Le lynchage de Mouammar Kadhafi
par Thierry Meyssan
Extraits :
La mort de Mouammar el-Kadhafi a été saluée par une explosion de joie
dans les palais gouvernementaux occidentaux à défaut de l’être par le
peuple libyen. Pour Thierry Meyssan, cet assassinat militairement
inutile n’a pas été perpétré par l’Empire uniquement pour l’exemple,
mais aussi pour déstructurer la société tribale libyenne.
Jeudi 20 octobre 2011, vers 13 h 30 GMT, le Conseil national de
transition libyen a annoncé la mort de Mouammar el-Kadhafi. Bien que
confus, les premiers éléments laissent à penser qu’un convoi de voitures
a tenté de quitter Syrte assiégée et a été bloqué et partiellement
détruit par un bombardement de l’OTAN. Des survivants se seraient mis à
l’abri dans des canalisations. M. Kadhafi, blessé, aurait été fait
prisonnier par la brigade Tigre de la tribu des Misrata qui l’aurait
lynché.
Le corps du « Guide » de la Grande Jamahiriya arabe socialiste n’a
pas été conservé dans sa ville natale de Syrte, ni transporté à Tripoli,
mais acheminé comme trophée par les Misrata dans la ville éponyme.
La tribu des Misrata, qui a longtemps hésité à choisir son camp et
est quasi absente du CNT, aura finalement investi Tripoli après son
bombardement par l’OTAN, et aura lynché Mouammar el-Kadhafi après le
bombardement de son convoi par l’OTAN. Elle aura même transféré son
corps dans sa ville pour marquer son triomphe. En juillet, le « Guide »
aura maudit les Misrata, leur enjoignant de partir à Istanbul et
Tel-Aviv, faisant allusion au fait que leur tribu est issue de juifs
turcs convertis à l’islam.
Un flot de commentaires préparés à l’avance a été déversé
instantanément par les médias atlantistes visant à diaboliser Mouammar
el-Kadhafi et, de la sorte, à faire oublier les conditions barbares de
sa mort.
L’actuelle campagne de désinformation comprend aussi un volet sur le
train de vie décrit comme somptueux du défunt et sur le montant
pharaonique de sa fortune cachée. Or, tous ceux qui ont approché
Mouammar el-Kadhafi, ou simplement ceux qui ont visité sa maison
familiale et sa résidence après leur bombardement peuvent attester qu’il
vivait dans un environnement comparable à celui de la bourgeoisie de
son pays, bien loin du bling bling de son ministre du Plan, Mahmoud
Jibril. De même, aucun des États qui traquent la fortune cachée des
Kadhafi depuis des mois n’a été en mesure de la trouver. Toutes les
sommes significatives saisies appartenaient à l’État libyen et non à son
« Guide ».
À l’inverse, les médias atlantistes n’évoquent pas le seul mandat
d’arrêt international émis par Interpol contre Mouammar el-Kadhafi avant
l’offensive de l’OTAN. Il était accusé par la Justice libanaise d’avoir
fait disparaître l’imam Moussa Sadr et de ses accompagnateurs (1978).
Cet oubli s’explique par le fait que l’enlèvement aurait été commandité
par les États-Unis qui voulaient éliminer l’imam chiite avant de laisser
l’ayatollah Rouhollah Khomeiny rentrer en Iran, de peur que Sadr
n’étende au Liban l’influence du révolutionnaire iranien.
Les médias atlantistes n’évoquent pas non plus les critiques que des
organisations de la Résistance anti-impérialiste et nous-mêmes avions
formulées contre Mouammar el-Kadhafi : ses compromis récurrents avec
Israël.
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