"Survivre à l’effondrement économique" en audio( 2 )
Dans la première partie, Piero San Giorgio a analysé l’épuisement des ressources naturelles lié à la surconsommation couplée à l’accroissement exponentielle de la population. Nous avons vu les troubles sociaux que les situations de pénuries provoquent et le risque d’éclosions de dictatures pour les contrôler. Nous avons également abordé la question des troubles géopolitiques avec les guerres que les empires se livreraient pour le contrôle des matières premières encore exploitable.
Cette seconde partie aborde la question de la crise financière ainsi que les réactions du public face à l’effondrement économique.
Voici la quatrième et la cinquième vidéo de son exposé :
Effondrement financier
Cet effondrement, a commencé en réalité depuis plusieurs décennies. La réalité a été cachée depuis plusieurs décennies par la combinaison de la virtualisation, de la croissance fictive par endettement et d’une confusion savamment entretenue entre un moment dans l’Histoire, la croissance de la Chine et de l’Inde comme source de la consommation occidentale, et une réalité structurelle : la chute de l’Occident comme pôle dominant dans le monde. L’ensemble de ces artifices avait fini par fabriquer une sorte d’hologramme, une représentation fictive tridimensionnelle, dans laquelle nous évoluions en affectant de ne pas voir la réalité.
L’économie réelle est en réalité saturée depuis les années soixante dix dans les pays occidentaux. Pour poursuivre dans une répartition avantageuse la plus value en faveur du capital, les grands capitalistes occidentaux ont transféré le tissu industriel occidental vers les pays ou la force de travail est meilleur marché.
Les classes dirigeantes occidentales ont donc décidé de réorienté leurs économies vers la vitalisation et les services ce qui a entretenu l’illusion d’une croissance économique qui n’était dans le réel que fictive. Les peuples et les Etats occidentaux ont pu continuer de consommer notamment grâce à l’endettement, l’abus de la planche à billet avec le risque de surendettement et d’inflation qui lui sont inhérent.
Ce qui se passe depuis 2007, c’est la panne progressive de cet hologramme. L’hologramme est en train de grésiller, de trembloter. Il est encore en état de fonctionnement, mais on devine déjà qu’il va se dissiper. Déjà, des pans s’effondrent. Il faut en toute hâte les réactiver en sacrifiant d’autres pans. C’est la fin.
Depuis 2007, les dirigeants font semblant de diriger un système encore vivant. En réalité, il est mort, ils maintiennent coûte que coûte l’hologramme. Mais on approche du moment où l’hologramme va disparaître, révélant le réel qu’il dissimulait.
Il y’ a pourtant des solutions à cet effondrement, mais les classes dirigeantes occidentales ne suivront pas la voie qui devrait être suivie c’est à dire de refonder une civilisation nouvelle. Elles sont incapables d’accomplir la révolution mentale nécessaire pour une telle refondation.
Le fonctionnement du cerveau global constitué par ces élites est paraphrénique ; la réflexion tourne en circuit fermé dans un système d’auto-cautionnement. Ce cerveau global est incapable de se confronter au réel, il est pris une dynamique holistique qui dépasse les capacités d’action des individus qui composent le collectif.
Les classes dirigeantes occidentales suivront donc une autre voie : les « élites » de cette civilisation défunte vont tenter de sauver leur rêve, en le restreignant en gros à elles seules, et, disons, à une minorité qui leur sera associée – ceux qu’un Jacques Attali appelle les hypernomades.
Le pouvoir politique est entre les mains des plus grands détenteurs de capitaux, les élites financières. Elles vont utiliser les banques centrales les industries et les gouvernements pour piller la terre entière.
Dans ce coup d’Etat, les oligarchies occidentales ont deux obstacles majeurs :
Les oligarchies rivales :
- Un gouvernement lorsqu’il fait fonctionner la planche à billet au-delà des limites du produit national brut s’engage dans un processus économique appelé inflation. Cette méthode met une grande quantité d’argent dans les mains du public, permet de contrebalancer la cupidité du public, crée une fausse confiance en soi du public et, pendant quelques temps, maintient les fauves en cage. Les gouvernements doivent finalement avoir recours à la guerre afin d’équilibrer les comptes parce que la guerre n’est, en dernier ressort, que l’acte de destruction du créditeur.
