L’attaque de Pearl Harbor
Il y a 73 ans a eu lieu l’attaque de Pearl Harbor, un moment machiavélien historique riche en enseignements, qui place la duperie et la ruse comme des vertus essentielles de la réalité politique : la classe dirigeante américaine avait une connaissance préalable de l’attaque, l’a souhaité et a laissé faire espérant en tirer des bénéfices politiques.
Dans la pratique, la politique est un jeu d’apparences, de feintes et de simulations, un jeu semblable à un théâtre de personnages masqués qu’on peut, s’ils ne s’y prennent pas comme il faut, découvrir. Dans ce théâtre, l’art de la politique consiste à mettre et arracher des masques selon les deux interprétations classiques du machiavélisme (en vérité, les deux choses ne font qu’une et sont inextricablement mêlées).
Arrangez-vous toujours pour embrouiller vos adversaires. S’ils ne savent jamais avec certitude qui vous êtes ou ce que vous voulez, ils sont incapables de concevoir ce que vous risquez de faire le coup d’après. La meilleure façon, parfois, de les déconcerter consiste à accomplir des gestes qui n’ont aucun but, voire même à paraître œuvrer contre vos propres intérêts ». Petyr Baelish dans le Tome 8 de la série de romans « Le Trône de fer ».
Pour mieux appréhender le contexte et les répercussions de l’attaque, voici un épisode d’ « Histoire de comprendre » présentée par Alexandre Adler, traitant de sujets historiques controversés du XXe siècle. Il ne s’agit pas ici de juger Adler, son idéologie et ses prises de positions certainement très critiquable mais de se focaliser sur le thème abordé à savoir l’attaque de Pearl Harbor et à ce titre, son analyse est une très bonne synthèse.
Son a priori occidentaliste apparait dans cette analyse, comme le montre son allusion au « monde sauvé par les américains », positions très douteuse pour un analyste historique censé délivrer un savoir libéré de la passion et de l’idéologie, cependant il serait regrettable de passer à coté du reste pour cela mais s’il n’est pas possible de faire abstraction du personnage … passez votre chemin !
Revenons au sujet, l’attaque de Pearl Harbor et surtout le chemin en amont qui mène à ce dénouement :
Le jeu
Franklin Delano Roosevelt, président américain en exercice souhaitait arrêter l’Allemagne Nazie dont l’influence augmentait en Europe, cependant l’opinion publique américaine était défavorable à l’entrée en guerre, d’ une part à cause des dénonciateurs d’un complot belliciste organisé par Wall street et la city, et de d’ autre part de l’existence d’ admirateurs des régimes fascistes.
L’invasion de l’union soviétique précipite le cours des choses : les spectaculaires désastres subit par l’armée rouge inquiète au plus haut point Roosevelt qui désormais cherche à hâter de jour en jour le moment de l’entrée en guerre des Etats unis. Il décide de ruser et prend des mesures de provocations délibérées et des actes de belligérance pour pousser Hitler à déclarer la guerre.
Pourtant Hitler feint de ne pas voir les provocations américaines et évite autant qu’il le peut une entrée en guerre prématurée des Etats unis. Il faut se rappeler que l’opération Barbarossa était aussi voulue par Hitler sur le plan stratégique comme une attaque préventive sur les Etats unis, car l’effondrement de l’union soviétique devait avoir pour conséquence d’augmenter considérablement l’influence du Japon en Asie, ce qui éliminerait les américains du théâtre Européen.
La zénitude d’Hitler face à ces provocations met en échec la tactique de Roosevelt qui décide alors d’avancer par un autre biais pour entrer en guerre : il se tourne vers le Japon dans le but de se retrouver de proche en proche en guerre contre l’Allemagne.
Le Japon est encore neutre mais fait face à un déficit en matière première pour son industrie et sa population en croissance rapide, il doit les obtenir par le commerce et /ou la conquête militaire. La classe dirigeante Japonaise mène donc une politique d’expansion, occupe déjà la Corée, la Manchourie, mène une guerre à la Chine et prévoit d’élargir sa zone d’influence à de nouvelles contrées mais en les envahissant, elle risquait de se retrouver en guerre directe contre les puissances coloniales occidentales et les Etats unis, dont la première force de frappe est basée à Hawaï à Pearl Harbor.
