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Commentaire de Joe Chip

sur Frédéric LENOIR, conférence "Le miracle Spinoza"


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Joe Chip Joe Chip 16 mars 2018 11:41

@Gollum

Ne pas louper le passage à partir de 1H et 1 minute où il fait la distinction nette entre christianisme historique, hyper toxique, et les Évangiles qui eux, sont en accord avec Spinoza.  C’est une façon soft de proclamer la trahison pure et simple du Christ par les Églises officielles. Mais il prêche là un convaincu. 

On a déjà eu cette conversation à plusieurs reprises donc j’y reviens très rapidement, mais c’est une thèse caricaturale. Les "Eglises officielles" n’ont pas plus "trahi" le Christ - grosse confusion intellectuelle au passage, puisque le Christ est une "invention" de l’"Eglise officielle" - que les innombrables sectes "gnostiques" plus ou moins opportunistes qui se réclamaient de Jésus en inventant parfois des textes et des sources concurrentes. Il n’y avait pas d’un côté la méchante église officielle et de l’autre les dissidents "ésotériques" restés fidèles et proches dy message de Jésus... Et puis de quels Evangiles parles-tu ? Le canon ? Les apocryphes ? Les Evangiles "gnostiques" ? 

En outre, c’est une contre-vérité historique. L’Eglise paulinienne ne s’est imposée nulle part par la coercition mais par la puissance de sa théologie et l’accessibilité de son message.

Il est important de juger les choses en contexte et se rappeler que le christianisme est à l’époque une religion urbaine. Les chrétiens ne sont pas des paysans incultes cherchant la protection d’une Eglise autoritaire et fermée mais très souvent des notables pétris de culture hellénistique, des femmes de la haute société sénatoriale, des artisans, des esclaves affranchis... A l’inverse la plupart des gnostiques étaient des affabulateurs, des marginaux et des "orientaux" prônant un individualisme radical et un retrait sectaire qui ne répondaient pas - tout simplement - aux aspirations nouvelles de la "classe moyenne" urbaine. L’Eglise proposait aux croyant une conception nouvelle de la dignité de la personne - héritière à la fois de la tradition chrétienne et de la philosophie gréco-romaine assimilée par les Pères de l’Eglise -, une simplicité de moeurs, et une communauté chaleureuse ouverte à tous (égalité spirituelle devant Dieu). 

Pour le résumer par un seul mot, l’Eglise est "moderne". Ce sont les sectateurs gnostiques qui proposent un retour au passé, une fuite vers les espaces vides (désert...), l’expiation nihiliste de la chair déchue par des pratiques extrêmes et un ascétisme paradoxal qui est incompatible avec la "common decency" et bien plus rédhibitoire aux yeux de la population romaine que toutes les récriminations des pères de l’Eglise ! C’est d’ailleurs ce "puritanisme" relatif qui a attiré beaucoup de femmes vers l’Eglise.

Et je le dis avec d’autant plus de facilité que je suis le premier à taper sur les cathos intégristes et à critiquer l’évolution ultérieure de l’Eglise. 

Frédéric Lenoir, franchement, il est à la religion ce qu’un chanteur de variété est à la musique. Un peu de philo tendance new age, un peu de Jésus en mode "hippie libéral", un peu de bouddhisme ou "sagesse orientale" intellectuellement recyclé pour coller aux attentes du cadre moyen qui cherche à "déstresser" sans sortir de son confort et de sa petite bulle de certitudes existentielles, une dose de gnose mais pas trop quand même, faut quand même avoir ses livres en tête de gondole à la fnac et pouvoir promouvoir le tout le dimanche matin sur France 2 entre "Présence protestante" et "Jour du Seigneur" en dialoguant avec un rabbin et un curé... Sa "philosophie" est un syncrétisme qui tire en dernière analyse vers le développement personnel et la "spiritualité" telle qu’on la conçoit dans les colloques d’entreprise. C’est un compilateur qui propose un prêt-à-penser pour des gens qui ont adoré le Da Vinci Code et qui veulent rester à la surface des choses. 


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