- Les classes dirigeantes rivales le savent. On voit la constitution d’un bloc constitué de la Russie et de la Chine qui augmentent considérablement leurs dépenses militaires : la Chine est en train de construire une flotte capable de rivaliser avec l’US Navy. Puisque les Chinois mettent la main sur les matières premières partout où ils peuvent, avec leurs réserves de devise, ils veulent aussi pouvoir sécuriser les routes maritimes vers ces matières premières.
- Les conflits récents ( en RDC , en cote d’ ivoire , en Lybie ) actuel ( en Syrie, en Afghanistan , au Pakistan ) et futurs ( en Iran , au Venezuela , peut être Taïwan ) se déroulent dans ce contexte. Les grandes puissances délèguent pour l’ instant ces guerres à des sous traitant mais le risque de passer à un conflit direct dans les années qui suivent n’est pas négligeable.
Les peuples occidentaux :
Les peuples occidentaux ont deux options pour réagir collectivement au coup d’Etat de leurs élites :
- L’option politique : Les peuples occidentaux peuvent ils inverser ce processus par les urnes ? Nous allons voir que c’est peu probable .Les dictatures communistes avaient les partis uniques, et contrôlaient les populations par la peur et la violence. Les « démocraties »libérale (ou les totalitarismes de marché c’est selon) ont inventé un système bien plus efficace, l’alternance unique et contrôlent les populations par la manipulation non violente soit l’industrie du consentement. Des partis de gouvernement allégeant aux classes dirigeantes (les détenteurs du capital globalisé) alternent au pouvoir selon un schéma gauche / droite. Ces partis d’alternance unique sont uniformes dans les principes mais polymorphes dans les nuances pour garantir l’illusion de pluralité et de liberté politique. Par l’utilisation de techniques de fabrication de l’opinion , les peuples occidentaux sont amené à voter majoritairement en faveur de l’un ou l’autre des partis d’alternance unique comme on amène un troupeau de mouton dans un enclos. Edwars Bernays que l’on considère comme le père des relations publique affirme dans son livre propaganda : « La propagande moderne désigne un effort cohérent et de longue haleine pour susciter ou infléchir des événements dans l’objectif d’influencer les rapports du grand public avec une entreprise, une idée ou un groupe (…). La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme social imperceptible forment un gouvernement invisible qui dirige véritablement le pays ».En période de crise, il est connu que ce que l’on appelle « les extrêmes » attirent de plus en plus d’ électeur mais ce phénomène peut aussi être artificiellement favorisé par les classes dirigeantes, pour justifier « le cordon sanitaire démocratique » ou autre « union républicaine » pour pousser les électeurs à continuer à voter pour les partis d’ alternance unique soumis au capital globalisé en vue d’ éviter le désastre des extrémismes . Le changement par les urnes est donc peu probable. Dans les pays occidentaux, la fabrique du consentement est désormais une usine zéro défaut, le Pouvoir connaît le peuple mieux que le peuple ne se connaît lui-même et a implanté dans l’électeur les catégories qui prédétermine sa pensée et c’est tout un travail à faire sur lui pour se libérer de ce conditionnement. L’ingénierie sociale en occident est d’une perversité extraordinaire et est bien, bien plus efficace que celle des dictatures à l’ancienne. Pour parodier la phrase de Winston Churchill, « jamais tant d’hommes n’auront été manipulés par aussi peu ».
- L’option révolutionnaire : Elle est encore moins probable que l’option politique. D’ une part comme on l’a expliqué, les capacités du pouvoir en occident à préempter toute forme de contestation ont atteint une quasi-perfection, notamment via l’industrie du consentement. D’ autre part, les peuples occidentaux sont des peuples vieux. Les peuples tunisiens et égyptiens ont pu se débarrasser de leurs dictateurs en suivant un schéma révolutionnaire très classique, très 1789. Mais ce sont des peuples jeunes, avec beaucoup de jeunes gens qui sont, justement, à l’âge où l’on fait les révolutions et ils étaient confrontés à des dictatures à l’ancienne. En occident, c’est différent, l’ ’âge moyen en France est de 40 ans et dans certains pays européens il est encore plus élevé. Or, si à 20 ans, on fait la révolution dans la rue, à 40 ans, c’est différent. Si par « révolution » on imagine des foules dans la rue et une émeute qui prend d’assaut les parlements, c’est improbable, et quand bien même cela arriverait, il n’en sortirait rien de durable car de toute manière, le Pouvoir n’est plus aux parlements.
