Pas de printemps pour Marine
Elle est "nulle" disent ses détracteurs les plus sévères, y compris au sein du RN. Ce n'est certes pas une tare rédhibitoire pour accéder à la "fonction suprême" (voir les derniers locataires de l'Elysée) mais si les plus hautes ambitions peuvent s'accommoder de certaines défaillances, comme l'incompétence ou la conquête du pouvoir menée en dilettante, les choses se compliquent très sérieusement quand une candidate monte au front présidentiel avec une stratégie qui confine à l'absurde.
Marine Le Pen, finaliste largement battue en 2017, rêve peut-être encore d'un printemps 2022 triomphal mais dans la réalité rien ne permet d'assurer qu'elle passera l'hiver...comment en est-elle arrivée là.. ?
Autopsie d'une bérézina annoncée :
Tout commence en 2011 lorsque papa Jean-Marie lui confie les clefs du camion FN au terme d'une élection interne aux aspects quelque peu nébuleux. L'heure est à la "dédiabolisation", à la liquidation du sulfureux héritage laissé par le Menhir. Conseillée notament par l'avocat Gilles-William Goldnadel, Marine ferme le livre d'un FN (qui deviendra RN) marqué par les sorties tonitruantes de JMLP ou la présence de militants, notamment quelques cofondateurs, aux CV suspects pour ouvrir l'ère nouvelle d'un parti respectable, lisse, progressiste sur les bords, capable de briser le fameux "plafond de verre" pour s'ouvrir la voie vers un destin présidentiel...
MLP va tuer le père (2015) Président d'honneur, et recentrer la doctrine du mouvement. Même le thème historique de l'immigration est abordé avec davantage de tempérance, la théorie du grand remplacement est réfutée par la Cheffe du RN qui s'engage résolument sur des sujets marqués à "gauche" (selon l'ancien clivage gauche-droite) comme les inégalités sociales, les ravages de l'ultra libéralisme. Elle va arrondir les angles jusqu'à adopter des positions peu "conservatrices" sur des polémiques sociétales.
En interne la "dédiabolisation" va bon train : le RNJ (Rassemblement National Juif) voit le jour en 2019. Animé par Jean-Richard Sulzer et rebaptisé "Cercle National Juif France-Israël" à la demande de Marine, cette branche communautaire du RN traque les traces d'antisémitisme en son sein.
MLP prononce des discours virulents contre l'antisémitisme, commémore la tragédie de la shoah. Après avoir été qualifiée "d'irréprochable" et adoubée par le président du Crif, Roger Cukierman, la boucle est bouclée pour Marine qui peut circuler sur le circuit "républicain" au volant d'un camion RN tout beau tout propre, certes à crédit avec des créanciers aux trousses. Elle peut s'imaginer en 2022 prendre sa revanche sur Macron et ensevelir sous les lauriers de la victoire les traces de sa calamiteuse campagne de 2017.
Parenthèse archive : cette courte vidéo montre une MLP jeune en 2001 face à Mélenchon. L'encore "diabolisée" semble être une autre personne que la "dédiabolisée".
Et là, c'est le drame...Marine la "dédiabolisée", Marine la "gauchisée" voit débouler dans son rétroviseur de droite un camion sorti fraichement d'usine avec au volant un certain Zemmour. Ce dernier dévore l'espace laissé vacant par l'héritière de la SARL Le Pen. "Elle ne gagnera jamais" juge t-il. Robert Ménard propose un débat télévisé entre les deux pilotes de "l'extrême droite", ce qui ne manque pas de raviver chez MLP la plaie béante du duel désastreux avec Macron en 2017. JMLP, jamais avare d'une vacherie envers sa fille, clame son "amitié" pour Zemmour. La nièce Marion à ce jour refuse de choisir entre la tante et l'ami. Les sondages frissonnent, les médias aux ordres s'affolent et se bousculent pour ouvrir le micro à ce candidat putatif qui se dit "censuré".
La captation de cet espace idéologique qu'on peut nommer, selon l'ancien clivage toujours, "droite nationaliste" ou "patriotique", est un petit remplacement qui va faire beaucoup de cocus. C'est le copié-collé de la captation réalisée précédemment sur l'espace idéologique opposé. C'est action et réaction.
Qu'elle puisse maintenir sa candidature jusqu'en avril ou qu'elle se retrouve dans l'obligation de jeter l'éponge en rase campagne, Marine sera coiffée d'une majestueuse paire de cornes. Ce n'est que le fruit de ses compromissions, de son insondable naïveté, d'un arrivisme aveuglant. Mais, surtout, c'est anecdotique par rapport à la frustration légitime des français privés d'un débat ouvert à toutes les thématiques qui les concernent et qui n'assiteront qu'à l'habituel cirque électoral entre candidats du "système".
Macron, Hidalgo, Bertrand, MLP, Zemmour, il n'y a que les noms qui changent. Je ne cite là que les principaux favoris de la mascarade "républicaine", il n'est pas exclu qu'une puissante entité médiatico-financière sorte un autre lapin blanc de son chapeau avant l'échéance d'avril 2022.
Qui parlera clairement du saccage des libertés les plus fondamentales, pas seulement depuis la "crise sanitaire".. ? qui mettra sur la table la corruption généralisée de plus en plus manifeste et l'envahissement de la sphère publique par des groupes financiers, des multinationales qui font la loi au détriment du peuple.. ? qui osera présenter un projet de retour à la souveraineté de la Nation vendue à la découpe, bradée, depuis plusieurs décennies, Nation qui s'avilit jusqu'à se laisser infiltrer par des cabinets de "conseil" américains dans ses plus hautes institutions décisionnaires.. ? qui va restaurer l'image d'une Nation soumise, à l'indépendance souillée, aphone, obéissant sans condition à d'autres puissances mondiales.. ?
Enfin, qui aura le courage de mener un combat impitoyable contre les communautarismes, ces factions qui polluent nos existences, quelque soit leur rang, quelque soit le lieu où elles sévissent, quelque soit leur mode d'organisation, quelque soit leur influence.. ? qui aura ce courage, ou est-ce déjà suicidaire de s'attaquer à ce chantier tant les oppositions seront féroces.. ?
Sur ce point précis, il n'est pas inintéressant d'entendre la liberté de parole, anachronique à nos oreilles actuelles, de deux anciens présidents de la "république". "Un président ne devrait pas dire ça" écrivait l'autre...oui mais aujourd'hui un président ne peut plus dire ça.
"Pas de printemps pour Marine". Ni pour la France...l'infortune de la première nommée va mobiliser toutes les attentions, faire de l'audience et les "unes" des journaux, l'autre sera une chose abstraite, insignifiante, glissée sous le tapis, un dépit partagé par des millions de personnes mais traité par le mépris et l'indifférence.
Jusqu'à quand ?
Tags : France Politique Elections Jean-Marie Le Pen Lobby Marine Le Pen Eric Zemmour Corruption Communautarisme Souveraineté Psychiatrie Présidentielle 2022
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