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Commentaire de Joe Chip

sur Attentats du 13 Novembre 2015 et État d'urgence : Lionel Denis dénonce avec raison la disparition de l'État de droit, etc


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Joe Chip Joe Chip 5 décembre 2015 15:52

C’est bien, le blueman se retrouve à présent à aboyer avec Jean Quatremer au nom de la défense des "droits de l’homme" (qu’il considère habituellement pour une dangereuse doctrine des Lumières satano-pédo-judéo-maçonniques, faut pas chercher à comprendre...) et, pour pousser un peu plus loin la contradiction, à tenir des propos dignes de Cambadélis qui, lui aussi, voit partout le retour du fascisme et du maréchal Pétain, avant de finir dans une explosion orgasmique digne du BHL de l’idéologie française :

la France possède une mentalité fascisante et autoritaire, due principalement à la mentalité de l’État profond qui suinte depuis Vichy

Bientôt, ce sera en France la dictature du national-socialisme remis au goût du toujours, ou "Vichy, le retour"

Nous y voilà... avec petit rappel - évidemment - à la guerre d’Algérie, la petite touche personnelle du maghrébin sans doute, ou la cerise sur le gâteau... 

Le blueman ne s’est pas attardé à lire les fameux statuts qui permettent au gouvernement français de suspendre - dans une certaine mesure - les dispositions relatives à la CEDH : c’est là qu’on y trouve formulé le concept de "mise en danger de la nation". Si on peut le déplorer, ou le critiquer en soi, il est en revanche absurde reprocher au gouvernement d’avoir dérogé à des principes qu’il invoque précisément dans le but de justifier... l’état d’urgence : 

[

Article 15 – Dérogation en cas d’état d’urgence

En cas de guerre ou en cas d’autre danger public menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l’exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international.

La disposition précédente n’autorise aucune dérogation à l’article 2, sauf pour le cas de décès résultant d’actes licites de guerre, et aux articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7.

Toute Haute Partie contractante qui exerce ce droit de dérogation tient le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe pleinement informé des mesures prises et des motifs qui les ont inspirées. Elle doit également informer le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe de la date à laquelle ces mesures ont cessé d’être en vigueur et les dispositions de la Convention reçoivent de nouveau pleine application.

]

Texte complet de la CEDH ici :

http://www.coe.int/fr/web/conventions/full-list/-/conventions/rms/0900001680063776

Le blueman entretient ensuite la confusion :

concernant l’instauration de l’État d’urgence, il faut quand même savoir que Thomas Andrieu, directeur des libertés publiques (on se croirait dans un État fasciste) et des affaires juridiques au secrétariat général du ministère de l’Intérieur, été chargé de rédiger les décrets de l’État d’urgence le Vendredi soir des attentats, à 22h30, bien avant même l’assaut du RAID sur le Bataclan, puisque ceux-ci ont été adoptés en Conseil des ministres à minuit. Le gouvernement a validé cette option en moins de deux heures, sans même attendre le dénouement de l’assaut lancé au Bataclan, une vingtaine de minutes plus tard.

Le blueman a pour source un article d’ER qui reprend des éléments tirés d’un article de francetvinfo.fr au titre pour le moins ambigu :

http://mobile.egaliteetreconciliation.fr/Attentats-les-decrets-sur-l-etat-d-urgence-adoptes-avant-meme-l-assaut-du-Bataclan-36461.html

http://mobile.francetvinfo.fr/faits-divers/terrorisme/attaques-du-13-novembre-a-paris/les-decrets-sur-l-etat-d-urgence-adoptes-avant-meme-l-assaut-du-bataclan_1200761.htmlh

Or, les décrets sur l’état d’urgence n’ont pas été signés en relation avec "l’assaut du Bataclan" donné par le RAID après minuit - contrairement à ce qu’affirme cet article - mais avant le dénouement de la prise d’otage alors qu’il y a déjà eu de nombreux morts dans Paris, des échanges de tirs entre les terroristes et les hommes de la BAC arrivés les premiers sur les lieux, et surtout l’évacuation du Président du stade de France suite à une série de trois explosions. Les services secrets Français ont pris l’attentat du stade de France comme une tentative d’assassinat visant le Président alors qu’une opération terroriste paramilitaire se déroulait simultanément en plein Paris, d’où la mobilisation immédiate des services de sécurité et l’application rapide de l’état d’urgence. On peut critiquer la loi relative à l’application de l’état d’urgence, on peut en critiquer l’ensemble des dispositions ainsi que les protocoles particuliers, mais dénoncer la réactivité et l’efficacité de l’Etat dans une telle situation, en modifiant en outre le contexte dans lequel cette décision a été prise, relève d’une manipulation subtile de l’information. 

