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Accueil du site > Actualités > Société > L’esprit de corps : La Bataille d’Halmyros

L’esprit de corps : La Bataille d’Halmyros

Un siècle après la quatrième croisade, le reste des gains croisés sur l'empire byzantin qu'est le duché d'Athènes engage puis tente de se débarrasser d'une bande mercenaire : la compagnie catalane. Cette dernière va de réussite en réussite et, en ne dépassant jamais 10000 hommes, impose sa loi à quiconque s'oppose à eux. L'occasion de parler de l'esprit de corps, élément central permettant la cohésion de l'unité malgré des environnements souvent très hostiles.

La compagnie catalane montre une unité et une solidarité durant et dehors des combats. Si la notion d’esprit de corps est difficile à définir, on peut proposer ceci : c’est un sentiment d’appartenance partagé au sein d’un groupe qui amène chacun des individus le composant à valoriser ce groupe et ses camarades, mais surtout à être assurés que chacun de ses camarades en font de même pour lui. L’esprit de corps n’est pas la simple loyauté qui ne va que dans un sens ou un sentiment de supériorité lié à une appartenance, ce n’est pas non plus un oubli de soi qui s’insère dans une conception dépassant l’individu. C’est surtout un phénomène collectif, il ne suffit pas pour l’individu de préférer le groupe à lui-même, il faut aussi qu’il soit assuré de protection que ce groupe lui donne. Mais il ne faut pas en faire non plus un corporatisme, l’esprit de corps est un phénomène relativement local de camaraderie qui se construit autour des difficultés vécues ensembles. La proximité fait que chaque autre membre est un camarade qu’il faut soutenir et dont le soutien nous est assuré.

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Il manque d’études anthropologiques et sociologiques du phénomène, même du côté des armées qui cherchent pourtant en permanence à faire émerger cet esprit de corps dans chacun de leurs régiments. Il est plus souvent étudié à travers les corps administratifs ou les grandes écoles de commerces ou d’ingénieur. Mais voici quelques pistes :

-l’esprit de corps nait d’expériences communes qui créent de fait une proximité psychologique. On remarque que ces expériences sont plus souvent difficiles que bien heureuses ( on parle par exemple de « faire la guerre ensemble »). 

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-il est possible de le renforcer autour de symboles communs et de construire une forme d’identité pas forcément excluante. La compagnie catalane nous offre de nombreux exemples. Si sa langue catalane et sa religion catholique sont des éléments importants, elle crée petit à petit des ensembles de symboles et d’institutions auxquelles elle s’attache : une bannière, des cris de guerre spécifique, un conseil de guerre de capitaines élus pour prendre des décisions etc. Un certain principe d’égalité semble s’installer au fil de l’histoire au sein de la compagnie catalane, les conditions de vie sont dures pour tout le monde et le mérite est reconnu à travers des élections au moins pour les rangs de capitaines plutôt que la simple appréciation des titres. On remarquera que ces symboles et institutions permettront d’intégrer de nouvelles populations, qui malgré leurs différences culturelles ou régionales, arriveront à obtenir cet esprit de corps.

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-pour ce qui est des effets de l’esprit de corps, on peut dire qu’il crée une discipline sans obéissance, qu’il construit un cadre moral extrêmement important tant pour l’individu que pour le groupe lui-même. Cette discipline acquise par l’expérience commune devient un réflexe permettant d’éviter les tergiversations mortelles durant les temps forts quitte à régler ses comptes plus tard en présence du reste de la compagnie. L’esprit de corps permet à une unité composé d’individus de faire corps en tant qu’unité sans contrainte. Cet effet est particulièrement recherché dans toutes les armées. 

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Pourtant, il ne faut pas en oublier la part sombre. L’esprit de corps peut dériver en esprit de corporation, passant d’une relation collective et inclusive à un sentiment de supériorité exclusif. Se sentir appartenir à un corps peut faire rejeter les individus en dehors de ce corps. Cela peut poser de véritables problèmes pour une armée dotée de plusieurs régiments et les empêche de fonctionner ensemble, on voit dans l’histoire des rivalités entre différents corps d’une armée rendant cette dernière inopérante, on l’observe également dans différentes administrations. La compétition entre les corps peut devenir un véritable enjeu politique. Lorsque cet esprit de corps finit par primer toujours et systématiquement sur tout le reste, y compris sur la communauté englobante, ses membres, et ses intérêts, se crée alors des factions qui sont sources de divisions et très souvent à l’origine de coups d’Etat ou de guerre interstines fragilisant l'ensemble de l'édifice social. 

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Source : Sur le champ

 

Tags : Armée Histoire Guerre




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9 réactions à cet article    


  • vote
    maQiavel maQiavel 3 août 2020 22:48

    @yoananda2

    A mon avis, il n’existe pas de frontières objectives, ce sont des notions idéologiques, ce qui est solidarité pour l’un peut être assistanat pour l’autre et vice versa.

