La démocratie a-t-elle besoin de limites ?
Voici encore une passionnante émission proposée sur France Culture et qui questionne la notion même de démocratie et de son corollaire : l'égalité !
Si "l'agoravoxien de base" arrive à faire abstraction du fait que c'est Alain Finkielkraut qui anime cette émission, accompagné de la philosophe Cynthia Fleury et de la sociologue Dominique Schnapper, il pourra apprécier l'importance des questions abordées qui tournent toutes autour de la notion même d' égalité en tant que processus évolutif. Cette évolution pouvant aboutir à un égalitarisme excessif dans tous les domaines, qu'il s'agisse des questions sociétales, via les études de genre (point abordé à la 10 è minute), de l'individualisme, du rejet progressif de la Nature (celle-ci empêchant l'homme d'être auto-suffisant) par un constructivisme social prééminent ou encore de l'impuissance du politique au sens large.
Concernant l'égalité, d'emblée, Finkielkraut, citant Montesquieu, pose LA question fondamentale :
"est-ce que le malaise démocratique actuelle vient du fait que l'esprit d'égalité se perd ou bien, tout au contraire, parce que l'esprit d'égalité devient extrême ?"
Car c'est très exactement ces termes qu'il convient de s'interroger ; là où la plupart, notamment sur internet, estiment que nous ne sommes plus en démocratie, d'où le malaise ambiant, d'autres ultra-minoritaires (dont je fais partie) estiment, tout au contraire, que c'est le principe même de la démocratie, via son égalitarisme progressif, qui nous conduit à cet état de fait : individualisme, mondialistation, libre-échangisme, théorie du genre, médiocrité, etc...
Cette émission a un seul tort : son titre qui me semble trop politiquement correct ! La vraie question qu'il aurait fallu en guise de titre, celle qu'aucun intellectuel ni (encore moins) aucun politique n'osera jamais aborder de front est celle-ci : faut-il remettre en cause le principe même de la démocratie ?
Citons par exemple Alexis de Tocqueville qui résume très bien les différences entre démocratie et aristocratie :
"Lorsque les conditions sont inégales et les hommes dissemblables, il y a quelques individus très éclairés, très savants, très puissants par leur intelligence, et une multitude très ignorante et fort bornée. Les gens qui vivent dans les temps d’aristocratie sont donc naturellement portés à prendre pour guide de leurs opinions la raison supérieure d’un homme ou d’une classe, tandis qu’ils sont peu disposés à reconnaître l’infaillibilité de la masse. Le contraire arrive dans les siècles d’égalité. A mesure que les citoyens deviennent plus égaux et plus semblables, le penchant de chacun à croire aveuglément un certain homme ou une certaine classe diminue. La disposition à en croire la masse augmente, et c’est de plus en plus l’opinion qui mène le monde...Je vois clairement dans l’égalité deux tendances : l’une qui porte l’esprit de chaque homme vers des pensées nouvelles, et l’autre qui le réduirait volontiers à ne plus penser. Et j’aperçois comment, sous l’empire de certaines lois, la démocratie éteindrait la liberté intellectuelle que l’état social démocratique favorise, de telle sorte qu’après avoir brisé toutes les entraves que lui imposaient jadis des classes ou des hommes, l’esprit humain s’enchaînerait étroitement aux volontés générales du grand nombre".
A. de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (livre II, ch 2)
Certaines bonnes âmes estimeront sans doute que Tocqueville est un être exécrable et ne doit surtout pas être donné en exemple. Alors citons un autre illustre personnage, inattaquable du point de vue des penseurs de gauche, à savoir le "père du Contrat Social" en personne : Jean-Jacques Rousseau :
"Les premières sociétés se gouvernèrent aristocratiquement. Les chefs de famille délibéraient entre eux des affaires publiques ; les jeunes gens cédaient sans peine à l’autorité de l’expérience. De là, les noms de Prêtres, d’anciens, de Sénat, de Gérontes. les sauvages de l’Amérique septentrionale se gouvernent encore ainsi de nos jours et sont très bien gouvernés...
Tags : Démocratie Alain Finkielkraut
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