Etat de la société occidentale
Qu’est devenue la société occidentale ? La société occidentale contemporaine, malgré ses progrès matériels, intellectuels et sociaux, est devenue rapidement impropre à assurer la santé mentale et tend à saper, dans chaque individu, la sécurité intérieure, le bonheur, la raison, la faculté d’aimer ; elle tend à faire de lui un automate qui paie son échec sur le plan humain par des maladies mentales toujours plus fréquentes et un désespoir qui se dissimule sous une frénésie de travail et de prétendu plaisir consumériste.
L’industrie a attiré un nombre d’hommes toujours plus considérable dans les grandes villes ; mais la vie n’y est guère favorable à la santé mentale, elle ne développe pas non plus cette indépendance consciente de ses responsabilités à l’intérieur de petits groupes autonomes, la vie urbaine est anonyme et pour ainsi dire abstraite.
Les êtres ont des rapports non pas en tant que personnalités totales, mais en tant que personnifications de structures économiques ou, quand ils ne sont pas au travail, d’irresponsables à la recherche de distractions. Soumis à ce genre de vie, l’individu tend à se sentir seul et insignifiant ; son existence cesse d’avoir le moindre sens, la moindre importance.
Les maladies mentales toujours plus fréquentes peuvent trouver leur expression dans les symptômes des névroses, très voyants et des plus pénibles
Ces derniers ne sont pas des ennemis, mais des amis ; là où ils sont, il y a conflit et un conflit indique toujours que les forces de vie qui luttent pour l’harmonisation et le bonheur résistent encore ». Les victimes vraiment sans espoir se trouvent parmi ceux qui semblent les plus normaux. Pour beaucoup d’entre eux, c’est « parce qu’ils sont si bien adaptés à ce mode d’existence, parce que la voix humaine a été réduite au silence si tôt dans leur vie, qu’ils ne se débattent même pas, ni ne souffrent et ne présentent pas de symptômes comme le font les névrosés.
Ces millions d’anormalement normaux vivent sans histoires dans une société dont ils ne s’accommoderaient pas s’ils étaient pleinement humains et s’accrochent encore à « l’illusion de l’individualité », mais en fait, ils ont été dans une large mesure dépersonnalisés.
Leur conformité évolue vers l’uniformité. Uniformité souhaitée par les classes dirigeantes pour des raisons économiques. L’objectif des détenteurs du capital globalisé est l’établissement d’une économie qui soit entièrement prévisible et manipulable ,les personnes doivent entrer dans des catégories de moules et pour cela on les y incite en proposant des standards de société, des modèles de comportement type.
Mais « l’uniformité est incompatible avec la liberté, de même qu’avec la santé mentale... L’homme n’est pas fait pour être un automate et s’il en devient un, le fondement de son équilibre mental est détruit.
La principale arme de cette uniformisation est le média : que devez-vous regarder à la télévision, à quoi devez-vous vous intéresser, pour quels sports devez-vous vous passionner, que devez-vous approuver ou désapprouver, que devez-vous acheter et consommer, etc
Les médias sont la pour proposer des réponses toutes faites à travers leur choix d’information et de divertissement et la publicité sert " d’amplificateur économique " en incitant à acheter selon les standards proposés. Les comportements sociaux sont dictés par des stéréotypes qui s’auto-entretiennent.
Et pour s’assurer que le public n’aura pas l’occasion de se poser de questions sur le fonctionnement du système, on l’occupe, on le maintient dans l’ignorance d’une part, alors que d’autre part on le distrait avec des sujets n’ayant aucune réelle importance, en fournissant un programme d’éducation public de basse qualité, en faisant appel à ses émotions.
On maintient l’amusement du public en dessous d’un niveau primaire et par le travail on le maintient occupé, sans avoir le temps de penser du tout ; C’est ce que Brezinski, conseiller d’Obama a appelé tittytainement, sorte de panem et circenses post moderne.
Le sociétal est en outre utilisé pour détruire les formes collectives capables de s’opposer au pouvoir en secrétant un cerveau global distinct de celui construit par les oligarchies : les peuples sont divisé sur des critères ethniques, religieux, idéologiques, ce qui suscite la haine de tous contre tous.
Le public est devenu un troupeau grandissant de barbare refusant d’améliorer sa mentalité et n’ayant aucune foi dans son prochain.
Que se passera-t- il quand ces peuples hystériques conditionné à l’individualisme ne pourront plus satisfaire leur pulsion consumériste ?
Prochain épisode : les solutions et l’éffondrement.
Tags : Environnement Economie Société
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