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Commentaire de Morpheus

sur Imaginez un monde sans argent....


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Morpheus Morpheus 28 novembre 2012 11:24

1. La monnaie est un instrument artificiel inventé par les humains pour échanger des marchandises et des services. Au moment où la monnaie a été inventée, elle a sans doute répondu à un besoin dans la façon dont les hommes voulaient s’organiser et a sans doute rendu service. Ainsi, la logique de l’échange qui soutient le système monétariste est devenue, au fil du temps, un réflexe acquit : presque personne ne s’interroge sur sa logique, sa pertinence, son bienfondé, ni sur les conséquences que cela entraîne dans nos relations et modes de vie. La rareté et la quête continuelle du profit entraîne la méfiance mutuelle.

2. La monnaie ne constitue pas la vrai richesse : ce sont les ressources qui constituent la véritable richesse. La monnaie, qu’elle soit fiduciaire (matérielle : billets & pièces) ou scripturale (virtuelle : dettes, données informatiques) n’a en elle-même aucune valeur réelle : on ne peut pas se nourrir avec des billets, ni produire de l’énergie, ni fabriquer une maison ou quoi que ce soit (moins encore avec des données informatiques) ; ce n’est pas la monnaie qui produit des richesses, mais les ressources fournies par la planète Terre ainsi que le travail humain. La monnaie n’est qu’un symbole.

« les chasseurs-cueilleurs disposaient de plusieurs milliers de sources de nourriture sauvage pour assurer leur subsistance. L’agriculture changea cela : ils ne purent plus compter que sur quelques douzaines de sources de nourriture. L’agriculture entraîna également le stockage des surplus de ressources et, partant, l’inévitable constitution de stocks inégaux qui lui-même engendra les classes sociales. On peut donc dire que l’agriculture a occasionné l’émergence de la pauvreté. » [Robert Sapolsky]

3. La valeur symbolique que l’on attribue à la monnaie est subjective. Elle dépend de la confiance qu’on accorde à ces signes, ainsi que de la quantité de signes en circulation (inflation / déflation). Ce système doit reposer sur un ensemble de lois contraignantes, sans lesquelles l’ensemble des populations ne joueraient pas le jeu. Ces lois constituent l’un des ciments du système et ne peuvent être discutées, à la façon d’un credo religieux au sein d’une église.

4. La valeur des biens et des services va dépendre essentiellement de leur rareté. Un produit, un bien ou un service abondant aura un faible prix ; un produit, un service ou une ressource quelconque se trouvant en faible quantité ou en pénurie (réelle ou artificielle) aura un prix élevé. C’est ce que l’on appelle traditionnellement « la loi de l’offre et de la demande ». La majorité des habitants de cette planète n’ont pas idée à quel point ils sont affectés négativement par l’économie de marché au sens large de l’expression. La fidélité de la plupart des gens à ces principes est indéfectible, mais elle ne repose que sur l’endoctrinement traditionnel.

5. L’ensemble du système économique basé sur la monnaie est fondé sur la (gestion de la) pénurie. Pour qu’un produit, une ressource ou un service ait une valeur, il doit être plus ou moins rare. Le suprême paradoxe étant que, pour maintenir sa valeur, la monnaie elle-même doit être rare ! Même en situation de création massive de monnaie, les principes sur lesquelles repose le système monétaire font que tout cet argent se trouve très inégalement répartit. De ce fait, un petit nombre possède d’énormes quantités de monnaie, tandis qu’un grand nombre en possède peu ou pas du tout, engendrant inégalité et pauvreté. Il en résulte que de manière générale, il doit ne jamais y en avoir assez pour tout le monde ... !

« le système de marché industriel institue la pénurie d’une façon qui n’a aucun précédent dans l’histoire de l’humanité et à un degré atteint nulle part ailleurs. La production et la distribution sont liées au comportement des prix et tous les moyens d’existence au fait d’acquérir et de dépenser. L’insuffisance de moyens matériels devient le point de départ explicite, calculable, de toute activité économique. » [Marshall Sahlins]

6. La monnaie engendre la concurrence et la compétition. Comme l’argent devient l’intermédiaire obligé pour se procurer les produits et les services nécessaires à vivre et prospérer, et comme il n’y en a pas assez pour tout le monde, il s’ensuit logiquement qu’il va y avoir concurrence et compétition. Il n’aura échappé à personne que l’économie monétaire a produit une société ou l’argent est devenu la mesure de toute chose et ou le profit est devenu l’objectif premier. De façon générale, l’ensemble des ressources (donc des richesses de la planète) vont aboutir entre les mains d’un très, très petit nombre de personnes (en proportion au 7 milliards d’individus), et ces personnes, contrôlant de (très) grandes portions des ressources, déterminent elles-mêmes la rareté et les prix, quitte à détruire (ou dissimuler) les ressources excédentaires (il faut maintenir - artificiellement ! - les prix, donc la rareté et la pénurie).