Le texte de l’article est d’ailleurs plus précis que le titre :

"J’ai été saisi, vendredi 13 novembre à 22h30, de la décision du président de la République de déclarer l’état d’urgence », explique-t-il. Soit immédiatement après l’évacuation de François Hollande du Stade de France"

La précision est salutaire, surtout quand on prétend se méfier des informations délivrées par les "médias officiels". En l’occurrence cela change complètement l’interprétation des faits, puisque le crétin complotiste de base aura retenu, à l’instar du blueman, que le gouvernement français avait suffisamment anticipé les évènements pour qu’on arrive à le soupçonner, par un glissement logique, d’avoir au minimum profité des attentats - sinon de les avoir organisé lui-même - dans le seul but d’instaurer l’état d’urgence et de pouvoir ainsi "déroger aux droits de l’homme", en inversant donc la cause (attentat) et les effets (état d’urgence)...

Tout Etat moderne s’entraîne à réagir avec le maximum de vitesse et d’efficacité à ce type de situation, le déroulé des évènements du 13 suggère simplement que l’Etat français s’était préparé à répondre en temps réel à un tel scénario, ni plus, ni moins, comme le dit très bien un des commentaires sur ER :

Si le sportif s’entraine à une coordination musculaire réflexe, l’Etat comme toute organisation s’entraine à une coordination collective réflexe. Ici, je suis prêt à parier qu’en enquêtant, vous trouverez les indications de ce type d’entrainement (procédure rédigée, pratique de son application, rapport d’évaluation etc). En effet, la réactivité est le signe d’une organisation qui fonctionne. Et qui sait appliquer une procédure dite de "gestion de crise" (les historiens retrouveront ces documents).

Il faut donc vraiment être paranoïaque ou malhonnête pour voir dans cette coordination logique la preuve d’une implication de "l’Etat profond" dans la succession des évènements, sans parler de la comparaison stupide, anachronique et franchement vicieuse avec "Vichy".

Le blueman est en outre incapable de comprendre que l’on ne peut pas mettre sur le même plan statistique les victimes d’un massacre terroriste avec les victimes hivernales de la grippe ou d’accidents domestiques, qui relèvent des politiques de prévention et de santé publique. Le but déclaré des terroristes est bel et bien d’attenter à la "vie de la nation" - en déclenchant une guerre civile, comme en Algérie dans les années 90 - il est donc inutile et absurde de jouer sur les mots en renvoyant les 130 victimes du 13 novembre à leur insignifiance individuelle et statistique : 

Et au motif d’une supposée "mise en danger de la vie de la nation"... Comme si la vie même de la France était menacée par quelques gugusses armés de kalachnikov

Outre la charge symbolique et la démoralisation collective qu’ils génèrent, les attentats massifs font peser une menace objective sur l’ordre social, la sécurité collective mais aussi sur l’économie (une note de la direction du Trésor évoquait déjà une perte de 2 milliards d’euro). Mourir d’une glissade malencontreuse dans une baignoire et se faire buter par un taré en mission-suicide, ce n’est pas tout à fait la même chose. En outre, il faut ajouter à ces attentats ceux du mois de janvier (Charlie Hebdo, supermarché kasher), du mois de juin (patron décapité par un employé) et du mois d’août (carnage évité de justesse dans un train), sans parler de toutes les tentatives ou projets qui ont été déjoué cette année. 

Quant à ton installation au Québec et ton expérience personnelle en France, elles n’ont aucun rapport avec ces évènements et on s’en fout un peu... on pourrait d’ailleurs te reprocher d’exploiter ces évènements pour justifier ton ressentiment personnel.


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