@yoananda2
« les
faits ça n’existe pas, ça s’interprète toujours parce qu’on n’est pas dans la
tête des gens ».
Non. Là il y’a
un gros problème dans ton énoncé. A ce compte-là, un type pourrait faire tomber
une pomme à terre et prétendre qu’elle est montée au ciel parce que c’est son
interprétation personnelle. Et dans la vidéo de l’article, il n’est pas
question d’une bavure policière mais d’un clown qui a étouffé un chat, c’est une
interprétation comme une autre et tout se vaut. Finalement rien n’existe et
tout devient interprétation. C’est ça qu’implique l’énoncé « les faits ça
n’existe pas ».
Moi je ne
vais entrer dans un débat philosophique et épistémologique entre l’objectivisme
et subjectivisme radical pour déterminer ce qui existe ou pas dans l’absolu, cependant
juridiquement le mot "fait" désigne un événement qui tombe sous les sens
et qui est susceptible de jouer un rôle dans le développement d’un litige.
Lorsqu’un gus en tue un autre en lui tirant une balle dans la tête, il ne peut
pas de présenter au tribunal en prétextant que les faits n’existent pas, que le
type qu’il a tué n’existe pas non plus et que de toute façon chacun interprète comme
il veut épicétou , il ne va pas échapper à son procès et à sa condamnation avec
cette défense ( sauf si c’est la folie qui est plaidée). Alors bien sur les faits
ça s’interprète, la subjectivité entre toujours en compte, il n’en reste pas
moins que leur déroulement et leur quantification reste évaluable objectivement,
c’est pour ça que le tribunal va reconstituer ces faits, séquences par séquences
pour déterminer la culpabilité de ce type. Et cette évaluation des faits ne va
pas se faire par des ressentis mais par la raison. Ça ne veut pas dire que les
ressentis n’ont pas leur place dans un procès en général mais que c’est la
raison qui va permettre d’obtenir quelque chose qui se rapprocherait d’une
juste reconstitution des événement pour au moins déterminer ce qui s’est passé.
Donc là on
présente une vidéo sur un policier qui est incriminé pour homicide. Je pose
certaines questions sur ce qu’elle est censée apporter ou modifier et on me
parle de race, de démocrate, d’ACAB et j’en passe. Donc je constate que les
réponses qu’on m’apporte ne sont ni rationnelles, ni logiques. Désolé mais si un
type me demande si Pékin est la capitale de la Chine et que je lui réponds que
je n’aime pas les pommes de terres … ma réponse n’aurait aucun sens ,
j’ai le droit de ressentir que c’est la bonne réponse si ça me fait du bien mais
je ne vais pas commencer à lui dire qu’il a les fils qui se touchent parce qu’il
me dit que ma réponse n’a rien de logique ou de rationnel, c’est juste vrai.
Avoir des
biais ? Evidemment que j’en ai comme tout le monde mais précisément, dans
un cadre rationnel on les combat, c’est une lutte qu’il faut livrer en
permanence contre soi-même, on ne se dit pas « j’ai des biais et c’est comme
ça, je n’y peux rien ». Après, on a le droit de ne pas être dans ce cadre
rationnel, moi aussi il m’arrive de refuser ce cadre ( dans tout ce qui touche
mes croyances religieuses par exemple) mais
dans ce cas pourquoi parler de fil qui se touchent ? Ben non, soyons concret :
Floyd a eu ce qu’il méritait parce que c’est un drogué noir, ce qui arrive à Chauvin est injuste, je suis blanc et je défends ma race
dont Chauvin est un représentant parce que c’est ce que je ressens épicétou, voilà,
là y’a pas de discussion, face à un énoncé comme ça je ne répondrai même pas un
mot, la question serait vite répondue comme on dit. Par contre, si on défend
cette position en prétextant lui donner une base rationnelle, c’est normal qu’elle
soit réfutée sur cette base, ça ce n’est pas une question de fils qui se touchent mais de rationalisation du débat.
Au passage,
je n’ai rien contre l’appel à la réalité si ça se base sur des faits objectifs
et non des ressentis personnels ou des constructions idéologiques. Ce que je reproche à certains droitards, ce n’est pas de défendre leurs opinions subjectives (tout le monde fait ça, c’est normal), c’est de les ériger en vérités absolues incontestables que seuls des idiots, des fous ou des malhonnêtes
oseraient réfuter, là l’appel à la réalité devient une ruse rhétorique pour remporter un débat.