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Commentaire de Tuco

sur "Les déconvertis de la psychanalyse"


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Tuco Tuco 23 août 2018 00:19

Voilà à quoi Sigmund Freud, Jacques Lacan, et tous les autres psychanalystes, ont tourné résolument le dos, et tourne encore le dos : 


"(...) Ceux parmi nous qui refusent d’exposer leurs idées au risque de la réfutation ne prennent pas part au jeu scientifique.
Les tests expérimentaux, prudents et rigoureux, auxquels nous soumettons nos idées sont eux-mêmes inspirés par des idées : l’expérience est une action concertée dont chaque étape est guidée par la théorie. Nous ne tombons pas fortuitement sur des expériences pas plus que nous ne les laissons venir à nous comme un fleuve. Nous devons, au contraire, être actifs : nous devons "faire" nos expériences. C’est toujours nous qui formulons les questions à poser à la nature ; c’est nous qui sans relâche essayons de poser ces questions de manière à obtenir un "oui" ou un "non" ferme. (Car la nature ne donne de réponse que si on l’en presse). Enfin, c’est encore nous qui donnons la réponse ; c’est nous qui décidons, après un examen minutieux, de la réponse à donner à la question posée à la nature - après avoir longuement et patiemment essayé d’obtenir d’elle un "non" sans équivoque. "Une fois pour toutes", dit Weyl, avec lequel je suis pleinement d’accord, "je désire manifester mon admiration sans bornes pour l’oeuvre de l’expérimentateur qui se bat pour arracher des faits susceptibles d’être interprétés à une nature inflexible si habile à accueillir nos théories d’un Non décisif ou d’un inaudible Oui.
Le vieil idéal scientifique de l’épistêmê, l’idéal d’une connaissance absolument certaine et démontrable s’est révélée être une idole. L’exigence d’objectivité scientifique rend inévitable que tout énoncé scientifique reste nécessairement et à jamais donné à titre d’essai. En effet un énoncé peut être corroboré mais toute corroboration est relative à d’autres énoncés qui sont eux aussi proposés à titre d’essai. Ce n’est que dans nos expériences subjectives de conviction, dans notre confiance personnelle, que nous pouvons être "absolument certains".
Avec l’idole de la certitude (qui inclut celle de la certitude imparfaite ou probabilité) tombe l’une des défenses de l’obscurantisme, lequel met un obstacle sur la voie du progrès scientifique. Car l’hommage rendu à cette idole non seulement réprime l’audace de nos questions, mais en outre compromet la rigueur et l’honnêteté de nos tests. La conception erronée de la science se révèle dans la soif d’exactitude. Car ce qui fait l’homme de science, ce n’est pas la possession de connaissances, d’irréfutables vérités, mais la quête obstinée et audacieusement critique de la vérité.
Notre attitude doit-elle, dès lors, être de résignation ? Devons-nous dire que la science ne peut remplir que sa tâche biologique, qu’elle ne peut, au mieux, faire ses preuves que dans des applications pratiques susceptibles de la corroborer ? Ses problèmes intellectuels sont-ils insolubles ? Je ne le pense pas. La science ne poursuit jamais l’objectif illusoire de rendre ses réponses définitives ou même probables. Elle s’achemine plutôt vers le but infini encore qu’accessible de toujours découvrir des problèmes nouveaux, plus profonds et plus généraux, et de soumettre ses réponses, toujours provisoires, à des tests toujours renouvelés et toujours affinés."
 (Karl R. POPPER, "La logique de la découverte scientifique", Edition Payot, 1973, chapitre 10 : "La corroboration, ou comment une théorie résiste à l’épreuve des tests", pages 286 - 287).

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