Curieuse vidéo que celle d’un "libertarien" mettant en exergue
l’ingérence étrangère et la technocratie comme solutions des problèmes
que nous devons affronter. Ce qui est suggéré là n’est autre qu’un
plongeon tout entier dans le bassin de soude qui est en train de nous
bouffer la jambe : soumettons-nous corps et âme à l’Europe des
technocrate et demain, c’est sûr, tout ira mieux !
Coluche disait, citant son "père" :
« Les technocrates, c’est des mecs on leur donnerait le Sahara, dans cinq ans faudrait qu’ils achètent du sable ailleurs. »
Je
pense que c’est précisément le problème et que ceux qui de fait nous
gouvernent, eurotrucs sous perfusion de cadeaux des lobbies, foutent
tout en l’air et n’agissent pas dans l’intérêt des peuples mais dans
celui, plus direct, de leurs très riches mécènes. Ceux qui financent
leurs campagnes électorales, leur train de vie. Ceux qui brassent des
milliards mais qu’on ne saurait soumettre à l’impôt proportionnellement à
leurs revenus de crainte qu’ils n’aillent s’installer ailleurs, où
l’herbe est plus verte, la main-d’œuvre "cheap", les normes peu
regardantes. Ceux qui à l’instar d’un monsieur Dassault
prônent le système D, comme Dassault, pour tout le monde sauf pour
eux-mêmes qu’il faut absolument sauver, aider, subventionner, de crainte
que leur incapacité à se débrouiller seuls ne cause faillite et chômage
pour leurs salariés.
C’est bien qu’un journaliste dise enfin
clairement qu’on va dans le mur, que la crise est grave, systémique, et
qu’elle nous imposera de faire des choix à la même échelle. Mais les
technocrates ne sont pas la solution : ils sont le cœur du problème. La
solution c’est le peuple et la gouvernance par des citoyens "normaux",
pas comme Hollande, des gens ordinaires et totalement désintéressés.
Comprenez : qui n’ont pas d’intérêts particuliers à défendre, de comptes
en Suisse, ou d’activités de lobbying. En fait ce que propose monsieur
de Closets dans cette vidéo, ce n’est ni plus ni moins que le même
système mais en plus direct : on court-circuite ouvertement le processus
politico-démocratique de sorte que les technocrates aux intérêts
supra-nationaux puissent gouverner à leur guise et élaborer eux-mêmes
les règles du jeu pour "gagner plus" — et tant pis pour ceux qui partent
avec les mauvaises cartes. Ou plutôt tant mieux : ce sera d’autant plus
simple pour ceux qui ont les bonnes, genre des services d’ordre privés
pour mater les velléités d’existence de ceux que leur avarice prive de
toit, de nourriture, et pour les maintenir dans cette maigreur dont
Shakespeare écrivait qu’elle particularise d’autant mieux l’abondance de
ceux qui en ont. Balzac lui écrivait que "derrière chaque grande
fortune se cache un crime", au choix : pesticides et OGM, guerre pour le
pillage des ressources, la vente d’armes pour détruire et de béton pour
tout reconstruire, médication-poison type Mediator, expérimentation et
massacre des animaux pour leur viande, leur fourrure, ou pour le
plaisir, spéculation sur les denrées alimentaires (dont céréales pour
nourrir les bêtes qu’on massacre), consommation de masse pour maintenir
la croissance et rejet des déchets y compris nucléaires, amiante, etc.
en Inde ou en Somalie, réchauffement climatique et déforestation,
destruction de notre environnement, la liste est longue !
J’ai
écouté très attentivement les discours et conférences de Ron Paul qui
est un vrai libertarien, j’en ai même traduit pour diffuser sa pensée.
Ceci pour dire que je ne suis pas un "coco" obtus et que si je n’adhère
pas à tout, je m’intéresse quand même. Il m’a l’air d’un type bien et je
pense qu’il croit à ce qu’il dit, mais un truc me chiffonne qu’il
rappelle lui-même dans un certain nombre de ses interventions : les
pères fondateurs de l’Amérique croyaient certes à la liberté comme
pilier de leur nation. Une valeur cardinale, l’État réduit à son plus
strict rôle de garant et protecteur de la Constitution, et les choses
ensuite se réguleront d’elles-mêmes. Mais il y avait un bémol et une
mise en garde : ce système, ce mode de gouvernance ne peut s’appliquer
qu’à condition d’avoir à sa base un peuple "vertueux", soucieux de faire
en sorte qu’en effet les choses se passent bien. Je pense que ces
conditions ne sont plus réunies : les technocrates en place sont animés
par l’avarice, guidés par une obsession capitaliste extrémiste, avec une
tentation politique néo-fasciste de main-mise sur le pouvoir via par
exemple la surveillance, les groupes de "sécurité" privés, le contrôle
de la production d’armes, les monopoles sur la santé, la bouffe,
l’énergie et bien sûr le contrôle de la monnaie, toutes ces choses étant
liées entre elles et entre les mains d’un petit cercle d’agents de plus
en plus restreint. L’affaire Occupy
par exemple montre bien ce "faisceau" d’éléments et notamment la
collusion public-privé à l’œuvre au pays de la liberté, càd de la
non-ingérence, où théoriquement les pouvoirs publics ne devraient avoir
aucun lien avec les intérêts particuliers des technocrates, banquiers,
grands industriels. Le problème qui devrait faire bondir tout
libertarien qui se respecte, et c’est le cas avec Ron Paul, tient à ce
que ces gens-là s’approprient le pouvoir politique ce que justement, le
libertarianisme tend à prévenir coûte que coûte. Parce que quand tous
les pouvoirs sont concentrés entre peu de mains, le résultat n’est autre
qu’une dictature ce qui implique la fin de toutes les libertés
individuelles.
La solution prônée par monsieur de Closets
consiste à en venir directement à ce stade, sans retour et sans passer
par la case "départ" — je pense pour ma part que c’est une mauvaise
idée. La solution qui à mon avis satisferait tout le monde, salariés
comme la plupart des "petits" patrons, c’est celle qui sert d’abord
l’intérêt général : un gouvernement par le peuple et pour le peuple. Le
tirage au sort me semble une bonne idée pour éviter justement les
conflits d’intérêts, mais je peux encore croire aussi à la
représentation du moment que l’élection se fait à armes égales càd à
finances et accès médiatique égaux pour que toutes les idées puissent
s’exprimer, et pas seulement celles des candidats des "gros riches".
Dans un cas comme dans l’autre, le point de départ serait l’accès de ce
peuple à une information complète, impartiale ou plutôt "objective", ou
pluri-subjective, avec une éducation qui lui permette d’analyser et de
comprendre pour lui-même cette information. Problème : l’école "éduque"
plutôt que d’enseigner, et la télé quand elle ne s’emploie pas à
débiliter le spectateur, s’occupe à "décrypter" l’actualité pour lui...
et quand on sait que les patrons des principaux médias sont encore et
toujours les mêmes technocrates, Dassault et Cie, je crois que la boucle est bouclée et que les choses sont claires.
Une dernière citation pour la route ?
«
Quand mon père est revenu bosser dans les usines de l’Ohio, quand il
est rentré de la Seconde guerre, il n’en restait que ruines et décombres
et il a dit : "ces types ont fait ce qu’Hitler n’a pas pu faire."
"Ces
usines ont construit les tanks et les bombes qui nous ont permis de
gagner la guerre. Nous avons envoyés nos fils en Corée et au Vietnam,
ils y sont morts et maintenant, nous nous demandons pourquoi."
"Depuis
la vallée de la Monongahela [industrie sidérurgique au 19ème siècle]
jusqu’aux gisements de fer de la Mesabi Range, jusqu’aux mines de
charbon des Appalaches, l’histoire reste toujours la même : 700 tonnes
de métal par jour et maintenant vous me dites que le monde a changé.
Maintenant que je vous ai rendu riche, assez riche pour oublier mon
nom... et Youngstown [centre sidérurgique aujourd’hui déserté]."
[...]
"Quand
je mourrai, je ne veux pas d’un coin de Paradis — je ne pourrais pas y
faire le travail comme il faut. Je prie pour que le Diable vienne et
m’emmène plutôt dans les fours rougeoyants des Enfers." » (Bruce Springsteen, Youngstown)