Rentrée littéraire, mort des libraires ?
Au programme : la rentrée littéraire avec sa sortie de livres par centaines, et la mort des libraires indépendants frappés par le virus du tout numérique...
Jean-Marc Roberts (directeur éditorial des Editions Stock) et Jean Birnbaum (rédacteur en chef du Monde des Livres) sont les invités de Benjamin Petrover dans la première vidéo. Le débat démarre d’emblée sur l’inquiétude de Jean-Marc Roberts vis-à-vis des libraires indépendants menacés, selon lui, par la vente en ligne :
"Je vous avoue mon inquiétude. Je ne suis pas d’habitude très pessimiste, je suis plutôt "allez on y va, on positive, etc.", mais là, je crois que la première chose qu’il faut dire, c’est, certains libraires, les libraires indépendants, les petits, les moyens, les grands aussi, sont pour certains en danger de mort. On peut publier autant de bons livres que l’on veut, si les gens ne retournent pas en librairie..."
Dans la seconde vidéo, Eric Naulleau* (éditeur, critique) et Emmanuel Delhomme** (libraire) évoquaient également la rentrée littéraire (celle de l’année 2010). Deux points de vue, parfois discordants, à découvrir... avec une critique de l’aberration qu’est ce "système de cavalerie" orchestré par des maisons d’édition (faisant partie de grands groupes pour la plupart) qui doivent "faire rentrer de l’argent frais"...
De Fred Vargas à Vargas LLosa en passant par Les "Thibault" de Roger Martin du Gard, Les Misérables, Sandra Veronesi et La route de Cormac McCarthy.
* Eric Naulleau, propos recueillis par Grégoire Leménager : ENTRETIEN (30/06/2011). L’ex-chroniqueur de Laurent Ruquier dit tout. Il revient sur son éviction d’« On n’est pas couché », les quatre années qu’il y a passé, les ennemis qu’il s’y est faits et la manière dont on peut (ou pas) parler de littérature à la télévision.
Extrait : "On a trouvé le truc pour le cinéma : on diffuse une bande-annonce et on reçoit les deux acteurs principaux pour parler des grands thèmes du film. J’ai l’impression que ça fonctionne à peu près. Alors que pour la littérature on continue à chercher... Si vous saviez quelle panique saisit l’animateur ou la régie quand on fait mine de lire un extrait de livre sur le plateau ! Comme si cela même était une incongruité, sinon un scandale. Mon copain Thierry Guichard, qui dirige la revue « Le Matricule des Anges » où j’ai longtemps officié, a un jour très justement déclaré que si on ne parlait jamais de poésie à la télévision, c’est qu’il est impossible de « pitcher » un poème..."
Des villes sans librairies ? (II) - Le blog des Livres (La Recherche)
Extraits :
J’ai acheté dans la bonne librairie de Perros-Guirec, mais cela aurait pu être Lannion et sa vénérable librairie qui fête ses quarante ans, le petit opuscule d’Emmanuel Delhomme, Un libraire en colère, publié aux éditions L’Editeur, 94 pages, 11 euros et le portrait de l’auteur en couverture. Le libraire en question fait commerce des livres à Paris, dans le 8e arrondissement, vers le rond-point des Champs-Elysées. Sa librairie s’appelle Livre Sterling. Naguère fréquentée voire florissante, la librairie périclite maintenant alors que le quartier est l’un des plus animés de Paris. (...)
« Tous les livres sont les maillons d’une chaîne sans fin, on attache, on s’attache à un livre, et il fait partie intégrante de votre vie. C’est ce qui vous constitue en partie, vous avez vécu une expérience unique dans la peau d’un autre, vous en gardez éternellement la trace dans votre esprit. Il existe peu de livres qui peuvent fédérer autant de personnes, c’est-à-dire à mon échelle, vendre de deux à cinq mille exemplaires d’un même titre, mais ceux-là ont toujours une forte dose d’humanité, une construction implacable, des personnages à peine déglingués, et surtout une petite musique qui vous bouleverse. Bien difficile de décrire précisément ce qui fera le succès d’un livre, un bouche-à-oreille incroyable (pas forcément remarqué par la critique), un accueil enthousiaste de mes clients, la curiosité d’une nouvelle aventure, tout ce qui permet de m’approprier l’exclusivité ou presque d’un roman. Le vendre pendant des années, l’exposer aux meilleures places du magasin, voir parfois des clients vanter et vendre à leurs amis les livres de ma vie. Des instants inoubliables ? » (pp. 59 et 60). (...)
Une librairie est, pour cela, un lieu de découverte, de promenade, de séduction. Les femmes l’ont bien compris. Elles forment 80 % de la clientèle de Livre Sterling. « Les femmes sont plus courageuses, explique Delhomme ; elles vous tendent l’Eloge de la fessée de Jacques Serguine sans sourciller et sans rien ajouter… La classe. Tous les jours un petit compliment. – Continuez, votre librairie est tellement belle, on voit bien que vous êtes passionné, on se sent tellement bien chez vous… »
Tags : Livres - Littérature Internet Société Culture Témoignage Eric Naulleau
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