LES FEMMES EN ARABIE APRÈS L’ISLAMISME
Les
évolutions sociales sont lentes, les changements progressifs. Le coran avait
inscrit l’avilissement de la femme dans ses lois ; mais les mœurs ne l’avaient
pas encore accepté. Les femmes continuèrent encore à briller pendant quelque
temps, en dépit du Prophète, de son Dieu et de sa loi.
L’époque des
khalifes qui succèdent à Mohammed est particulièrement brillante par les femmes
de valeur qui s’y distinguent.
L’histoire a
gardé les noms de Badhlah, la poétesse qui chante une douce chanson dans les
jardins de Baghdad, de Zubeïdah, femme du khalife Haroun Er-Rashid, qui
exprimait, dans des poésies délicieuses, l’amour et la douleur. C’était une
étoile de première grandeur, qui brillait dans le monde des lettres. Le
chroniqueur Madouzi, qui a gardé sa mémoire, a exagéré son luxe et sa
prodigalité. Le nom d’Abbassah, sœur du même khalife, est aussi resté dans le
souvenir des anciens Arabes. Une autre femme poète, Oleïah, joua un grand rôle
à cette époque. Par les accords de sa lyre, elle calmait les fureurs
tyranniques du khalife Haroun Er-Rashid. On raconte que, un jour, transporté de
plaisir en entendant la belle voix de la chanteuse, il jeta tout le contenu de
sa caisse sur la tête de celles qui accompagnaient la Diva, près de 6 millions.
Renan nous
apprend que « l’Islamisme lui-même eut une auréole pour Hind, fille
d’Othobah, qui chantait à la tête d’un chœur de femmes, à la bataille d’Ohed,
et contribua puissamment à la victoire des croyants ».
Le khalife
El-Motassem eut la pensée d’organiser un « Paradis terrestre », suivant les
données du Coran. Ce livre faisait, en Arabie, le même effet qu’avait fait la
Bible à son apparition. il faisait perdre la tête aux hommes. Dans les jardins
de Zamara, sur le Tigre, il réunit les plus belles femmes qu’il put trouver ;
singulière transformation d’une idée ! L’ancienne conception d’un lieu de
délices où règne la vie spirituelle, devient un lieu de débauche où règne
l’amour profane ! C’est ainsi que ces hommes dégénérés comprenaient le Paradis.
Cela amena un changement profond dans les mœurs. La femme libre perdit sa valeur,
et ce furent les esclaves qui se soumettaient aux caprices des hommes qui
furent les plus estimées. Ces femmes esclaves coûtaient des sommes folles,
surtout dans le Paradis de Zamara, où on dépensait le revenu de tout le royaume
pour les amours du khalife.
Il y avait à
Médine une célèbre école de chant, d’où sortit la remarquable chanteuse
Djemilah, qui évaluait chaque note de sa voix à un prix fantastique, ainsi que
l’avait déjà fait, du reste, la célèbre Salamah, chanteuse esclave à Zamara.
Salamah, Rabéïah,
Soueïkah et d’autres régnaient en maitresses sur le cœur du khalife. Les villes
les plus saintes d’Arabie, la Mecque, Médine, étaient des centres de luxe
restés renommés dans les derniers temps des Abbassides.
Les khalifes
de l’Arabie étaient à la fois chefs spirituels et temporels (khalifat signifie
vicariat). Ils se disputaient entre eux le pouvoir, et, pendant qu’ils étaient
occupés de leurs intrigues, leurs femmes, profitant de la liberté qui leur
restait, s’exerçaient dans toutes les branches de la science et des arts.
C’est ainsi
qu’on vit les femmes des khalifes provoquer une renaissance de la science. Une
d’elles, Chodah, s’y fit surtout remarquer. Sa vie austère, livrée à l’étude,
contraste avec celle des autres femmes de son temps, si occupées des soins
corporels que réclamait l’entretien de leur beauté.
Avec elle
devaient s’éteindre les derniers élans de l’esprit féminin en Arabie.
Quand les
Mongols attaquèrent Baghdad et mirent fin au luxe des khalifes, l’influence et
le charme de la femme intellectuelle disparurent de l’Arabie orientale.
Une classe à part se forma dans l’Arabie méridionale,
composée de femmes artistes, les chanteuses des cours des princes ; mais on ne
les glorifie plus, l’envie remplace la louange, on les accable de tant de mépris
que personne ne veut plus les connaître.
Islamisme, Ismaéliens
et Touareg