• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV Mobile


Commentaire de microf

sur La construction du pont de Crimée avance à grands pas


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

microf 2 juillet 2017 21:47

@guepe.
La suite 2.

Les secrets ressortent des cartons secret-défense des archives. Ni le temps ni même le secret qui les entoure depuis des décennies n’ont effacé de la mémoire collective, l’encre séchée sur ces pages jaunies et sombres de l’Histoire entre la France et certaines de ces anciennes colonies. Massacre de Thiaroye, livraison d’armes dans la guerre du Biafra ou réarmement trouble de la métropole dans le génocide au Rwanda... En dépoussiérant les archives, la revue « XXI » rappelle ces inavouables crimes français en Afrique et pose, par la même occasion, l’épineuse question de la déclassification des archives françaises.

Si les murs de l’Elysée pouvaient parler, ils nous diraient tant. Pour l’heure, ce sont ses archives qui parlent en tout cas pour l’Afrique. Dans son numéro 39 d’automne 2017, la revue XXI revient sur les pages sombres de l’histoire franco-africaine avec un dossier intitulé « Nos crimes en Afrique ». Trois dossiers sont exhumés en dépoussiérant les cartons secret-défense des archives françaises.

Rwanda, l’ordre immoral de réarmer les génocidaires

Sous la lumière tamisée du sous-sol des archives, deux hauts fonctionnaires sont chargés d’éplucher, entre 1990 et 1994, des documents se rapportant à l’Afrique. Mais face à l’horreur retranscrite sur les pages, ils referment les cartons. Qu’ont-ils vu  ? Sans doute cette note manuscrite confiée par un haut-fonctionnaire au journaliste Patrick de Saint-Exupéry, qui intime l’ordre aux soldats français de réarmer les Hutus. Ceux-là mêmes qui venaient de massacrer, selon un bilan à jamais provisoire, quelque 800 000 Tutsis.

Trois mois après le début du génocide, la France de François Mitterrand, engagée au début aux côtés du président rwandais Juvénal Habyarimana contre les rebelles tutsis, envoie 2 500 soldats au Rwanda lors de l’opération « Turquoise », lancée en juin 1994.

Officiellement, il faut « mettre fin aux massacres partout où cela sera possible, éventuellement en utilisant la force », selon le mandat de l’ONU. Officieusement, selon Patrick de Saint-Exupéry, les militaires français reçoivent l’ordre de remettre des armes aux Hutus, qui se ruent pour passer la frontière, mis en difficulté par les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR), constitué d’exilés tutsis dont Paul Kagamé.

En plus de poser une clause de conscience aux militaires, cet ordre immoral se fait en violation flagrante de l’embargo sur les armes décrété par l’ONU en mai de la même année. De quoi relancer les spéculations sur le rôle sombre de la France dans le pays des mille collines. En tout cas pour l’heure, en dépit des promesses, des enquêtes, des appels à un devoir de mémoire, les archives restent secrètes sur le Rwanda. Une boîte de Pandore ? Seule leur déclassification permettrait d’avoir des réponses précises.

Sénégal, les tombes sans nom des tirailleurs massacrés à Thiaroye

image : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/6c/Thiaroye_Mural_DSCN1029. jpg

Après avoir promis de donner au Sénégal les archives sur le massacre de Thiaroye, François Hollande se rend dans cette banlieue dakaroise en novembre 2014 pour, dit-il, « réparer une injustice et saluer la mémoire d’hommes qui portaient l’uniforme français et sur lesquels les Français avaient retourné leur fusil ».

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, la France entreprend le « blanchiment » des troupes en remplaçant les tirailleurs issus du Sénégal, du Dahomey (actuel Bénin), du Soudan français (actuel Mali), de la Côte d’Ivoire, de l’Oubangui-Chari (actuelle Centrafrique), du Niger, du Tchad, du Gabon et du Togo, par des soldats français de souche. Des milliers de soldats sont alors démobilisés des villes françaises vers le camp de Thiaroye. Avant d’embarquer, certains réclament le paiement intégral de leur pécule, leurs indemnités, leurs arriérés de solde et leurs économies enregistrées dans des livrets d’épargne, et ne partiront pas.

Sur le camp de la banlieue dakaroise, la contestation des tirailleurs gagne en ampleur, notamment lors de la visite d’un général. La suite ? Des gendarmes français, appuyés de tirailleurs coloniaux, ouvrent le feu sur les soldats noirs. Bilan, 70 morts au total dont 35 suite à leurs blessures, selon les archives. Une version de l’Etat français que contestent, tant sur les chiffres, les circonstances, les origines, les motifs et le déroulé, plusieurs spécialistes qui indiquent que des archives ont été en partie soustraites pour ne pas donner une idée sur l’ampleur des faits. Malgré la nationalité française récemment octroyée par François Hollande à des tirailleurs, l’ouverture complète des archives tarde à venir. Elle permettrait pourtant de mettre des noms sur les tombes de ces soldats inconnus qui meublent le cimetière qui leur est dédié.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès