Non pas que je trouve que ce qu’il dit est faux ou inintéressant, bien au
contraire, mais à mon avis cela ne l’exempte pas pour autant des
critiques.
Tout d’abord "pourquoi l’Europe est-elle ce qu’elle est... " est une
phrase qu’Asselineau utilise souvent et qui est étonnamment vague pour
quelqu’un qui se propose d’être à l’avant-garde de la critique de la
construction européenne.
Pourquoi utiliser une expression récurrente comme celle-ci qui empêche
de savoir si nous sommes tout d’abord d’accord sur le constat en
lui-même avant de savoir comment ou pourquoi on en est arrivé là ? Si
j’ai bien compris ses propos, c’est parce que l’UE nous empêche
d’appliquer la politique française que nous voudrions, que les
Etats-Unis ont collaboré activement à sa construction, que le "non" de
2005 à été bafoué, et qu’il nous propose de s’allier en dépassant le
clivage droite-gauche afin d’en sortir en utilisant l’article 49a du
traité de Lisbonne.
Bien, voilà pourtant ce qui me gène :
- Pourquoi se contente-t-il de considérer tous les partis qui proposent de
changer ou de sortir de l’UE comme de simples "idiots utiles",
complices du système politico-médiatique, même ceux qui avaient déjà
vôté "non" au traité de Maastricht en 1992 ? Pourquoi ne s’est-il
apparemment pas intéressé à leur programme pour démonter leurs arguments
et pour décortiquer leurs raisonnements ?
- Je trouve tout de même ça curieux qu’il ne dise rien sur les clauses dites "d’opting-out" qui permettent
d’émettre des réserves voir de déroger à certains articles du traité de
l’UE, comme l’ont fait par exemple les britanniques et les danois à
propos de l’euro.
- Mais surtout, pourquoi Asselineau parle-t-il à plusieurs reprises de
"Constitution européenne", alors que ne sont que des traités qui nous
lient à l’Union, que le "traité établissant une Constitution pour l’
Europe" n’était pas juridiquement parlant une constitution, et n’a de
toute manière pas été ratifié par tous les états membres ?
- Pourquoi ne dit-il pas non plus que les directives européennes,
lorsqu’elles deviennent effectives, priment sur les législations de
chaque pays membres à condition qu’elles ne soient pas en contradiction
avec les constitutions nationales ?
Il ne nous informe pas que, pour cette raison là justement, la plupart
des états membres ont du amender leurs constitutions pour permettre le
transfert d’une parti de leur souveraineté aux institutions européennes.
Ce qui en clair veut dire que notre parlement national pourrait voter de
nouvelles lois constitutionnelles pour récupérer sa souveraineté s’il
le désirait. Comme a essayé de le faire par exemple le Parti de Gauche
pour contre-attaquer sur la question de la souveraineté budgétaire :
http://www.dailymotion.com/video/xfzrcl_martine-billard-02-12-10-rapport-ppl-svnte-fiscale_news
http://www.assemblee-nationale.fr/13/rapports/r2983.asp
- De la même manière, pourquoi Asselineau ne parle-t-il pas de l’arrêt
de Karlsruhe de 2009, qui dénonce de manière relativement diplomatique
que le traité de Lisbonne viole la constitution allemande ? Ceci
appuierait pourtant assez fortement sa démonstration...
http://www.fondation-res-publica.org/L-arret-du-30-juin-2009-de-la-cour-constitutionnelle-et-l-Europe-une-revolution-juridique_a431.html
-
Enfin, lui qui se dit républicain, et nous dit vouloir libérer le
peuple de France, pourquoi ne propose-t-il pas, non seulement de sortir de
l’UE, mais plus simplement encore la relance du processus républicain ?
C’est à dire l’élection d’une Assemblée Constituante qui nous
proposerait par référendum une constitution pour une VIème république,
garantissant tous les points sur lesquels nous ne voulons pas
d’ingérence de la part de l’UE, et où nous désirons la garantie de notre
souveraineté.
Asselineau, qui condamne pourtant sévèrement la construction
anti-démocratique de l’UE, pourquoi ne condamne-t-il pas aussi de la
même manière la Vème république française dont la constitution a été
rédigé en catimini par une commission inter-ministérielle non élue,
sélectionnée par De Gaulle, à la suite de la crise politique due au
putsch des généraux d’Alger ?
-
Et pour rajouter encore une dernière chose, je voudrais remarquer que
bizarrement il ne cite aucun travail de chercheur, de juriste ou
d’historien, alors qu’il y en a et qu’il aurait très bien pu les utiliser, les citer, pour appuyer ses discours ou pour nous donner d’autres pistes de réflexion.
C’est que contrairement à ce qu’il cherche un peu à nous faire croire,
Il n’est pas le premier à dénoncer la construction européenne...
Pour preuve, une conférence d’Annie Lacroix-riz qui fait part de ces
travaux d’historienne, publiés en 2007 sous le titre "L’intégration
européenne de la France : la tutelle de l’Allemagne et des Etats-Unis" :
http://www.dailymotion.com/video/x6s90y_europe-mythe-et-realites_news
N’étant personnellement pas prêt à voter pour un parti qui n’a pas de
ligne politique, je me doute que si je cherchais à poser ces questions à
Asselineau j’ai bien peu de chance de recevoir des réponses, et puis j’ai tout de même quelques idées sur la question.
Mais vu
que tout cela m’intéresse quand même, s’il y a des militants
ou des sympathisants qui peuvent un peu m’éclaircir sur ces points là,
ce serait avec plaisir.