l’on justifie dans un jeu à somme nulle, voire mortifère, le principe de socialisation des pertes, privatisation des profits. (11/3/10)


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