« La cupidité et la compétition ne résultent pas de l’immuable nature humaine. La cupidité et la peur de la pénurie sont en fait créées et amplifiées en permanence par le type de monnaie que nous utilisons. Nous pouvons produire plus de nourriture que nécessaire pour nourrir tous les habitants de la planète, mais il n’y a pas assez d’argent pour la payer. La rareté est indissociable des devises nationales. En réalité, les banques centrales ont pour tâche de créer et de maintenir la pénurie. Cette attitude a pour conséquence directe que nous devons nous battre les uns les autres pour survivre. » [Bernard Lietaer]

7. La logique sous-jacente de la monnaie est l’échange, c’est-à-dire la société marchande. Dans un échange, un acheteur gagne un bien (ou un service) mais il en perd au autre en même temps (sous forme de monnaie). Qui plus est, dans la logique marchande du profit, un bien est évalué non pas selon sa valeur véritable (que l’on peut évaluer selon la quantité de matière première - les ressources matérielles - et le travail humain - les ressources humaines - nécessaires à sa fabrication), mais selon une valeur ajoutée : on ajoute à la valeur objective une valeur subjective de profit, et cela pour chaque intermédiaire (grossistes, marchands, détaillants) entre le fabricant et l’acheteur. A cela s’ajoute encore une série de taxes diverses imposées par les états. Il en résulte que les biens ont un prix subjectif très supérieure à leur valeur objective, ce qui, si l’on y réfléchit de manière pragmatique, est absurde.

8. L’alternative pragmatique à l’économie monétariste est ce que Jacque Fresco a appelé « l’économie basée sur les ressources » (en abrégé : EBR). L’économie basée sur les ressources est un mode de société qui établit comme principe fondateur que l’ensemble des ressources naturelles de la Terre constitue un héritage commun à tous les êtres vivants de la planète (notamment les êtres humains). Cet héritage commun doit donc être géré en commun et équitablement répartis à tous (et non à une petite minorité de privilégiés comme c’est actuellement le cas). La logique de l’économie basée sur les ressources nous reconnecte donc avec le monde réel, qui est la planète Terre : c’est elle qui procure les richesses de base dont nous avons tous besoin.

« Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : "Ceci est à moi", et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civilisée. Que de crimes, de guerres, de meurtres, que de misères et d’horreurs n’eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : "Gardez-vous d’écouter cet imposteur, vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n’est à personne." » [Jean-Jacques Rousseau]

9. La logique sous-jacente qui prévaut dans une EBR est le partage. Dans cette logique, les biens et les services ne s’évaluent pas selon une monnaie symbolique, mais selon la quantité de ressources qu’ils requièrent (c’est-à-dire leur valeur objective). Le système de gestion qu’implique l’EBR repose sur un ensemble de connaissances scientifiques et techniques (actuellement disponibles : il ne s’agit pas de prospectives sur des découvertes à venir) pour garantir l’accès gratuit à toutes les ressources nécessaires au développement digne et libre de chaque être humain, dans une gestion globale et durable respectant les principes et les lois naturelles de la biosphère (notamment l’équilibre dynamique de reproduction des diverses espèces).

« Nous connaissons une crise de l’évolution de la société humaine. C’est une situation qui est à la fois unique dans l’histoire humaine et dans l’histoire géologique. Cela ne s’est jamais produit et cela ne se reproduira jamais plus. On ne peut exploiter le pétrole qu’une seule fois. Bientôt, tout le pétrole aura été brûlé et tous les métaux auront été extraits et utilisés. C’est évidemment un scénario catastrophe, mais nous disposons de la technologie. Tout ce que nous avons à faire est de revoir complètement notre culture et trouver une alternative à la monnaie. Nous ne repartirons pas de zéro. Nous disposons d’une énorme quantité de connaissances techniques. Il suffit de les rassembler. Si nous ne stabilisons pas la société, nous courons à la catastrophe. Cela veut dire qu’il faut que nous abandonnions deux axiomes de notre culture : l’éthique du travail actuelle et l’idée que la croissance est un état normal de la vie. » [M. King Hubbert]

Cordialement,
Morpheus


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