Cinéma réalité.
Arditi joue dans : "Arditi gagne sa vie"
A quoi reconnaît-on que l’on est amoureux ? C’est très
simple. On est amoureux quand on commence à agir contre son intérêt.
C’est de François Truffaut dans : l’amour en fuite.
Ce genre de phrase, c’est du
cinéma, au sens le plus péjoratif du terme. C’est un raccourci qui tronque la
vérité, la minimise, la dévie de son sens. Bref, c’est une bêtise.
Le cinéma voudrait donner en
quelques heures des impressions artificielles censées apporter un peu de rêve
dans une vie qui ne peut se départir d’une certaine monotonie.
La consommation d’histoires
virtuelles, plus ou moins éloignées de la réalité, fait partie de la
consommation dans son ensemble et ces produits fictifs n’ont jamais le label
« bio » s’ils ne nourrissent l’esprit, s’ils ne sont pas édifiants.
On ne saurait dire le côté
toxique du rêve, de la drogue cinématographique, magnifiant des rôles d’acteurs
en des films exacerbant le désir de paraître chez le cinéphile.
Le cinéma n’échappe pas au
racolage médiatique qui manipule plutôt que d’apporter une saine réflexion.
Il suffit de voir le festival de
Cannes pour avoir une notion de ce que peut être la foire aux vanités. Les
acteurs baignent dedans et font rêver les gogos à partir d’un faste quasiment
religieux sur invitation. Les olympiens sont des ectoplasmes habillés par les
grands couturiers.
Le monde du cinéma est enclin à
tous les excès car sur le nuage, on doit bien avoir la frustration d’une
réalité plus concrète, plus proche de la vie.
Comment imaginer le métier
d’acteur sans le justifier d’une manière ou d’une autre, sans l’emploi de
superlatifs, de flagorneries devant les médias, à l’endroit d’autres acteurs,
ceci pour entretenir le mythe ? On ne crache pas dans la soupe !
En dehors des caméras télé et des
journalistes, on ne dit plus : « untel est un acteur
formidable », « un autre est un comédien merveilleux ». On est
de l’autre côté du double jeu, en une réalité où il convient de se faire une
place, d’obtenir des contrats.
Le cinéma est l’art précurseur
d’un monde en représentation où le virtuel et le réel se côtoient, le virtuel
pour anesthésier et le réel pour vendre, spéculer, s’enrichir d’argent.
Certes l’illusion fait vivre mais
il y a peu de Molière dans le monde cinématographique pour interpeller ;
l’affaire est commerciale.
Les politiques et les acteurs se
connaissent, se retrouvent sur les plateaux télé, ils fréquentent les plus
riches et comme tous ces personnages, ils se déconnectent de la base. Avec la
complicité des médias, une imposture est en marche.
Le monde politique est devenu un
jeu, il est devenu du cinéma. On voit même des politiques se livrer à des jeux
télévisés, comme s’ils n’avaient rien d’autre à faire en une période de déprime
profonde, d’inégalités entre les citoyens.
Pendant que des gros pleins de
sous spéculent, ni vus, ni connus, des téléspectateurs frustres ont les yeux
rivés sur leur écran, fascinés par des jeux d’argent ? Ils ne pensent pas
à leur salaire qui s’enfuit aux Bahamas, ils rêvent d’un gain improbable,
aléatoire.
L’obsession de l’argent, de la
propriété privée, a gagné toutes les batailles en notre démocratie et nous
tentons de respirer dans un air de plus en plus délétère.
Le gouvernement est devenu
régalien mais sans Molière, plutôt bonapartiste. La pieuvre du centralisme des
préfectures a repris du service pour une répression régression. Le Nabot Léon
de Victor Hugo est de nouveau au pouvoir.
Mais l’Europe n’est plus à sa
portée, le nouveau Napoléon a misé sur la peur, sur le sécuritaire pour se
faire élire et il pourrait bien se faire dépasser par un parti plus radical en
la matière auquel il avait fauché des voix.
Voilà ce que l’on peut appeler du
cinéma au sens le plus péjoratif du terme, ce cinéma d’une vie en laquelle nous
sommes tous plus ou moins figurants. Le film n’est pas encore un thriller mais
pourrait bien le devenir.
Qui est le metteur en scène de
tout ça ? Qui est le producteur du film ? Un esprit malsain, sans
doute, un marchand de rêve.
Je suis allé voir :
« Alice au pays des merveilles ». Quel beau film mais impossible de
le confondre avec une quelconque réalité : juste deux heures de rêve.
Je suis allé voir :
« Des hommes et des Dieux ». Quel beau film mais impossible de le
confondre avec un rêve. Personne ne parlait à la sortie.
Tiens ! Y aurait-il un
cinéma réaliste et édifiant ?
A.C