@PumTchak
"Finalement,
la question est est-ce qu’un islam est possible dans un pays dar
al-kufr, tant que le poison salafiste est alimenté dans l’ouma
(wahhabite, frériste)."
Juste
une précision les fréristes ne sont pas salafistes comme le laisse
entendre cette phrase. C’est probablement un simple raccourcis dans
l’expression écrite mais il convient de rappeler que ce sont deux
doctrines très opposées justement dans leur approche de l’altérité non-muz.
Je schématise à outrance mais l’une (salafiste) est séparatiste
(le pur séparé de l’impur), l’autre (frériste) est
une forme d’entrisme des sociétés non-musulmanes, avec l’optique
d’influencer et à terme de prendre le pouvoir temporel.
Ma
réponse est que ces deux tendances très prégnantes, pleines de
vitalité, ne sont que les aspects les plus spectaculaires d’une
problématique de fond plus grave (et ce n’est même pas moi qui le dit mais Tavvhidi lui-même, voir ci-après). En se
focalisant sur ces deux seuls courants (dont l’un, le salafisme, se
subdivise en plusieurs autres avec des oppositions marquantes entre
eux), nous avons tendance à écarter le fait que ce qui pose
problème est plus largement les écoles du sunnisme (côté chiite
ce n’est guère mieux...). Salafisme et frérisme ne sont rien
d’autres que les sous-produits d’une école hanbalite plus large.
Très souvent on nous explique que les autres mahadab du sunnisme
(chaféisme, malékisme et hanafisme) sont plus acceptables mais à y
regarder de plus près, ces écoles sont juste un peu moins pires. Le
droit pénal musulman a été étouffé durant la colonisation mais
il revient en force par différents biais et en fonction des pays. Il
y a une palette d’applications de celui-ci mais ce que l’on peut
affirmer c’est que le code arabe unifié démontre explicitement que
celui-ci est en totale opposition avec le nôtre. Or le droit c’est
un des fondements des sociétés. Si la question est "comment
concilier la présence d’une idéologie religieuse qui aboutit
à un droit en radicale opposition avec l’esprit de notre loi ?",
alors la réponse est que c’est impossible, par définition. Il ne
peut y avoir coexistence de deux droits. La primauté d’un droit sur
l’autre aboutit nécessairement à la coercition, la mise hors-la-loi
de l’autre.
Autrement
dit ce n’est - et c’est un point de vue personnel - pas tant le
salafisme ou l’idéologie d’un islam politique (pléonasme) des
Frères Musulmans qui pose problème mais plus généralement la
doctrine islamique elle-même en cela que d’elle découle un droit et
une organisation de la société qui sont en contradiction avec les
nôtres.
Cet
imam chiite est un cas à part (enfin pas si à part que cela... sa
stratégie est partagée par d’autres, nous y reviendrons) : il dit faire passer l’humain avant la religion, sauf que ça n’a tout
simplement aucun sens en islam, quelle que soit l’école considérée.
Alors il y a trois possibilités : soit cet imam donne dans le
spirituel exclusivement (dans l’absolu c’est possible mais je n’y crois pas une
seconde) soit il donne
dans le soft povver islamique, à savoir il nous dit exactement ce
que nous avons envie d’entendre.
Je
voulais illustrer mon propos avec cet échange parce qu’il en dit
long : ici l’imam nous explique que le dénominateur commun pour une
entente "est la logique et ne peut pas être la culture"
(pourtant si tu l’écoutes il parle énormément des différences de
culture entre occidentaux et moyen-orientaux, notamment au travers
des femmes, du rapport de l’individu dans sa quête d’appartenance à
une communauté qui est très forte chez les seconds et pas du tout
chez les premiers, etc). Dans cette entrevue il explique qu’il faut
travailler sur la mentalité des immigrés venus du M-O (ça vaudrait
aussi pour ceux venant d’Afrique ou d’Asie) s’installer en occident
mais il oublie de dire que :
-
La mondialisation fait qu’il est désormais facile de garder sa
culture d’origine et nous allons tous vers le plus facile, le plus
rassurant pour nous
-
Les sociétés occidentales sont fondées sur le principe d’une très
grande liberté individuelle tandis que l’islam et les cultures
arabes notamment se basent sur la soumission des individus (à Dieu,
mais aussi à leur société, la oumma).
Je
pense que c’est un type très intelligent qui sait parfaitement cela
mais ne le formule pas à dessein. D’ailleurs il dit aussi dans cette
entrevue qu’il ne croit pas que le dénominateur commun aux humains qui est leur sens de la logique (ce que je conteste...) peut l’emporter.
Autrement dit, qu’il soit sincère ou non (peu importe), il estime
que sa position ne peut PAS l’emporter. Voilà qui devrait inquiéter
les occidentaux parce qu’on a là un type qui a l’islam probablement
le plus ouvert au monde et qui affirme lui-même que son pré-requis
de logique commune est inatteignable : "La
logique nous dit que la loi doit être respectée, quels que soit nos
points de vue. Mais ceci est ce qui devrait en pratique se passer, ce
n’est que de la théorie, ça n’arrivera jamais. C’est ce qui
pourrait et devrait être la solution*, mais je ne crois pas que cela
arrivera."