    Cela dit, de ma perspective ( donc subjective), la solidarité est une notion qui découle de politiques publiques alors que l’assistanat est une notion qui découle de la charité privée et de la philanthropie. Concrètement, un riche qui fait volontairement des dons aux pauvres, c’est de l’assistanat. Par contre, un Etat qui a pour politique de prélever des impôts sur ce riche et de le redistribuer aux pauvres, c’est de la solidarité. Je carricature évidemment mais si on veut être plus sérieux, le principe de la solidarité ( qui est incarné en France par la sécurité sociale) est le suivant : tous doivent contribuer au bon fonctionnement de la collectivité selon leurs capacités, et tous ont le droit d’en bénéficier selon leurs besoins, il n’y a pas d’inégalité morale qui est crée. Alors que l’assistanat divise la société entre ceux qui donnent et ceux qui reçoivent, ce qui crée une inégalité morale puisque les seconds sont redevables des premiers

    Sinon Alain Supiot avait écrit un article dans le monde diplo « Ni assurance ni charité, la solidarité ». Dans ce texte, remplace « charité » par « assistanat » et voilà.


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      yoananda2 4 août 2020 09:15

      @maQiavel

      ha wow, j’ai bien fait de demander, je n’aurais jamais pu imaginer une réponse pareille. On a vraiment pas le cerveau cablé pareil !

      Bon ok, mais alors, si quelqu’un finit pour une raison X ou Y de ne plus compter que sur la solidarité pour vivre, même si c’est l’argent de l’état, n’est-ce pas de l’assistanat ?

      (je ne suis pas en train de dire que c’est la majorité hein, loin s’en faut, je veux juste savoir ce que tu penses de ce cas particulier)


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      maQiavel maQiavel 4 août 2020 14:29

      @yoananda2


      Si une personne, en violation de toutes les conventions ( elle n’est pas handicapée, retraité etc ) décide d’elle-même de ne pas travailler et de ne rechercher aucun emploi pour ne vivre que de la solidarité collective, ça s’appelle de la fraude. Cette personne ne vit pas de la charité d’une entité privée, elle vit de la fraude sociale, donc non, ce n’est pas de l’assistanat à mon sens.


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      yoananda2 4 août 2020 20:45

      @maQiavel
      question de sémantique alors.
      Dis moi si je comprends bien :
      assistanat = recevoir l’aide privée, peu importe si c’est permanent ou abusif.
      recevoir la "solidarité" étatique de manière abusive, c’est de la fraude et pas de l’assistanat.

      Bon, donc, si disons tu reçois 500€ par mois pour rien foutre c’est de la fraude si c’est de l’argent de l’état, et de l’assistanat si c’est de l’argent privé.
      C’est bien ça ?


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      maQiavel maQiavel 4 août 2020 21:35

      @yoananda2
      Oui. 


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      yoananda2 5 août 2020 14:39

      @maQiavel
      pourquoi ce choix de perspective ? la plupart des gens estiment que c’est l’attitude de la personne qui détermine si elle est assistée ou non et pas l’origine de la "manne" ...
      qu’est-ce que ça change que l’argent viennent du ciel, de l’état ou d’un privé ?
      c’est le fait qu’il y a une institution et pas de l’arbitraire individuel ?


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      maQiavel maQiavel 5 août 2020 17:15

      @yoananda2

      La plupart des gens ? Qu’est ce qui te fais dire ça ? Déjà il n’y a que certaines franges de la population qui parle d’assistanat et parmi elles, il n’y’a encore que quelques-unes qui utilisent ce mot de façon péjorative ( et même elles ne sont pas d’accord entre elles car comme je l’ai dit, c’est une notion subjective).

      Moi j’ai cette perspective là parce que je trouve qu’elle fait sens : dans assistanat il y’a « assister », il y’a donc l’idée de porter assistance à ceux qui sont dans le besoin, ce qui n’a rien à voir avec la philosophie de la sécurité sociale par exemple, ça se rattache plus à de la charité. Et à mon sens, l’Etat ne fait pas charité contrairement aux organismes privés, l’Etat met en œuvre une politique sociale (dont certains arrivent à tirer bénéfice frauduleusement ). Et je rajouterai qu’en France, la notion de solidarité a une origine juridique et découle donc de de l’organisation collective ( donc de la politique, donc d’institutions, donc de l’Etat pour faire des raccourcis, voir l’article d’Alain Suppiot que j’ai mis plus haut), on ne saurait donc la confondre avec de l’assistanat à mon sens. 

       


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      yoananda2 5 août 2020 18:29

      @maQiavel

      La plupart des gens ? Qu’est ce qui te fais dire ça ?

      Ceux avec qui j’en ai parlé, partout ... personne n’a jamais parlé de "ta" conception, les débats TV, nulle part dans ce que j’ai croisé sur le net non plus, notamment des articles sur "le point" ou "wikilibéral" que j’ai lu comme ça en passant. Il m’a donc semblé que l’affaire était entendue.

      L’article que tu as mis en lien faut être abonné pour le lire.


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      maQiavel maQiavel 5 août 2020 18:53

      @yoananda2

      Ah donc chez les libéraux. Si tu dis « la plupart des libéraux » au lieu de « la plupart des gens », là je serais d’accord avec toi. Mais est-ce que tu as déjà parlé d’assistanat aux communistes par exemple ? Ou aux socialistes ? Aux Keynésiens ? Aux socio-démocrates ? Ou en général aux défenseurs de l’Etat social ? 

      Désolé pour l’article qui n’est pas disponible, je n’avais pas vu. Je ne sais pas comment le mettre en lien.



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