Le régime Japonais ne souhaite pas se lancer la tête baissée dans un assaut frontal et élabore une stratégie en conséquence : obtenir des Anglo-Saxons, sans combat, l’accès illimité au pétrole de l’Indonésie Néerlandaise sans occupation totale en échange d’une neutralité maintenue du Japon dans la guerre qu’ils livrent contre l’Allemagne. Le Japon mène donc une politique prudente face à l’Allemagne nazie et signe un pacte de non agression avec Moscou.
A ces ouvertures Japonaises, Roosevelt répond par une fin de non recevoir et tente plusieurs percées provocatrices : il décrète un embargo sur le pétrole et les produits ferreux et donne les feux verts à une série d’ actions destinées à provoquer un incident naval majeur permettant l’entrée en guerre des Etats unis , mais la classe dirigeante japonaise ne tombe pas dans le piège.
Cependant, les victoires spectaculaires de la Wehrmacht en union soviétique change la donne : l’état major Japonais fait pression sur l empereur pour qu’il entre en guerre aux cotés de l’axe et participer ainsi au festin des vainqueurs. Une stratégie est élaborée : une attaque en Asie du sud préparée par une frappe préventive contre la base de Pearl Harbor, sitôt l’objectif atteint, défendre les acquis grâce à un cordon défensif de bases aéronavales, pousser la classe dirigeante américaine à négocier et céder les territoires conquis à la suite d’une campagne longue et épuisante sous la pression de l’opinion publique.
Les intentions Japonaise sont décelées par les renseignements américains : alerté, le chef de la flotte du pacifique envoie ses navires les plus précieux en mission de reconnaissance au large, qui par conséquent ne pourront être endommagé par l’attaque.
Roosevelt a donc sacrifié ses cuirassés pour entrainer l’opinion publique américaine.
“La politique est un univers d’intérêts où les idéalistes n’ont pas leur place.”
Ceci dit, s’il n’y a pas d’effet de surprise, les américains ont sous estimé les capacités destructrices de l’aviation japonaise et n’imaginaient pas de se retrouver face à un bilan si désastreux (2403 américains sont morts et 1178 ont été blessés).
Ce désastre permet néanmoins de renverser le courant : les Etats unis entrent en guerre avec le soutien inconditionnel de l’opinion publique, ce qui permettra une accélération formidable de l’effort de guerre et la mobilisation d’une immense armée.
Désespéré par la résistance soviétique, Hitler déclare à son tour la guerre aux Etats unis espérant que les Japonais lui rendront la politesse en dirigeants leurs armées sur la Sibérie … ce qu’ils ne feront pas !
La frappe préventive
Voici un autre point de vue sur cette attaque de la série « guerre mode d’emploi » réalisé par Gordon Stevens, cette fois analysé du point de vue de la stratégie de l’attaque préventive en parallèle avec l’attaque des aérodromes Egyptiens par l’aviation Israélienne pendant la guerre des six jours.
La frappe préventive permet à une force de détruire l’arsenal d’une autre force au point de lui interdire une riposte suffisante, on y a recours lorsque la guerre est jugée inévitable pour prendre l’ennemi par surprise et obtenir une victoire politique et militaire hors de toute proportion avec ce qui aurait pu advenir si l’ ennemi avait pris l’ initiative surtout lorsqu’ il est beaucoup plus puissant, (ce qui est le cas des Japonais conscient de l’écrasant potentiel militaire des Etats unis), il s’agit d’attaquer avant que l’autre ait une chance de dominer.
Réussie, elle peut donner la victoire à l’armée la moins puissante mais raté, elle peut vouer l’attaquant à la défaite totale.
Les conditions essentielles de la stratégie de frappe préventive pour les planificateurs :
-Des buts réalistes : les chefs politiques doivent savoir ce qu’ils désirent accomplir en frappant préventivement et le commandement militaire doit identifier les cibles qui permettront de concrétiser ces intentions générales.
-Les moyens : les commandants doivent choisir la bonne tactique et disposer de l’armement nécessaire.
-Le renseignement : qui doit fournir des informations actualisés sur la ou les cibles.
-La sécurité : l’ennemi ne doit pas découvrir que la frappe préventive se prépare
-L’attaque proprement dites : frapper les premiers, frapper fort, frapper loin.
-La stratégie de sortie : les planificateurs doivent savoir précisément quel parti ils veulent tirer de la frappe préventive et quelle issue ils veulent donner au conflit militairement et politiquement.
Le commandement japonais avait-il réuni ces conditions ? La réponse :
Sources :
Tags : Histoire Culture Guerre
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